Carnet de Jean-Pierre Chevènement



L’idée de Mme Merkel de considérer les affaires européennes comme des affaires de "politique intérieure" est l’illustration même d’une dérive européiste grosse de dangers.

Cette idée est une nouvelle formulation du "droit d’ingérence". Comme chacun sait, on n’a jamais vu les faibles s’ingérer dans les affaires des forts. A l’inverse, on voit Mme Merkel, et à ses côtés M. Sarkozy, bien mal inspiré, tancer la Grèce de très haut pour n’appliquer pas assez vite les recettes déflationnistes conçues par le nouvel "hégemon" (puisqu’on s’exprime ainsi désormais).

Mme Merkel s’est aussi immiscée de manière malencontreuse dans la campagne présidentielle française en appuyant M. Sarkozy. L’un et l’autre veulent faire avaler la prétendue "règle d’or" au peuple français, à deux mois de l’élection présidentielle.

Cette potion est absurde : Joseph Stiglitz et Paul Krugmann, deux prix Nobel d’Economie, sans parler de beaucoup de nos économistes parmi les plus chevronnés (Jean-Paul Fitoussi et j’en passe…) ont démontré que la mise en œuvre simultanée de plans de déflation dans toute l’Europe conduirait à une récession générale. Ce point essentiel ne peut-il être débattu ? La zone euro est et reste fragile. Ce n’est pas parce que les banques, inondées de liquidités à trois ans, à un taux de 1%, ont momentanément souscrit des bons d’Etat à 5,8% en Italie que la crise des dettes souveraines est derrière nous. La récession en marche fera sauter les fragiles barrières imaginées par "Merkozy" : croit-on ainsi que le MES (mécanisme européen de stabilité), au capital de 80 milliards d’euros, pourra recueillir par voix d’émissions sur les marchés financiers, les 500 milliards d’euros prévus qui seraient de toutes façons insuffisants pour faire face à un défaut espagnol ou italien ?

Rédigé par Jean Pierre Chevenement le 10 Février 2012 à 12:54 | Permalien | Commentaires (1)

Intervention de Jean-Pierre Chevènement au Sénat lors du débat sur la situation de l'industrie automobile, jeudi 9 janvier 2012.


Les ventes de voitures neuves en France ont chuté de 20,7 % en janvier 2012. C’est principalement l’effet de la récession qui affecte l’économie française, et dont on peut craindre qu’elle se prolonge, étant donné les mesures budgétaires restrictives mises en œuvre dans la zone euro sous l’impulsion du gouvernement de Mme Merkel et que le traité européen accepté par M. Sarkozy va institutionnaliser à travers une prétendue « règle d’or ».

Chaque jour on nous vante le modèle allemand, dont chacun sait qu’il est intransposable, car tous les pays ne peuvent pas être excédentaires en même temps.

Cette campagne publicitaire gratuite organisée par M. Sarkozy en faveur du « Made in Germany » a au moins un effet : tandis que les marques françaises connaissent un recul plus fort que la moyenne – 27,4 % pour PSA et – 32,7 % pour Renault-Dacia – les marques allemandes, elles, s’envolent sur le marché français : + 16 % pour BMW, + 18,2 % pour Volkswagen et un petit 0,8 % pour Mercedes.

On peut naturellement voir dans le tassement des ventes de voitures françaises l’effet du vieillissement des modèles comme la Peugeot 207 et la Renault Clio III. Peut-être le recyclage de la 207 et de la Scenic, et le lancement de nouveaux modèles comme la Peugeot 208 ou la 3008 hybride 4 ou la DS5 vont-ils redynamiser les ventes. Je l’espère. Il n’en reste pas moins que le marché français est, au mieux, stagnant.

Rédigé par Jean Pierre Chevenement le 9 Février 2012 à 15:12 | Permalien | Commentaires (1)

Jean-Pierre Chevènement était l'un des invités de "Ça vous regarde" sur LCP, mardi 7 février 2012. Il débattait avec Jean Leonetti, Ministre chargé des Affaires Européennes et Benjamin Masse-Stamberger, grand reporter à L’Express sur le thème "20 ans après Maastricht, la fin d’un rêve ?"


Verbatim express

  • Je ne me suis pas résigné facilement à voter contre Maastricht en 1992. J'étais un membre de la direction du Parti Socialiste, le seul à être contre. Il est vrai que j'avais lu le traité, ce qui n'était pas le cas de beaucoup. J'avais vu qu'on transposait à la France et aux autres pays les règles de la Bundesbank allemande : une Banque centrale indépendante qui aurait pour unique but de lutter contre l'inflation.
  • Quand on transfère sa souveraineté à un organisme politique complètement technocratique, on se pose des questions. Je me suis aperçu que le groupe Delors avait adopté ces règles sous la dictée de la Bundesbank. Ces règles ont pourtant été adoptées avant la chute du mur de Berlin.
  • A l'époque il y avait deux thèses : la monnaie unique ou la monnaie commune. La caractéristique de la monnaie unique, dont on subit les conséquences aujourd'hui, est qu'elle ne permet pas la dévaluation. Les écarts de compétitivité se sont creusés, notamment sous la pression de l'Allemagne qui a appliqué une politique de déflation salariale. Cela se traduit par d'énormes excédents pour les uns et d'énormes déficits pour les autres.
  • Nous sommes pris dans le piège et nous continuons de nous y enfoncer en abandonnant notre souveraineté budgétaire.
  • On a fait l'euro car on avait peur de l'Allemagne. Certains ont pensé qu'en prenant le mark à l'Allemagne, on allait s'approprier sa puissance.
  • On a aujourd'hui une "Mezzogiornisation" du Sud de l'Europe comparé à un Nord industriel, mercantiliste, excédentaire. Les autres pays sont en voie de désindustrialisation. La France est un bon exemple.
  • Tous ceux qui parlent de produire en France sont ceux qui ont accepté l'abaissement de nos barrières tarifaires et la libération des mouvements de capitaux.

Rédigé par Chevenement.fr le 8 Février 2012 à 17:18 | Permalien | Commentaires (1)

Intervention de Jean-Pierre Chevènement lors du débat de politique étrangère au Sénat, le mardi 7 février 2012.


Monsieur le Ministre d’Etat,

Je souhaite attirer votre attention sur la situation passablement chaotique qui se développe en Libye depuis la chute de Mouamar Khadafi :
Arrestations arbitraires, actes de torture relevés par des organisations humanitaires comme Amnesty International ou Human Rights Watch, comme ceux qui ont laissé mort l’ancien ambassadeur libyen à Paris, M. Brebech à Zentane, le 20 janvier 2012, ville où par ailleurs se trouve détenu Saïf Islam Kadhafi, traitement racistes de travailleurs africains, heurts armés, ainsi dans la ville de Beni Oulid, où un « Conseil des Anciens » issu de la tribu des Warfalla semble désormais s’être affranchi du gouvernement de transition, développement des féodalités locales fragmentant le pays, dissémination d’armes dans la bande sahélienne, avec les menaces qui recommencent à peser sur le Mali, le Niger, le Tchad, dissensions enfin à l’intérieur du Conseil National de Transition qui vient d’adopter une loi électorale fondée sur un système de listes pour élire la prochaine assemblée constituante. Or ce système de listes adopté sous la pression des Frères musulmans ne peut évidemment que leur profiter. Le CNT a aussi décidé de faire de la charia la source principale du droit et d’autoriser à nouveau la polygamie que la Libye était avec la Tunisie le seul pays arabe à avoir aboli.

Vous nous confirmerez, M. le Ministre, si là était bien le résultat recherché et, sinon, quelles démarches le gouvernement français a entrepris auprès des autorités libyennes pour faire respecter les doits de l’Homme dont se réclamait la révolution libyenne soutenue par l’OTAN. Nous ne pouvons que nous interroger sur le fait de savoir s’il n’eût pas mieux valu à l’été 2011 rechercher une issue politique, comme il semble que cela eût été possible, sous l’égide de l’Union africaine.

Vous-même, dans votre intervention du 12 juillet à la tribune du Sénat déclariez : « L’intervention militaire n’est qu’un moyen et non une fin ; la fin c’est la recherche d’une solution politique et nous y travaillons d’arrache-pied ». Vous évoquiez « un processus politique » et souhaitiez qu’une force de stabilisation internationale, de préférence une force de l’ONU, soit dépêchée sur place. C’eût été la sagesse pour favoriser une paix sans exaction, sans vengeance et sans esprit de revanche.

Rédigé par Jean Pierre Chevenement le 7 Février 2012 à 16:28 | Permalien | Commentaires (1)

Entretien de Jean-Pierre Chevènement à L'Est républicain, jeudi 2 février 2012.


"Je vais bien sûr faire entendre ma voix, demain comme hier, au long de cette campagne"
L'Est républicain: Qu’est-ce qui vous a conduit à renoncer à votre candidature ? C’est la difficulté de récolter les 500 signatures ?
Jean-Pierre Chevènement:
Non, ce n’était pas le plus préoccupant. Il nous restait du temps et j’avais bon espoir d’y parvenir. La raison, c’est le manque de moyens financiers. Je ne suis pas riche, vous le savez bien… Avec 100.000 €, il ne m’était pas possible de faire une campagne.

Les sondages ne vous qualifiaient que de 1 % des voix, cela vous a-t-il découragé ?
Si j’avais mené une campagne démagogique, j’aurais peut-être eu plus de succès. Mais j’ai choisi une campagne délibérément pédagogique, très articulée, qui s’adressait vraiment à l’intelligence.

C’était risqué…
Ce n’était peut-être pas la meilleure solution (rire). Je ne la regrette cependant pas. Elle m’a permis d’affirmer notre identité et le point de vue qui est le mien et celui de mes amis. J’ai pu m’exprimer abondamment dans les médias qui ont bien voulu recueillir mes impressions et mes analyses. J’ai effectué de nombreux déplacements sur le terrain, j’ai visité une vingtaine d’usines.

Qui allez-vous soutenir ? Allez-vous continuer à vous exprimer ?
Le communiqué que j’ai publié suffit à ce stade. Il est assez explicite et je parlerai plus longuement la semaine prochaine. Je vais bien sûr faire entendre ma voix, demain comme hier, au long de cette campagne. Malgré le refus de Mme Merkel, qui prétend dicter sa loi au suffrage universel et refuse d’accepter la révision du traité, j’expliquerai les périls où nous conduit l’euro surévalué, la nécessité d’étendre les missions de la Banque centrale européenne et d’organiser la relance en Europe, l’importance de préserver la souveraineté budgétaire et fiscale de la France, qui doit rester dans les mains du Parlement français.
Mots-clés : 2012 allemagne euro mrc ps

Rédigé par Chevenement.fr le 2 Février 2012 à 10:54 | Permalien | Commentaires (21)

Carnet de Jean-Pierre Chevènement



Déclaration de Jean-Pierre Chevènement, Sénateur du Territoire de Belfort, ancien ministre, 1er février 2012.


Je me suis porté candidat à la Présidence de la République le 5 novembre 2011, "pour faire bouger les lignes" et mettre la gauche et la France à la hauteur des défis qu’elles doivent relever.

Dans la grave crise à travers laquelle une construction européenne mal pensée dès l’origine, peut conduire la France à une position définitivement subordonnée, j’ai voulu, à travers cette "candidature pédagogique", rendre nos concitoyens attentifs à quatre enjeux majeurs de la période qui s’ouvre :

1) Pour réindustrialiser le pays, condition de la survie du modèle républicain, il faut, chose non suffisante mais indispensable, une monnaie moins chère que l’euro actuel.

2) Il est nécessaire, en second lieu, d’organiser la croissance en Europe et non pas la récession à perte de vue, comme nous y conduirait le projet de traité européen dont les grandes lignes ont été entérinées hier, le 30 janvier 2012, à Bruxelles. Si le gouvernement de Mme Merkel, qui prétend dicter sa loi au suffrage universel, n’acceptait pas la révision du traité pour étendre les missions de la Banque Centrale européenne et organiser la relance en Europe, mieux vaudrait alors transformer l’euro de monnaie unique en monnaie commune.

3) La souveraineté budgétaire et fiscale de la France doit rester dans les mains du Parlement français. Sa préservation est la condition, à tous égards, de notre indépendance future, y compris diplomatique et militaire.

4) Il est temps de redresser l’Europe à partir de ses nations. Celles-ci sont le cœur vivant de la démocratie. Le but est d’édifier une "maison commune européenne", ou comme disait le général de Gaulle, une "Europe européenne", ouverte vers la Russie à l’Est et vers la Méditerranée et l’Afrique, au Sud. Cette construction se fera avec les peuples, c’est-à-dire par la force des choses, à géométrie variable, avec ceux qui le veulent.

Ayant pu exercer, autant que je le pouvais, le rôle pédagogique que je m’étais assigné, et n’ayant plus aujourd’hui les moyens de continuer ma campagne, je décide de retirer ma candidature à l’élection présidentielle. Je continuerai cependant, demain comme hier, à faire entendre ma voix pour servir la République.

Dans les temps difficiles qui sont devant nous, rien n’est plus important que de maintenir un recours républicain.

J’indiquerai bien sûr, le moment venu, le candidat à l’élection présidentielle auquel, les yeux ouverts, j’apporterai mon soutien.
Mots-clés : 2012 allemagne bce euro europe

Rédigé par Jean Pierre Chevenement le 1 Février 2012 à 10:00 | Permalien | Commentaires (4)

Entretien de Jean-Pierre Chevènement pour Courrier Cadres, mardi 31 janvier 2012.


"Ce sont les revenus du capital qu’il faut taxer en priorité"
Courrier Cadres: Quel est votre constat sur l’état actuel de l’économie ?
Jean-Pierre Chevènement: Il est déplorable : la France a vu sa base industrielle se rétrécir, passant de 30 % à 13 % de notre valeur ajoutée depuis 30 ans. Les délocalisations vers les pays à bas coût salarial - y compris européens -, la primauté donnée à la rente financière, le manque de patriotisme de nos grands groupes industriels qui n’investissent pas en France, tout cela y concourt. La France demeure dans le groupe de tête si on prend en compte le PIB par habitant mais cela ne saurait dissimuler les faiblesses de notre économie : notre pays consomme majoritairement des produits qu’il ne fabrique pas et ce que nous produisons pour l’exportation est pénalisé par le taux trop élevé de l’euro et par la détérioration de notre compétitivité par rapport à l’Allemagne depuis une dizaine d’années qui entraînent un lourd déficit de notre balance commerciale. L’avenir est encore assombri par les orientations de politique économique retenues au niveau européen : la voie de l’austérité inscrite dans le projet de traité européen ne peut qu’enfoncer l’Europe dans une récession de longue durée et contribuer encore plus à réduire notre consommation et nos capacités productives. La dette ne pourra être épongée tant que nous ne renouerons pas avec la croissance. Nous n’en prenons pas le chemin.

Rédigé par Chevenement.fr le 31 Janvier 2012 à 20:07 | Permalien | Commentaires (1)

Jean-Pierre Chevènement était l'invité de l’émission "Une heure avec" sur LCI, lundi 30 janvier 2012. Il répondait aux questions de Michel Field.


Verbatim express

  • Ma candidature n'est en aucun cas une candidature démagogique. Par conséquent, je me donne une certaine souplesse. Si j'obtiens mes parrainages et que je pense que cela peut être utile, je me maintiendrai. Si, par contre, je trouve qu'il y a une fenêtre politique pour peser, je le ferai. Cependant, le moment n'est pas venu.
  • Je n'ai pas grand chose à changer, aujourd'hui, à la thématique de ma campagne de 2002 qui était, à bien des égards, prémonitoire.
  • Il faut bien me reconnaître le mérite d'une certaine continuité depuis 1992.
  • Avec la monnaie unique, nous avons crée quelque chose qui ne tient pas la route. Il aurait peut-être fallu y penser plus tôt.
  • La désindustrialisation est ma grande angoisse pour l'avenir de la France. On ne peut pas maintenir un grand pays avec une protection sociale efficace, avec des services publics performants quand sa base industrielle se réduit. Or, elle est passée de 25% du PIB à 12%.
  • J'ai toujours été frappé de constater que nos périodes de désindustrialisation coïncidaient avec les périodes de surévaluation monétaire.
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