Le cinquantenaire du traité de Rome va, sans nul doute, être l’occasion de faire tonner les grandes orgues de la bienpensance « européiste » : j’appelle ainsi l’idéologie de ceux qui, au nom de l’idée européenne, ont en réalité mis bas tout ce qui pouvait permettre l’émergence d’un acteur européen stratégique pour le XXIe siècle :
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Rédigé par Jean-Pierre Chevènement le 19 Mars 2007 à 13:08
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Chevènement : «Le monde a besoin de l’humanisme du Liban», L'Orient Le Jour, 17 mars 2007.
L'Orient Le Jour : Quel regard portez-vous sur les relations profondes qui unissent la France et le Liban, et particulièrement depuis le 14 février 2005 ?
Jean-Pierre Chevènement : Depuis des siècles, la France entretient avec la région du Levant des relations profondes, aussi bien culturelles, économiques que politiques, marquées notamment par les alliances conclues par François 1er et Louis XIV. Ces relations privilégiées, particulièrement avec le Liban, se sont poursuivies et développées au XIXe et au XXe siècle. Après un relatif effacement, la France a revivifié ces dernières années sa relation profonde avec le Liban, notamment en obtenant la tenue à Beyrouth du 9e sommet de la francophonie, événement qui a beaucoup contribué à la renaissance du rayonnement libanais. Ce sommet a aussi permis d’affirmer avec force, au lendemain des événements du 11-Septembre, l’attachement des cinquante peuples rassemblés dans la francophonie à une vision du monde, le dialogue des civilisations, fondement essentiel d’une « certaine idée » de la France comme du Liban. La solidarité agissante de la France avec le Liban, face à l’assassinat du Premier ministre Rafic Hariri et lors du conflit de 2007, exprime le caractère indéfectible du lien qui unit nos deux peuples. La disparition de Lucie Aubrac me touche profondément.
Cette femme exceptionnelle de vitalité et de courage a résisté dès le premier jour à l’occupant nazi, avec son compagnon Raymond Aubrac qui me l’a fait connaître bien plus tard, quand ministre de la Défense je l’ai aidé à retrouver le plan de vieux champs de mines au Vietnam pour faciliter des travaux de déminage essentiels pour la reprise d’une vie normale.
Lucie a été une figure emblématique de la Résistance et une inlassable militante du souvenir. Son audace, son courage resteront légendaires. Je n’oublie pas qu’elle m’avait fait l’honneur de présider mon comité de soutien en 2002, en lançant un appel aux « volontaires de 2002 » comme aux soldats de l’An II d’une nouvelle République. Que de chemin encore à parcourir ! Mais à l’heure où Ségolène Royal affirme sa personnalité avec une force remarquable, comment ne pas penser à tout ce que nous devons à cette femme admirable qui, elle aussi, mériterait bien d’entrer au Panthéon avec Olympe de Gouges.... Ségolène, la seconde jeunesse de Chevènement, Ariane Chemin, Le Monde, édition du 16 mars 2007 (page 25)Agenda et médiasJean-Pierre Chevènement est l'invité du jeudi politique France Inter - Le Point sur le thème : Vivre ensemble, questions sur les peurs et les insécurités des Français... Autre invité : Christian Estrosi, ministre délégué à l'Aménagement du territoire, soutien de Nicolas Sarkozy.
Voir sur le site de France Inter
L'émission sera podcastée sur le blog.
Je réponds à Rajeev qui, le 12 mars, émet l’idée qu’« inviter François Bayrou à rejoindre le pacte présidentiel de Ségolène Royal continue à jeter le doute sur le projet de cette dernière. C’est entretenir l’idée que les différences ne sont pas si grandes entre les deux candidats ».
Je pense comme Rajeev. Cette invitation est une erreur, d’autant que le pacte présidentiel concernant par exemple l’Europe n’a rien à voir avec le projet de François Bayrou qui consiste simplement à rendre « plus lisible » le projet de Constitution européenne. Dois-je citer Ségolène Royal à Villepinte ? Le discours de François Bayrou, homme au demeurant fort sympathique, et que je trouve même courageux dans la détermination qu’il a mise depuis cinq ans à prendre ses distances avec l’UMP, n’en reste pas moins étonnement creux.
S’agissant de la Constitution européenne, il se propose simplement de la rendre « lisible » (discours du 12 février, repris le 5 mars 2007). Quel changement sur le fond veut-il y apporter ? Je l’ai cherché en vain. Sur l’histoire de l’idée européenne – la mise en commun, par exemple, du charbon et de l’acier en 1951 qui nous aurait ensuite évité la guerre, ce n’est qu’un tissu de balivernes et de radotages, que les références pieuses à Robert Schuman, priant, ne peuvent soustraire à un esprit critique même moyennement développé.
De même sur l’Ecole, François Bayrou veut restaurer « la discipline et l’excellence scolaires » (discours de Toulouse du 5 mars 2007. A la bonne heure ! Mais comment compte-t-il s’y prendre ? Nous ne le saurons jamais. Aucune conception claire de l’Ecole n’apparaît jamais dans les discours de cet ancien ministre de l’Education Nationale. M. Bayrou veut réduire la dette et donner un socle social à la République. Mais sur quelles mesures concrètes déboucheront ces pieuses intentions qui risquent fort de s’avérer contradictoires ? Là encore nous resterons dans le flou le plus total. Il n’est évidemment par malvenu de parler d’identité nationale dans une campagne présidentielle.
La nôtre s’identifie largement à l’identité républicaine, laquelle plonge ses racines dans ce qui lui préexistait : la langue française par exemple. Ségolène Royal l’a fort bien exprimé à la Halle Carpentier et à Villepinte.
Ce qui est malvenu chez M. Sarkozy c’est de vouloir créer un ministère de l’immigration et de l’identité nationale. Déjà l’idée de créer un ministère de l’immigration n’est pas, selon moi, une bonne idée : l’immigration est en effet une question transversale qui concerne un grand nombre de ministères. Vouloir créer un ministère-ghetto pour les immigrés est loin d’être une idée géniale mais c’est la conjonction de coordination « et » qui fait le plus problème : la question de l’identité nationale de la France à notre époque est, comme le relève justement Max Gallo, une question décisive. Mais elle n’intéresse pas que les immigrés. Elle concerne tout le pays et d’abord ses élites. C’est parce que celles-ci, depuis longtemps, ont cessé de croire en la France que l’intégration des immigrés est rendue plus difficile*. L’amalgame fait par M. Sarkozy entre l’identité nationale et les immigrés n’est pas innocent. Ce petit « et » est un clin d’œil adressé à une conception de la France qui n’a rien de républicaine. Un petit « et » qui fait mal à tous les républicains. *Cf. à cet égard, l’excellent Cahier de « Res Publica » « La République au défi des banlieues » |
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