Entretien de Jean-Pierre Chevènement au journal "Le Télégramme", mercredi 10 décembre 2013. Propos recueillis par Philippe Reinhard.
Le Télégramme : Le rapport Pisa dégrade l'école française. Est-elle aussi nulle que le laisse entendre ce rapport ?
Jean-Pierre Chevènement : Elle n'est pas nulle, mais il est incontestable que son niveau se dégrade. Toutefois, il faut savoir que les qualités propres à l'école française - clarté, capacité d'abstraction - ne sont pas mesurées par le rapport Pisa. Je fais donc quelques réserves sur l'instrument de mesure.Toutes les enquêtes internes du ministère de l'Éducation nationale montrent une dégradation de l'orthographe, de la grammaire, de la syntaxe, des capacités de calcul et de mémorisation. Je pense que l'environnement des enfants est marqué par l'immédiateté. Nous sommes dans la vidéosphère. Les progrès d'internet ont beaucoup d'effets pervers. Des effets pervers qui ne touchent pas que la France... Cela ne concerne pas que la France, mais cela touche davantage un enseignement de type classique et très structuré comme le nôtre.Mais la cause principale est ailleurs. Elle est dans la vogue de ces pédagogies constructivistes qui aboutit à l'affaiblissement de ce qu'on appelle « l'effet maître », le rapport que l'enseignant a avec l'élève. Les maîtres ne sont-ils pas à la hauteur de leur mission ? Un rapport récent de l'inspection générale de l'Éducation nationale dit que « les maîtres ne disposent pas, pour la plupart d'entre eux, des outils conceptuels et didactiques pour mettre en oeuvre les programmes tels qu'ils existent ». C'est un rapport tout à fait décapant. Il est d'ailleurs assez étonnant qu'il ait pu passer à travers le filtre de la hiérarchie.
le 10 Décembre 2013 à 13:04
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Les actes du colloque du 14 octobre 2013 sont disponibles en ligne sur le site de la Fondation Res Publica.
Agenda et médiasEntretien de Jean-Pierre Chevènement à l'Hémicyle, le mardi 3 décembre 2013. Propos recueillis par Thomas Renou.
L'Hémicyle : Déniez-vous le fait que le « besoin » d’Europe est une réaction à la Première Guerre mondiale ?
Jean-Pierre Chevènement : Les immenses souffrances endurées pendant cette guerre sont à l’origine d’un « besoin d’Europe », qu’avait exprimé Romain Rolland dès 1914. Sa revue, fondée en 1920, s’appelle d’ailleurs Europe. Il résulte de l’incompréhension des peuples quant aux tenants et aux aboutissants de cette guerre un besoin de dépassement, mais certainement pas parce ce conflit aurait été décidé par les nations – aucune nation ne voulait réellement la guerre. En réalité, la Première Guerre mondiale fut une guerre préventive, bêtement déclenchée par les cercles des classes dirigeantes de l’Allemagne de Guillaume II – je dis « bêtement » parce que l’Allemagne n’avait aucun intérêt à la déclencher, c’était une puissance industrielle alors extraordinairement dynamique. Cette guerre dont les causes profondes sont à rechercher dans la modification de l’équilibre des puissances induit par la première mondialisation, celle d’avant 1914, a été déclenchée par un petit groupe de décideurs, pas par les peuples, qui ne doivent pas être mis en accusation. Ce « besoin d’Europe » a été fourvoyé dans la construction d’une Europe économiciste, technocratique et inféodée. Économiciste, parce que l’on a prétendu construire l’Europe en choisissant pour base le marché ; technocratique, parce que l’on a d’emblée confié le monopole de la proposition à une Haute Autorité devenue la Commission européenne ; inféodée, parce que les deux guerres ont fait passer l’hégémonie d’un côté à l’autre de l’océan Atlantique et que l’Europe s’est faite sous tutelle américaine, à l’ombre de la guerre froide. Cette transition s’est faite lentement : en 1919-1920, les États-Unis refusent de ratifier le traité de Versailles, et ne donnent pas à la France la garantie que Wilson avait promise à Clemenceau, ils se retirent dans leur isolationnisme prudent. Les conditions de la Seconde Guerre mondiale sont créées par le fait que l’équilibre de Versailles dépendait de cette garantie américaine, et cette garantie va manquer. Encore aujourd’hui, on accrédite la thèse de Hitler, selon laquelle cette Seconde Guerre mondiale est une conséquence du traité de Versailles alors que les élites allemandes ont, en fait, tout simplement refusé la défaite de 1918. Agenda et médiasJean-Pierre Chevènement était l'invité de "Zemmour et Naulleau" sur Paris Première vendredi 29 novembre 2013. Il répondait aux questions d'Eric Zemmour et Eric Naulleau, puis débattait avec Marc Le Fur.
L'intervention vidéo de Jean-Pierre Chevènement débute à partir de 7min45.
Verbatim express :
Jean-Pierre Chevènement était l'invité de "Entre les lignes" sur LCP samedi 30 novembre 2013. Il répondait aux questions de Frédéric Haziza et débattait avec Alain Finkielkraut.
Verbatim express :
A la première page du Point, la dénonciation des "néocons à la française".
Ceux-ci existent bien, mais pas là où Le Point croit les apercevoir… J'enlèverai le préfixe "néo" pour qualifier ceux qui mènent cette campagne insidieuse et dérisoire. Ceux qui ont fait prospérer Le Pen sont ceux que je combats depuis 30 ans. Mais c'est le voleur qui crie au voleur! Bel exemple de manipulation.
Mots-clés :
néo-conservateur
Jean-Pierre Chevènement était l'invité de Sud Radio dimanche 24 novembre 2013. Il répondait aux questions de Louis Morin.
Verbatim express :
Sur le sens des commémorations de la Première Guerre mondiale
Agenda et médiasEntretien de Jean-Pierre Chevènement avec Pascal Boniface, directeur de l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS), le mardi 26 novembre 2013.
Pascal Boniface : Vous préconisez le passage de la monnaie unique à une monnaie commune. Comment est-ce possible ? Quels sont les avantages ?
Jean-Pierre Chevènement : D’abord ce passage à la monnaie commune doit être préparé par tous les Etats européens concernés et bien entendu par la France et l’Allemagne qui ont porté la monnaie unique sur les fonts baptismaux. Celle-ci à long terme n’est pas viable. Elle impliquerait soit des transferts internes massifs inacceptables par les pays de l’Europe du Nord, soit une paupérisation durable des pays de l’Europe du Sud également inacceptable pour eux. L’Allemagne ne soutiendra pas à perte de vue une monnaie unique frappée d’un vice congénital. Les pays qui la partagent sont trop hétérogènes. On ne peut pas fabriquer une nation à partir d’une monnaie mais seulement avec l’aval des citoyens. L’expérience montre que cela ne peut se faire que dans le temps long de l’Histoire. L’objectif serait de faire de l’euro une monnaie commune, panier de devises nationales reconstituées sous un toit européen commun, afin de corriger les écarts de compétitivité entre les différents pays en laissant fluctuer l’euro mark, l’euro franc, l’euro lire dans des marges qui pourraient être rapidement stabilisées. Les pays européens du Sud pourraient renouer avec la croissance sans obérer les finances publiques des pays du Nord. La renationalisation des dettes, largement entamée depuis 2010, rend cette opération plus facile. Bien entendu un contrôle des capitaux provisoire devrait être instauré avant le lancement d’une telle opération dont je répète qu’elle ne peut être que concertée, et d’abord entre la France et l’Allemagne. Ce compromis « gagnant-gagnant » permettra seul de sauver le projet européen en intégrant à la monnaie commune la livre et un jour le rouble. |
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