Une tribune de Jean-Pierre Chevènement parue sur Rue89, jeudi 8 décembre 2011.
Dans toute l’Europe, les défaites voire les déroutes de la gauche se révèlent liées à un décrochage d’avec les couches populaires. C'est ce scénario qu'il faut éviter en 2012 en France.


Pour gagner en 2012, la gauche doit retrouver le sens du peuple
En mai dernier, la Fondation Terra Nova proposait sans fard dans une note (1) désormais célèbre une clarification de la stratégie électorale du Parti socialiste. Celle-ci reposait sur une redéfinition de la coalition sociale que devait constituer la gauche pour l’emporter au second tour de l’élection présidentielle. Il faudrait en partie faire une croix sur les catégories populaires, rétives à l’imaginaire heureux de la mondialisation et soucieuse de protections, et s’appuyer sur de nouvelles catégories démographiques : les jeunes, les « minorités », et les « gagnants » de la mondialisation. Bien que cette note ait alors suscité une levée de boucliers, elle avait le mérite d’exposer publiquement les soubassements idéologiques d’une certaine gauche sociale-libérale.

Un essai (2) bref vient rappeler au candidat du Parti socialiste que 2012 ne se gagnera pas sans le peuple. Plusieurs contributions, dans un ensemble dense, méritent en particulier qu’on s’y arrête.

D’abord, ainsi que le rappelle avec clarté Rémi Lefebvre, « le poids des catégories populaires n’a guère diminué depuis trente ans (60% de la population si on agrège ouvriers et employés) ». La France compte encore en effet 8 millions d’employés et 6 millions d’ouvriers. Si certains patrons rêvaient d’« entreprises sans usines » au début de la décennie 2000, contribuant ainsi à la démobilisation industrielle, il vaudrait mieux se garder chez certains « penseurs » de rêver d’une France sans ouvriers. Le « politiquement pensable à gauche » devrait être capable de construire une victoire électorale à partir de cette réalité sociologique.

Rédigé par Jean Pierre Chevenement le 8 Décembre 2011 à 15:23 | Permalien | Commentaires (1)

Tribune de Jean-Pierre Chevènement parue dans le quotidien belge Le Soir, jeudi 8 décembre 2011.


La monnaie unique a été une erreur, mais il n’est jamais trop tard pour rectifier une erreur
La crise de l’euro était prévisible. Les vices inhérents à la conception d’une monnaie unique déconnectée des économies et des peuples ne pouvaient conduire à une prospérité commune.

Il était absurde de vouloir imposer à 17 pays très différents par leurs structures économiques et politiques, et par leurs cultures, un mark-bis. La monnaie unique a creusé les écarts de compétitivité en Europe, entre un Nord industriel (essentiellement l’Allemagne) à la balance commerciale fortement excédentaire (entre 150 et 200 milliards d’euros par an) et un Sud déficitaire en voie de désindustrialisation. L’euro est une monnaie surévaluée de 25%, qui écrase la compétitivité de la plupart des pays membres de la zone. La monnaie unique devait réunir les peuples, elle les divise.

Faute d’anticipation, faute d’ambition pour l’avenir, c’est aujourd’hui la débâcle qui menace la zone euro tout entière.

Le Fonds de stabilisation créé pour éteindre l’incendie n’a plus de réserves disponibles qu’à hauteur de 250 milliards d’euros face à des montagnes de dettes : ainsi l’Italie doit lever, à elle seule, près de 300 milliards en 2012. Le Fonds n’a pu bénéficier de l’effet de levier du « véhicule spécial » que les grands Etats émergents ont refusé d’alimenter au sommet du G20 à Cannes. Une cinquantaine de banques sont aujourd’hui en situation de préfaillite. Les taux d’emprunt à dix ans ne cessent de s’élever (près de 7% en Italie, 6% en Espagne, 5% en Belgique). La zone euro manque des instruments monétaires et financiers pour faire face à la crise. Les Etats comme la Banque Centrale interviennent trop peu et trop tard.

Rédigé par Jean Pierre Chevenement le 8 Décembre 2011 à 09:40 | Permalien | Commentaires (0)

Entretien de Jean-Pierre Chevènement au Dauphiné Libéré paru mercredi 7 décembre 2011


"Je suis candidat  pour faire bouger les lignes"
Dauphiné Libéré: Vous serez aujourd’hui à Grenoble pour une visite ciblée “recherche” dans le cadre de votre campagne présidentielle. Quel message comptez-vous délivrer aux chercheurs ?
Jean-Pierre Chevènement: Nous avons besoin aujourd’hui de relancer une grande politique de la recherche qui, même si elle n’a jamais été délaissée, n’a pas reçu les moyens nécessaires en crédits et en hommes pour se développer.

Quant au “crédit d’impôt recherche”, que j’avais créé en 1983 lorsque j’étais ministre de la Recherche, je ne le remets pas en question, mais je serai plus attentif à son efficacité et à la manière dont les grandes entreprises l’utilisent effectivement à des fins de recherche.

Grenoble est un haut-lieu des nanotechnologies. Quel est votre avis sur ce sujet, parfois polémique ?
Jamais je ne remettrai en cause le principe de liberté de la recherche qui est primordial. Et honnêtement, je ne pense pas qu’il faille renoncer aux recherches sur les nanotechnologies. Si elles sont bien encadrées, elles peuvent mener à des avancées considérables, dans tous les domaines, notamment la santé. La peur ne doit pas triompher de la raison.

Vous avez aussi une position bien nette sur le nucléaire.
Remettre en cause cette filière serait une grave erreur pour la France. Il faut au contraire développer les recherches sur les réacteurs de 4 e génération, qui fabriqueront leur propre combustible. Le prix du kWh nucléaire restera considérablement plus bas que celui des énergies renouvelables, qui sont de surcroît des énergies intermittentes.

Rédigé par Chevenement.fr le 7 Décembre 2011 à 12:46 | Permalien | Commentaires (0)

Jean-Pierre Chevènement était l'invité du matin sur France Info, mardi 6 décembre 2011. Il répondait aux questions de Raphaëlle Duchemin.


Verbatim express

  • Je pense que les notations des agences ont quelque chose d'ubuesque. Ces agences demandent à la fois la réduction des déficits et son contraire : la croissance
  • Il y a quelque chose de très politique, en fait, dans leur appréciation. Les agences sont la partie émergée d'un système qui oppose les marchés financiers et les peuples et dont l'enjeu est la démocratie.
  • Avec le système globalisé on a supprimé toute entrave aux mouvements de capitaux. Je pense qu'il faut, aujourd'hui, remettre un peu de viscosité dans le système et faire que les peuples retrouvent leur souveraineté
  • A propos du traité européen annoncé par N. Sarkozy et A. Merkel : Ce traité repose sur un mauvais diagnostic de la crise de l'euro. Celle-ci ne vient pas seulement des déficits budgétaires. Elle vient surtout des différences de compétitivité qui se sont creusées depuis 13 ans. On voit, par exemple, que l'Allemagne a gagné 15 points de compétitivité sur la France, grâce à une politique de déflation salariale
  • Ce traité est à contre-sens. Il prévoit une Europe de plus en plus disciplinaire.

Rédigé par Chevenement.fr le 6 Décembre 2011 à 13:15 | Permalien | Commentaires (0)
Le contenu du nouveau traité européen annoncé par Mme Merkel et M. Sarkozy est très grave : c’est l’acte de naissance d’une Europe régressive et disciplinaire. L’adoption d’une règle d’or constitutionnalisée, en fait règle d’airain, proscrivant tout déficit budgétaire sous le contrôle de la Cour de Justice européenne, c’est la garantie de politiques restrictives et récessionnistes prolongées dans toute l’Europe. C’est « la décennie perdue » évoquée par Mme Lagarde à l’horizon 2020.

Des sanctions automatiques, à travers cette innovation juridique que serait l’institution d’une règle de majorité minorée, c’est la mise à l’amende des pays les plus en difficulté. C’est l’Europe disciplinaire. Rien en contrepartie sur le rôle de la Banque Centrale européenne. M. Draghi est seul maître à bord : les peuples n’ont le droit que de se taire.

Sur le fond, M. Sarkozy et Mme Merkel se trompent : la crise de la monnaie unique ne vient pas du laxisme budgétaire des gouvernements mais de sa conception même : elle a juxtaposé des pays trop différents par leurs structures économiques, leurs cultures et leurs options politiques.

Rédigé par Jean Pierre Chevenement le 5 Décembre 2011 à 18:59 | Permalien | Commentaires (3)

Tribune de Jean-Pierre Chevènement dans Mediapart, lundi 5 décembre 2011.
Que faire d'une monnaie unique qui «ne marche pas»? Si elle veut remporter l'élection de 2012, la gauche doit refuser l'abandon de la souveraineté budgétaire et fiscale défendue par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy.


La gauche française face au défi européen
L'échec de la monnaie unique, qui a été le vrai projet des élites françaises depuis plus de trente ans (en gros depuis la création du système monétaire européen par Giscard et Schmidt en 1978), est un événement immense. Cet événement va télescoper toute la campagne présidentielle de 2012.

Pour la gauche comme pour la droite, ce sera un moment de vérité. On voit déjà Nicolas Sarkozy préparer l'opinion à l'abandon de la souveraineté budgétaire de la France à travers un nouveau traité européen et la constitution d'un «noyau dur», dont la monnaie risque d'être encore plus surévaluée que l'actuelle. Que restera-t-il dans dix ans de notre base productive, condition d'une protection sociale efficace? Et, avec un Etat exsangue, de l'indépendance de notre diplomatie et de notre défense?

D'un autre côté, la gauche va rencontrer, elle aussi, son heure de vérité, car ses échecs, depuis 1993, ont largement résulté de la superposition d'un logiciel néolibéral au logiciel européen. Elle ne peut accepter la politique d'Angela Merkel, qui conduit à la récession et à la mise en place d'une Europe post démocratique. Sauf à se couper de l'électorat populaire à six mois d'une élection décisive. Réduire la critique de la politique du gouvernement Merkel à un réflexe de germanophobie relève de la manipulation pure et simple. Ce serait vouloir interdire un débat sur le fond, plus nécessaire que jamais.

C'est devenu une évidence: la monnaie unique ne marche pas. Il était absurde de vouloir imposer à dix-sept pays très différents par leurs structures économiques et politiques et par leurs cultures, un mark-bis.

Rédigé par Jean Pierre Chevenement le 5 Décembre 2011 à 09:24 | Permalien | Commentaires (8)

Entretien de Jean-Pierre Chevènement à Atlantico, samedi 3 décembre 2011.


"Le problème principal du PS ? Sa résistance au réel !"
Atlantico: Vous avez exprimé de "très fortes inquiétudes" à propos de l'accord conclu entre le PS et Europe Ecologie-Les Verts (EELV). Quelles sont-elles précisément?
Jean-Pierre Chevènement:
Cet accord met en cause l’avenir de notre pays sur des questions fondamentales : l’avenir du nucléaire qui engage notre indépendance mais aussi l’emploi, notre capacité d’exportation, sans que soit garante, car tout cela est plus idéologique que réfléchi, une préservation de l’environnement. On ne peut aussi que s’inquiéter du projet - nuancé depuis, compte tenu de la levée de boucliers qu’il a suscité - d’abandonner notre siège au Conseil de sécurité de l’ONU qui a permis jusqu’ici de faire entendre une voix traditionnellement indépendante, celle de la France.

Ce projet est d’ailleurs en pleine contradiction avec la volonté, marquée par l’accord, d’avancer vers une politique internationale plus juste, avec par exemple la reconnaissance d’un Etat palestinien. Cet abandon n’aurait pas permis de faire entendre une voix raisonnable sur la guerre en Irak. Quant à l’idée d’exprimer une politique commune à une vingtaine d’Etats qui poursuivent des objectifs divergents et ne parviendraient donc pas à s’entendre, elle ne grandirait pas l’image de l’Europe.

En quoi cet accord met-il en péril la souveraineté française?
Pour les raisons déjà indiquées : notre indépendance énergétique, la voix de la France dans le monde sont des éléments indissociables de l’exercice de notre souveraineté. De même d’ailleurs on ne pourrait ratifier la Charte des langues régionales et minoritaires sans revenir sur la définition même de la République française : ce n’est pas moi qui le dit c’est le Conseil constitutionnel, consulté en 1999. Si l’on veut préserver nos langues régionales qui sont une richesse, cette ratification est inutile ; si l’on veut se marier en breton, divorcer en catalan ou passer des actes de vente en auvergnat, modifions notre Constitution ! Tout cela est régressif, cela rappelle les projets régionalistes qui avaient tant de succès chez ceux qui furent les inspirateurs du Maréchal Pétain.

Rédigé par Chevenement.fr le 3 Décembre 2011 à 12:55 | Permalien | Commentaires (13)

Jean-Pierre Chevènement était l'invité de Christophe Barbier sur i>Télé, vendredi 2 décembre 2011


Verbatim express
  • A propos du discours de Toulon de Nicolas Sarkozy : J'ai été frappé par la juxtaposition de 2 discours : celui de M. Guaino qui fait la musique et, dès qu'on aborde les propositions concrètes, c'est la voix de Mme Merkel
  • On peut penser que le problème de la résorption de la dette est lié à la croissance. Va-t-on accepter les stipulations extrêmement rigides que l'Allemagne veut imposer à partir de la lecture des traités, qui ont été rédigés sous son impulsion mais qui ont conduit à la récession généralisée ?
  • Si on se coule dans le moule allemand, nous allons vers la catastrophe. Il faudrait que la France soit capable de convaincre l'Allemagne que la spéculation n'attend pas : le défaut italien peut survenir dans les mois qui viennent.
  • Il faudrait répondre aux problèmes qui vont se poser réellement et pas par des règles d'intrusion budgétaire
  • Il faut maintenir le principe de responsabilité de chaque pays et de chaque Parlement. En revanche, on peut faire en sorte que certains pays aient à s'expliquer au Conseil européen. Ce serait normal.
  • La règle d'or a été adoptée en Allemagne il y a plusieurs années déjà. Est-ce que c'est cohérent avec une politique d'ensemble ? On ne parle que de politique budgétaire. On ne parle pas de relance salariale, on ne parle pas de plan d'investissement au niveau européen.
1 ... « 114 115 116 117 118 119 120 » ... 269


Derniers tweets

Abonnez-vous à la newsletter








Mots-clés des 30 derniers jours