Depuis quelques semaines, une querelle des anciens et des modernes divise le monde des musées.
Pour ma part, je ne m’indigne pas que nos grands musées veuillent partager avec les publics de Shanghai, Atlanta, Abou Dhabi, Sao Paolo l’accès au patrimoine artistique inaliénable dont ils ont la garde. Ils contribuent ainsi au rayonnement de la culture française dans le monde, et des valeurs dont elle est porteuse. Cette façon de diffuser l’esprit des Lumières, lequel est à l’origine de l’invention des musées, relève d’un bon usage de la mondialisation.
Je ne suis pas choqué non plus qu’en retour nos musées tirent de cette coopération internationale des recettes supplémentaires qui serviront à restaurer leurs collections ou à mieux accueillir leur public. Plutôt que d’entrer dans une vaine polémique, je préfère m’interroger sur la façon dont en France même se partage l’accès au patrimoine, aux valeurs, aux émotions artistiques qui fondent une communauté de culture. Nos musées reçoivent de plus en plus de visiteurs, mais cette hausse, dont on doit se réjouir, est surtout due à la fréquentation touristique internationale, et bien peu à une fréquentation de proximité qui traduirait un élargissement sociologique de leur public.
Rédigé par Jean-Pierre Chevènement le 9 Février 2007 à 12:03
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Dans son blog du 5 février, l’un de ceux qui, dès potron-minet, mettent en scène notre vie politique, M. Jean-Michel Aphatie, déplore que dans mon interview au Parisien de la veille, j’aie qualifié M. Sarkozy de « candidat du grand capital financier mondialisé, derrière la tête duquel on aperçoit toutes les têtes du CAC 40 ».
« Ce top 40, écrit-il, est stigmatisé comme la quintessence du capitalisme que nous n’aimons pas, que nous n’aimerons jamais … Que reproche-t-on exactement [à ces entreprises] ? D’exister tout simplement ? » Non, cher Jean-Michel Aphatie, je ne leur reproche pas d’exister. Je me borne à décrire la logique qui les meut. Nos grandes entreprises dont le capital est de plus en plus détenu par des fonds spéculatifs sont contraints, par la dictature de l’actionnariat qui les régit, à négliger le long terme, les investissements, la recherche, la formation et la promotion de leurs salariés. Les exigences de rentabilité exorbitantes de leurs actionnaires les conduisent à privilégier le court terme, les fusions acquisitions qui font monter la cote, ou à délocaliser leurs activités dans les pays à très bas salaires et sans protection sociale, au détriment de la stabilité et du progrès social dans les pays d’origine. Voyez le dernier fait d’armes de M. Tchuruk, ce prophète de « l’entreprise sans usines » : la fusion d’Alcatel-Lucent, à peine réalisée, débouche sur la suppression de 12.000 à 13.000 emplois ! Ce n’est pas à M. Jean-Michel Aphatie que je ferai le procès d’ignorer ce qu’est la théorie reine de l’acquisition de la valeur pour l’actionnaire et à quoi conduit son application. Tout cela a été fort bien développé par André Orléan et Jean-Luc Gréau, notamment par ce dernier dans un ouvrage profond intitulé L’avenir du capitalisme (chez Gallimard). Jean-Pierre Chevènement est l'invité de l'émission Face aux chrétiens sur Radio Notre-Dame à 17h jeudi 8 février.
Ecouter l'émission ci-dessous (53 minutes).
Jean-Pierre Chevènement est l'invité de Ruth Elkrief et d'Edwige Chevrillon sur BFM Radio et BFM TV jeudi 8 février entre 12h30 et 13h.«Le point presse du 7 février était aujourd’hui animé par Jean-Pierre Chevènement. Soutien précieux de la candidate, l’ancien ministre de l’Intérieur est revenu sur la “politique spectacle” de Nicolas Sarkozy, qu’il présente comme un “brocanteur de l’Histoire”. » (source : Hebdo des socialistes)La Fondation Res Publica, fondation reconnue d'utilité publique dont Jean-Pierre Chevènement est le président, organise ce colloque lundi 12 février à 18h à la Maison de la Chimie. Participants : Gilbert Casasus, professeur associé à l'IEP de Paris, Jean-Luc Gréau, économiste, Edouard Husson, maitre de conférences à Paris 4, Stephan Martens, professeur à Bordeaux 3 - Montaigne, Wolfram Vogel chercheur à l'Institut franco-allemand de Ludwigsburg, Petra Wilke, chercheur à la Friedrich Ebert Stiftung, et Jean-Pierre Chevènement.
Après quinze mois de grande coalition, quels sont les choix de l'Allemagne ?
Comment sont fondées ses performances dans le commerce mondial, et sont elles pérennes ? Ont-elles un coût social ? Comment conçoit-elle les rapports entre l'insertion dans le marché mondial et l'engagement européen ? Voit-elle son destin comme celui d'une Allemagne mondialisée ou d'une Allemagne européenne ? Ces questions décisives pour la relation franco-allemande seront évoquées par des économistes, universitaires et chercheurs lors de ce 23ème colloque de la Fondation Res Publica. Voir la description complète du colloque et les modalités d'inscription sur le site de la Fondation Carnet de Jean-Pierre ChevènementMme Laurence Parisot répondant ce matin à Nicolas Demorand, sur France Inter, a déclaré à propos de ma caractérisation de Nicolas Sarkozy comme «candidat du capital financier mondialisé» : «C’est une phrase qu’on aurait pu entendre il y a vingt ou trente ans».
Madame Parisot est pourtant bien placée comme Président du MEDEF pour mesurer :
1. En premier lieu, le poids croissant du capital étranger dans l’économie française, qu’il s’agisse d’investissements directs ou de prises de participation dans le capital de nos entreprises. Je ne lui apprendrai certes pas que les fonds d’investissement, principalement anglo-saxons, détiennent près de la moitié du capital des quarante plus grandes entreprises françaises, celles du CAC 40. 2. En second lieu, Madame Parisot ne peut ignorer que nos entreprises réalisent une part toujours croissante de leurs chiffres d’affaires, de leurs investissements et de leurs profits à l’étranger, notamment hors d’Europe, que ce soit aux Etats-Unis ou dans les grands pays émergents. En 1987 et à plus forte raison en 1977, les mouvements de capitaux n’étaient pas libres. Le capital de nos grandes entreprises n’était pas détenu, comme il l’est aujourd’hui, par des fonds spéculatifs. Ce n’est pas à Madame Parisot que j’apprendrai ce qu’est la théorie reine du capitalisme financier mondialisé : l’acquisition de la valeur par l’actionnaire. Nos grandes entreprises sont de plus en plus soumises au diktat d’un actionnariat dont la nationalité n’est pas française. Faisant de plus en plus leurs bénéfices à l’étranger, elles se soucient de moins en moins du territoire national et de ceux qui y travaillent, sauf quand il s’agit de trouver un appui en cas de coup dur. ActualitésJean-Pierre Chevènement répond aux questions du Parisien / Aujourd'hui en France dans son édition du dimanche 4 février 2007.
Le Parisien : Dans ses discours, Nicolas Sarkozy se réfère aux grandes figures de la gauche, de Jaurès à Blum...
Jean-Pierre Chevènement. M. Sarkozy est un grand récupérateur. Son discours, parfaitement démagogique, tend à masquer ses contradictions. Il parle de revaloriser le travail, mais il propose de supprimer l'ISF et l'impôt sur les successions. Or, sur ce sujet justement, Léon Blum, en 1946, dans son livre « A l'échelle humaine », avait expliqué qu'on pouvait créer une société socialiste - c'est-à-dire plus juste - en augmentant l'impôt sur les successions des plus fortunés. M. Sarkozy est donc aux antipodes de la pensée de Blum. En réalité, M. Sarkozy tire, tout à fait provisoirement, parti d'une entrée en campagne remarquablement médiatisée. Dès la fin du mois de février, Mme Royal reprendra l'avantage. Certains, jusqu'au PS, évoquent pourtant un puissant « trou d'air » ? Ségolène Royal a eu un excellent mois de décembre. C'est seulement depuis le 15 janvier que M. Sarkozy a marqué un avantage, je le répète, provisoire. Il reste quatre-vingts jours d'ici au 22 avril, date du premier tour. J'ai vu Ségolène Royal mercredi en tête à tête : elle se tient tout à fait ferme et droite dans sa démarche. Elle a conservé tout son sang-froid, sa bonne humeur, son humour. Je lui fais confiance pour s'affirmer dans cette bataille qui est une bataille de mouvement. Pourtant, bien des électeurs de gauche semblent s'interroger... Mme Royal a choisi dans une première phase de privilégier l'écoute à travers des débats participatifs. Le 11 février, elle fera ses premières propositions, et lancera l'offensive, à la fois dans la critique et dans les propositions. Elle s'exprimera au fond, car c'est une femme qui a du fond. La situation me fait penser à ce formidable film, « Alexandre Nevski ». Vous vous souvenez ? On voyait l'armée des chevaliers teutoniques s'avancer sur le lac gelé avec des airs terribles. Je vois le grand maître casqué de cet ordre. Il est aussi terrifiant que M. Sarkozy. Comment ça s'est terminé ? Le poids des chevaliers sur leurs montures lourdement caparaçonnées a fait craquer la glace, et tous ont été emportés. Eh bien, Mme Royal est aujourd'hui dans la situation d'Alexandre Nevski. Elle attend patiemment un adversaire trop sûr de lui. |
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