Jean-Pierre Chevènement était l'invité de Public Sénat, mercredi 30 avril 2014. Il répondait aux questions de Delphine Girard.


Verbatim express :

Alstom
  • Je constate qu'en matière d'industrie, nous allons de démantèlements en démantèlements.
  • On nous dit qu'Alstom est aujourd'hui trop petit dans la mondialisation. Mais n'oublions pas qu'Alstom faisait partie d'un grand groupe, la Compagnie Générale d'Electricité, qui comportait également Alcatel, dans les télécommunications, Nexans, les Chantiers de l'Atlantique, et d'autres filiales encore.
  • Si on sépare Alstom de sa branche énergie, il ne restera que la banche transports, dont le chiffre d'affaires est de 6 milliards d'euros. On dire alors que c'est encore trop petit. La France serait devenue trop petite, on peut brader tout cela, cela n'a plus aucune espèce d'importance.
  • Je crois qu'il faut absolument combattre ce point de vue, car il est important que la France garde des centres de décision.
  • Je crains beaucoup d'autres interventions du même genre par la suite.
  • Le cauchemar de 2003, lorsque l'État s'était porté au secours d'Alstom, c'est le fruit des erreurs de gestion des dirigeants de l'époque, qui ont racheté des turbines à gaz fabriquées en Suisse qui ne marchent pas, qui ont mis l'entreprise quasiment en faillite.
  • Si l'on regarde par rapport à Siemens ou General Electrics, la France avait un conglomérat tout à fait aussi important. Mais d'opérations en opérations, avec la théorie du one player comme ils disent, c'est à dire « un métier, une société », on a des sociétés trop petites. Ce sont les mêmes qui nous ont expliqué qu'il fallait des entreprises sans usines. Ces théoriciens du libéralisme nous font beaucoup de mal.

Jean-Pierre Chevènement était l'invité de BFMTV, mercredi 30 avril 2014. Il répondait aux questions de Olivier Truchot.


Verbatim express :

  • Je ne fais pas confiance au conseil d'administration d'Alstom, qui nous dit aujourd'hui que l'offre de General Electrics (GE) est la meilleure, parce que, si déjà aujourd'hui co-existent à Belfort Alstom et la filiale turbines à gaz de GE, c'est parce que Alstom a vendu sa filiale turbines à gaz à GE pour racheter celle d'un groupe suisse. Cette opération a conduit au fiasco.
  • Je souhaite que le capital d'Alstom reste majoritairement français, car qui tient le capital tient la décision.
  • On peut faire monter au capital d'Alstom des entreprises ou l'Etat à une position majoritaire, ou minoritaire, Safran par exemple. Safran produit le moteur d'avion CFM56, une belle réussite, une excellente coopération, entre Safran et GE. Tachons de trouver un équilibre ! Je préférerai que ce soit 49% du capital pour GE et 51% pour la partie française.

Entretien de Jean-Pierre Chevènement dans Le Point, jeudi 1er mai 2014. Propos recueillis par Saïd Mahrane.


"Non au bras de fer avec l'Allemagne !"
Le Point : La Grande Guerre trouve, selon vous, ses origines dans la mondialisation...
Jean-Pierre Chevènement : Pour comprendre la guerre de 1914, il faut se référer à la théorie de l'hégémon. Dans les deux mondialisations que je compare dans mon livre (1), la britannique, avant 1914, et l'américaine, après 1945, il y a une puissance hégémonique qui fixe les règles du jeu et les fait respecter. C'est l'Empire britannique, au XIXe siècle, qui a la maîtrise des mers et, après la Seconde Guerre mondiale, ce sont les Etats-Unis, avec leur suprématie économique, leur puissance militaire, leurs réseaux d'alliances... La mondialisation induit toujours une modification de la hiérarchie des puissances. Au XIXe siècle, après 1871, on voit surgir une puissance nouvelle, l'empire d'Allemagne, qui connaît un essor industriel et commercial phénoménal. En trente ans, l'Allemagne triple sa production, l'Angleterre la double et la France l'augmente d'un tiers. L'Allemagne, qui se vit à tort ou à raison comme encerclée par la France et la Russie, déclenche, en 1914, une guerre préventive. Celle-ci, à travers le plan Schlieffen, vise à mettre la France hors de combat en six semaines. La menace d'une hégémonie continentale de l'Allemagne, aussi inacceptable pour la Grande-Bretagne que celle de Napoléon un siècle plus tôt, la conduit à entrer en guerre à son tour avec son empire, entraînant à terme l'intervention des Etats-Unis. Ce mécanisme de l'hégémon est absolument central. Il permet de comprendre que la guerre de 1914 n'est pas d'abord une guerre franco-allemande mais un conflit d'hégémonie entre l'Empire britannique et le IIe Reich allemand qui sera tranché après deux guerres mondiales au bénéfice des Etats-Unis. Cette grille de lecture est également éclairante pour comprendre ce qui se joue aujourd'hui à travers la seconde mondialisation.

Qui incarne l'hégémon aujourd'hui ?
La domination mondiale, au XXIe siècle, se jouera entre les Etats-Unis et la Chine. On voit d'ailleurs bien la stratégie d'endiguement (containment) mise en place par les Etats-Unis avec un pivotement de la flotte et des moyens militaires américains de l'Atlantique vers le Pacifique et les projets de traités de libre-échange transpacifique et transatlantique, dont le but est d'isoler la Chine.

Actualités



Intervention de Jean-Pierre Chevènement au Sénat dans le cadre du débat sur le programme de stabilité, mardi 29 avril 2014.


Osez la France
Le Premier ministre a demandé au Parlement d’approuver le programme de réforme des trois prochaines années.

Ce programme comporte en fait deux volets distincts.

Le premier est constitué par le programme de stabilité 2014-2017. Celui-ci procède directement du traité de stabilité, de coopération, et de gouvernance dit TSCG négocié en mars 2012 par M Sarkozy.

Le deuxième volet du programme de réforme reprend les engagements pris le 14 janvier 2014 par le Président de la République qui visent à alléger les charges des entreprises de plus de 30 milliards d’euros. C’est le pacte dit de responsabilité.

Une certaine confusion a résulté de la présentation simultanée dans les médias de ces deux documents, alors que le gouvernement n’a semble-t-il engagé sa responsabilité que sur le premier, c'est-à-dire le programme de stabilité.

C’est la raison pour laquelle les députés du Mouvement Républicain et Citoyen, qui avaient, au nom de la souveraineté budgétaire du Parlement, voté contre le traité budgétaire européen, dit TSCG, en septembre 2012, n’ont pas cru pouvoir faire autrement que voter contre le programme de stabilité et l’engagement pris par le gouvernement vis-à-vis de la Commission européenne de réduire à 3% le déficit budgétaire dès 2015. Les députés du MRC entendent afficher ainsi la priorité qu’ils donnent à la croissance sur la réduction optique du déficit. Ils n’entendent pas pour autant exprimer une défiance vis-à-vis du gouvernement auquel ils ont d’ailleurs accordé leur confiance, les yeux ouverts, le 12 avril dernier.

Entretien de Jean-Pierre Chevènement au Figaro-vox, le lundi 28 avril 2014. Propos recueillis par Alexandre Devecchio.


"L'État doit monter au capital d'Alstom"
Le Figaro-vox : Vous avez demandé au Premier ministre d'empêcher un «transfert de propriété» entre Alstom et General Electric. Quelles seraient les conséquences d'un tel transfert ?
Jean-Pierre Chevènement : Avant tout, l'Etat ne peut accepter de se laisser spolier par la manœuvre éclaire et inconsciente de l'actuel PDG, Monsieur Kron qui lui doit tout. En 2004 Alstom ( qui avait le même PDG qu'aujourd'hui) avait été sauvé à grands frais du dépôt de bilan par un plan de refinancement mis en place avec l'aide l'Etat. Et, du nucléaire au TGV, Alstom est le fruit de plus d'un siècle de commandes publiques.

Il est évident aujourd'hui que la France ne peut abandonner le secteur de l'énergie de production. La reprise de la branche énergie d'Alstom porterait un coup fatal à l'indépendance de notre filière électronucléaire. Elle signifierait l'abandon par la France d'un des derniers pans de son industrie d'équipement: turbines à vapeur, alternateurs de moyenne et de grande puissance ... Ce serait un curieux signe à l'heure où le gouvernement parle de transition énergétique et de lutte contre la désindustrialisation.

General Electric a déjà repris en 1999 la branche «turbines à gaz» quand Alstom a choisi de reprendre les turbines à gaz fabriquées en Suisse. Ce fut une énorme erreur à laquelle Alstom a failli ne pas survivre. Avec le recul de quinze ans, nous constatons que cette opération autorisée par le Gouvernement de l'époque a abouti à deux résultats: Alstom a vu sa part du marché dans les turbines à gaz, qu'elle fabrique désormais en Suisse, se réduire considérablement. Et General Electric, s'il a dans un premier temps développé ses fabrications à Belfort, relocalise aujourd'hui une part de ses fabrications aux États-Unis, conformément à la volonté du Président Obama.

La fuite des centres de décision est dramatique et aura à terme des conséquences sur l'emploi et sur la capacité de la France à peser dans la bataille économique mondiale.

Jean-Pierre Chevènement était l'invité de RMC lundi 28 avril 2014. Il répondait aux questions de Jean-Jacques Bourdin.


Verbatim express :

  • Alstom n'a pas le couteau sous la gorge. Il faut savoir que le groupe a 50 milliards de commandes, 3 ans de plan de charge, une marge bénéficiaire, une rentabilité de 4%. On nous présente le problème comme : est-ce Siemens ? Est-ce General Electric ? Non, le problème ne se pose pas du tout comme ça !
  • Le contrôle du capital doit rester français. Pour moi, il est hors de question que le contrôle du capital passe sous pavillon étranger, qu'il soit américain ou allemand.
  • Je veux dire à Arnaud Montebourg que l'offre Siemens me paraît très déséquilibrée.
  • Le secteur de l'énergie c'est 70% du chiffre d'affaires d'Alstom, et c'est l'avenir, car on aura toujours besoin de l'énergie, et l'énergie est au cœur de l'industrie. Si la France abandonne l'énergie, c'est un pan entier de nos industries d'équipements, c'est tout l'électro-nucléaire qui disparaît.
  • C'est une bien curieuse façon d'engager la « transition énergétique » que de commencer par brader ce qui est notre principal actif !

AFP, samedi 26 avril 2014.


Réaction de Chevènement à une possible reprise d'Alstom par GE
Jean-Pierre Chevènement, sénateur du territoire de Belfort, président d'honneur du MRC et ancien ministre, notamment de l'Industrie : "Il est inacceptable que le rachat du secteur énergie d'Alstom par General Electric mette l'Etat devant le fait accompli (...) Je demande que le Conseil d'administration d'Alstom, appelé à entériner un tel accord, soit repoussé à une date permettant aux services du ministre de l'Industrie de faire leur travail. Je suggère que l'Etat monte en capital s'il le faut pour remplacer les actionnaires défaillants. Cet argent sera mieux utilisé de cette façon que par la distribution indiscriminée de 50 milliards d'euros à toutes les entreprises y compris les grandes banques ou les grandes sociétés de distribution qui ne rentrent pas dans la compétition industrielle".

le 26 Avril 2014 à 12:47 | Permalien | Commentaires (6)

Dépêche AFP, 25 avril 2014.


Alstom: Chevènement (MRC) écrit à Valls pour empêcher un "transfert de propriété" à General electric
Le sénateur MRC du Territoire-de-Belfort, Jean-Pierre Chevènement, a demandé vendredi au Premier ministre de "faire valoir aux actionnaires et aux dirigeants des groupes concernés" qu'un "transfert de propriété est hors de question" entre Alstom et General electric.

Des rumeurs de rachat global du groupe français par le géant américain General electric ont semé le trouble jeudi, le gouvernement temporisant vendredi en annonçant qu'il travaillait "à d'autres solutions" et affichant sa "vigilance patriotique".

"Je vous demande instamment, Monsieur le Premier ministre, de bien vouloir faire valoir aux actionnaires et aux dirigeants des groupes concernés que ce transfert de propriété est hors de question. A travers les marchés publics, l'État a les moyens de se faire entendre", écrit le président d'honneur du Mouvement Citoyen et Républicain (MRC).

le 26 Avril 2014 à 09:09 | Permalien | Commentaires (6)
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