Jean-Pierre Chevènement est l’invité de Rolland Mihail dimanche 4 mars à 8h50.
L'émission est podcastée ci-dessous.
Le site de France Inter Face à face paru dans Le Figaro Magazine, samedi 3 mars 2007
Le Figaro Magazine - Pourquoi la mondialisation fait-elle peur aux Français ?
Jean-Pierre Chevènement - Elle ne fait pas peur à tout le monde. Il y a ceux qui en profitent, des multinationales qui font des bénéfices à l'étranger et les plus fortunés qui effectuent des placements avantageux. Mais une majorité de Français, soucieux de l'avenir du pays, ressentent une profonde inquiétude. Nous sommes structurellement affrontés à des pays à très bas coûts salariaux, et qui ont une capacité technologique et scientifique égale à la nôtre, la Chine et l'Inde. Nous n'avons pas, au contraire des Etats-Unis, l'extraordinaire avantage d'une monnaie mondiale comme le dollar qui leur permet de vivre en déficit, c'est-à-dire à crédit. Enfin, l'Europe a anéanti le tarif extérieur commun, il n'y a plus de préférence européenne. En 1972, la moyenne des droits de douane était de 14,5%, elle est actuellement de 1,5%. L'Europe a vécu cinq siècles sur une position de rente objective. Tout cela est terminé. Je ne pense pas que cela puisse être toléré sans que l'Europe ne rétablisse une forme de préférence communautaire ou, en tout cas, qu'elle se donne les moyens d'une croissance plus forte. Rappelons qu'elle est aujourd'hui la lanterne rouge de la croissance mondiale. L’Airbus A 350 ne pourra être développé sans la contribution des Etats.
Le plan d’économies annoncé par Louis Gallois ne permet pas ce financement. Quand j’entends M. Sarkozy déclarer dans sa conférence de presse d’hier : « Les Etats ne sont pas les actionnaires les mieux avisés », je me demande si je rêve. Est-ce que M. Arnaud Lagardère et M. Forgeard qui ont vendu leurs actions avant que soient révélées les difficultés de l’A 380 sont « des actionnaires avisés » ? Pour ce qui est de la gestion de leur patrimoine personnel certes ! Mais pour l’avenir de l’entreprise EADS – Airbus certainement non !
Nous sommes bien là en présence de cette tendance fondamentale au court-termisme qui caractérise la gestion du « capitalisme patrimonial » cher à Alain Minc. Les actionnaires se paient d’abord, peu importe l’avenir de l’entreprise, ses investissements, sa recherche, le renouvellement de sa gamme de produits, ses salariés, leur qualification et leur formation. Ainsi s’opère la déconnection des entreprises et des territoires. Je réponds avec retard à plusieurs messages, et en particulier à celui de Lionel en date du 23 février, qui me demande « jusqu’à quand je vais avaler mon chapeau » suite à la demande de Lionel Jospin, corroborée par une déclaration publique de Daniel Vaillant, de ne pas me voir figurer dans le « pack » du pacte présidentiel de Ségolène Royal.
Ma réponse sera simple : j’ai demandé à Ségolène Royal d’être chargé de la « coordination des interventions thématiques » et rien de plus, ce qu’elle m’a accordé. Je pense ainsi à me rendre utile. Dans la phase actuelle, il m’a semblé que le message de la candidate était la chose la plus importante et il me semble naturel de mettre mon expérience à son service. J’aimerais qu’il en aille de même pour tous les autres.
C’est pourquoi la création de « l’équipe du pacte présidentiel », composée de treize dirigeants socialistes, me paraît une bonne chose, en ce qu’elle clôt la phase de tensions internes au PS, liée à la désignation du candidat le 16 novembre dernier. Il aura fallu trois mois pour convaincre les concurrents malheureux de Ségolène Royal de se mobiliser. L’essentiel est qu’ils se mobilisent, y compris Lionel Jospin. M. Bayrou ne parle jamais des délocalisations industrielles. C’est un signe, non ?
En, revanche M. Bayrou propose d’inscrire l’équilibre des finances publiques dans la Constitution. C’est ce que demande, comme par hasard, la Présidente du MEDEF, Mme Parisot.
Il y a un mauvais usage des Constitutions : celui qui consiste à y inscrire les politiques à suivre et non pas seulement les règles du jeu. On l’a vu avec le projet de « Constitution européenne ». On connaît la suite. M. Bayrou veut remettre ça ! Agenda et médias
L'émission est diffusée de 20h30 à 21h15. Jean-Pierre Chevènement répondra aux questions de Frédéric Haziza (LCP-Assemblée nationale), Patrick Roger (Le Monde) et Ilana Moryoussef (France Info). Ségolène Royal est-elle renforcée par sa nouvelle équipe de campagne ? Y’a-t-il une politique étrangère alternative à gauche ?
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