Jean-Pierre Chevènement était l'invité de PolitiqueS sur LCP samedi 14 décembre 2013. Il répondait aux questions de Serge Moati.


Verbatim express :

Sur les différentes interventions internationales de la France
  • (A propos des interventions au Mali et en Centrafrique) Qui pourrait le faire si la France ne le fait pas ? Je ne vais pas souligner l'impotence stratégique de l'Europe. Elle est démontrée. Elle est incapable de réagir. D'autres pays pourraient intervenir, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis, mais ils ne connaissent pas ces régions.
  • Je souligne que c'est à la demande de l'ONU, et dans le cadre d'une résolution, que la France intervient à des fins essentiellement humanitaires, et pour remettre ce pays sur les rails, ce qui est déjà beaucoup plus difficile.
  • La France n'est pas seule : il y a une force, la MISCA, qui regroupe les troupes du Tchad, du Congo, de la République démocratique du Congo, du Cameroun, du Gabon, et le président Hollande a annoncé la formation de 20 000 soldats africains par an, ce qui est un objectif extrêmement ambitieux.
  • La France intervient en accord avec l'Afrique, et ses organisations internationales, comme l'Union Africaine. Elle ne peut pas le faire autrement. C'est un point essentiel.
  • Si elle avait eu lieu, l'intervention en Syrie aurait été une très grave erreur, qui nous aurait entraîné dans une guerre que l'ONU n'aurait pas autorisée.
  • Cela aurait ressemblé à la guerre d'Irak. On en voit aujourd'hui le résultat. L'Iran est devenue la puissance dominante dans la région. On a aussi ouvert la voie à l'islamisme radical. Et cette intervention a été ressentie comme une guerre impérialiste, non seulement dans l'ensemble du monde arabe, mais aussi dans l'ensemble du tiers-monde.
  • La France ne doit pas supporter seule le coup de cette mission en Centrafrique. M. Von Rompuy au sommet africain a annoncé que l'Europe mettrait 50 millions d'euros. Ca ne suffira pas, mais c'est un début.

Entretien de Jean-Pierre Chevènement au quotidien Le Progrès, propos recueillis par Dominique Goubatian, jeudi 12 décembre 2013.


"La monnaie unique est une fausse bonne idée"
Le Progrès: Votre nouveau livre met-il en avant les défauts de l’Europe ?
Jean-Pierre Chevènement:
J’ai voulu comprendre comment l’Europe et la France en étaient arrivées là où elles en sont aujourd’hui. J’ai pris comme point de départ la Première Guerre mondiale. J’ai rapproché deux mondialisations libérales. D’une part, celle qui s’est développée sous égide britannique, dont l’issue a été la guerre de 1914-1918, et d’autre part l’américaine après 1945, qui a conduit à la crise du capitalisme financier et à la montée des pays émergents, au premier rang desquels la Chine.

Vous dites que l’Europe est sortie de l’histoire. Pourquoi ?
On voit bien que l’Europe actuelle ne marche pas. Élargie à 28, l’Europe a des divergences d’intérêts et des lenteurs de réactions qui génèrent une véritable impotence stratégique.

Pour quelles raisons êtes-vous critique sur la monnaie unique ?
La monnaie unique est une fausse bonne idée. Elle est viciée dans son principe car elle juxtapose en son sein des économies nationales hétérogènes. L’euro est une monnaie surévaluée. Il faut réformer l’euro afin de le ramener à un cours tolérable.
Mots-clés : 1914-2014 euro europe

Rédigé par Chevenement.fr le 12 Décembre 2013 à 22:46 | Permalien | Commentaires (3)

Jean-Pierre Chevènement était l'invité d'Activ' Radio mercredi 11 décembre 2013. Il répondait aux questions de Timothée Maymon.


"Dans la guerre des monnaies, l'Europe joue avec les bras attachés dans le dos"
activradio.mp3 Activ'Radio  (12.45 Mo)

Verbatim express :

  • Dans les commémorations du centenaire de 1914, il y a beaucoup de malentendus. On lit toujours le passé à la lumière du présent, mais on ne comprend pas ce qui s'est passé quand on essaye de discréditer les nations, comme si elles étaient à l'origine de la Première Guerre mondiale. Je crois que ce n'est pas le cas.
  • L'idée du livre est de comparer les deux mondialisations, la mondialisation britannique, avant 1914, et ensuite la mondialisation américaine, après 1945. Dans les deux cas, on voit se modifier profondément la hiérarchie des puissances. Les causes profondes de la Première Guerre mondiale sont là.
  • Les élites allemandes, pénétrées d'idées pangermanistes, ont pris tout une série de décisions inconsidérées, précipitant la guerre, donnant son caractère véritablement mondial à ce conflit.
  • Les historiens aujourd'hui s'intéressent surtout à l'histoire des mentalités. Ils ne cherchent pas à comprendre ce qui, au cours du siècle, a entraîné la marginalisation de l'Europe. Je tire de mon livre des réflexions pour aujourd'hui.

Intervention de Jean-Pierre Chevènement, dans le cadre de la deuxième lecture du projet de loi de programmation militaire au Sénat, mardi 10 décembre 2013.


Ce contrat nous engage tous
Monsieur le Président, Monsieur le Ministre,

L’adoption par le Sénat en deuxième lecture de la loi de programmation militaire dans le texte issu des travaux de l’Assemblée Nationale, et utilement précisé à cette occasion, marquera la fin positive d’un long marathon que vous avez su mener à bien à partir de l’arbitrage initial du Président de la République assurant à nos armées une ressource totale de crédits de 190 milliards d’euros sur six ans.

Mon concours, et plus généralement celui des sénateurs RDSE, au nom desquels je m’exprime, ne vous manqueront pas plus à l’issue de la seconde lecture que de la première.

Comme l’a rappelé le Président de la CAEDFA du Sénat, M. Jean-Louis Carrère, dont je tiens à saluer le travail considérable et l’implication constante, l’Assemblée Nationale a approuvé la plupart des avancées introduites par le Sénat et notamment les clauses de sauvegarde permettant le respect de la trajectoire financière dessinée par la LPM. A l’initiative du gouvernement a été introduite une majoration potentielle éventuelle des recettes exceptionnelles, à hauteur de 500 millions d’euros, pour compenser les annulations de crédits de la fin de gestion 2013. En effet, le Ministère de la Défense a dû contribuer, à hauteur de 486 millions d’euros, à l’effort de réduction des déficits publics demandé à tous les ministères pour que l’Etat puisse tenir les engagements européens qu’il a pris en la matière. C’est à ce prix que la Commission européenne a accordé son satisfecit au budget 2014.

Rédigé par Jean-Pierre Chevènement le 11 Décembre 2013 à 00:24 | Permalien | Commentaires (2)

Agenda et médias



Entretien de Jean-Pierre Chevènement au journal "Le Télégramme", mercredi 10 décembre 2013. Propos recueillis par Philippe Reinhard.


"Il faut une école forte"
Le Télégramme : Le rapport Pisa dégrade l'école française. Est-elle aussi nulle que le laisse entendre ce rapport ?
Jean-Pierre Chevènement : Elle n'est pas nulle, mais il est incontestable que son niveau se dégrade. Toutefois, il faut savoir que les qualités propres à l'école française - clarté, capacité d'abstraction - ne sont pas mesurées par le rapport Pisa. Je fais donc quelques réserves sur l'instrument de mesure.Toutes les enquêtes internes du ministère de l'Éducation nationale montrent une dégradation de l'orthographe, de la grammaire, de la syntaxe, des capacités de calcul et de mémorisation. Je pense que l'environnement des enfants est marqué par l'immédiateté. Nous sommes dans la vidéosphère. Les progrès d'internet ont beaucoup d'effets pervers.

Des effets pervers qui ne touchent pas que la France...
Cela ne concerne pas que la France, mais cela touche davantage un enseignement de type classique et très structuré comme le nôtre.Mais la cause principale est ailleurs. Elle est dans la vogue de ces pédagogies constructivistes qui aboutit à l'affaiblissement de ce qu'on appelle « l'effet maître », le rapport que l'enseignant a avec l'élève.

Les maîtres ne sont-ils pas à la hauteur de leur mission ?
Un rapport récent de l'inspection générale de l'Éducation nationale dit que « les maîtres ne disposent pas, pour la plupart d'entre eux, des outils conceptuels et didactiques pour mettre en oeuvre les programmes tels qu'ils existent ». C'est un rapport tout à fait décapant. Il est d'ailleurs assez étonnant qu'il ait pu passer à travers le filtre de la hiérarchie.

Les actes du colloque du 14 octobre 2013 sont disponibles en ligne sur le site de la Fondation Res Publica.


Actes du colloque de la Fondation Res Publica: "L'exception culturelle"
  • Accueil de Jean-Pierre Chevènement, président de la Fondation Res Publica
  • Introduction de Alain Dejammet, Président du Conseil scientifique de la Fondation Res Publica
  • La culture, une histoire française, par Jérôme Clément, Président de la Maison de ventes PIASA depuis 2011, Président du Théâtre du Chatelet, Président du Centre national de cinématographie de 1984 à 1989, puis de la chaîne de télévision franco-allemande ARTE de 1989 à 1999 et de 2003 à 2007
  • La culture dans les relations internationales, par Bernard Miyet, Président de la société de conseil Valarda Consulting, Président du Directoire de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) de 2001 à 2012

le 5 Décembre 2013 à 02:12 | Permalien | Commentaires (0)

Entretien de Jean-Pierre Chevènement à l'Hémicyle, le mardi 3 décembre 2013. Propos recueillis par Thomas Renou.


"L’'Allemagne n'est pas encore mûre pour une réorientation de la construction européenne"
L'Hémicyle : Déniez-vous le fait que le « besoin » d’Europe est une réaction à la Première Guerre mondiale ?
Jean-Pierre Chevènement : Les immenses souffrances endurées pendant cette guerre sont à l’origine d’un « besoin d’Europe », qu’avait exprimé Romain Rolland dès 1914. Sa revue, fondée en 1920, s’appelle d’ailleurs Europe. Il résulte de l’incompréhension des peuples quant aux tenants et aux aboutissants de cette guerre un besoin de dépassement, mais certainement pas parce ce conflit aurait été décidé par les nations – aucune nation ne voulait réellement la guerre. En réalité, la Première Guerre mondiale fut une guerre préventive, bêtement déclenchée par les cercles des classes dirigeantes de l’Allemagne de Guillaume II – je dis « bêtement » parce que l’Allemagne n’avait aucun intérêt à la déclencher, c’était une puissance industrielle alors extraordinairement dynamique. Cette guerre dont les causes profondes sont à rechercher dans la modification de l’équilibre des puissances induit par la première mondialisation, celle d’avant 1914, a été déclenchée par un petit groupe de décideurs, pas par les peuples, qui ne doivent pas être mis en accusation. Ce « besoin d’Europe » a été fourvoyé dans la construction d’une Europe économiciste, technocratique et inféodée. Économiciste, parce que l’on a prétendu construire l’Europe en choisissant pour base le marché ; technocratique, parce que l’on a d’emblée confié le monopole de la proposition à une Haute Autorité devenue la Commission européenne ; inféodée, parce que les deux guerres ont fait passer l’hégémonie d’un côté à l’autre de l’océan Atlantique et que l’Europe s’est faite sous tutelle américaine, à l’ombre de la guerre froide. Cette transition s’est faite lentement : en 1919-1920, les États-Unis refusent de ratifier le traité de Versailles, et ne donnent pas à la France la garantie que Wilson avait promise à Clemenceau, ils se retirent dans leur isolationnisme prudent. Les conditions de la Seconde Guerre mondiale sont créées par le fait que l’équilibre de Versailles dépendait de cette garantie américaine, et cette garantie va manquer. Encore aujourd’hui, on accrédite la thèse de Hitler, selon laquelle cette Seconde Guerre mondiale est une conséquence du traité de Versailles alors que les élites allemandes ont, en fait, tout simplement refusé la défaite de 1918.

le 3 Décembre 2013 à 16:40 | Permalien | Commentaires (1)

Jean-Pierre Chevènement était l'invité de "Zemmour et Naulleau" sur Paris Première vendredi 29 novembre 2013. Il répondait aux questions d'Eric Zemmour et Eric Naulleau, puis débattait avec Marc Le Fur.


L'intervention vidéo de Jean-Pierre Chevènement débute à partir de 7min45.

Verbatim express :

  • Évidemment, la politique est dure. Elle l'a toujours été. Ce qui caractérise peut-être le moment que nous vivons, c'est que le débat politique est biaisé, rétréci, sans véritable portée. Il y avait autrefois des visions qui nous soulevaient au-dessus de nous-même et qui motivaient le désintéressement.

    Leçons de l'histoire du XXe siècle
  • Dans mon livre, je compare deux mondialisations, et je montre qu'à l'intérieur de ces mondialisations, il se produit des changements dans la hiérarchie des puissances.
  • Les mécanismes de l'explosion de la Première Guerre mondiale ne sont absolument pas expliqués par tous ceux qui sont chargés d'organiser les commémorations, par le pouvoir politique.
  • Il y a un parallèle à faire entre la montée de l'Allemagne impériale dans la première mondialisation et celle de la Chine dans la seconde. Sauf qu'on peut espérer que les Chinois soient plus intelligents que les élites pangermanistes, qui portent la responsabilité de la Première Guerre Mondiale.
  • C'est une grave faute de vouloir faire peser sur les nations la responsabilité de cette catastrophe, parce qu'on a ouvert la boîte de Pandore. On démonise aujourd'hui les nations pour mieux occulter ce qui se passe en Europe : la construction d'un système technocratique à l'ombre de l'Amérique, qui s'est institué dans les années qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale. Cela fait qu'aujourd'hui l'Europe n'a plus voix au chapitre, ne défend plus réellement ses intérêts, est en pilotage automatique, avec des nations qui n'ont plus le droit de l'ouvrir.
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