Les actes du colloque du 18 avril 2016 sont disponibles en ligne sur le site de la Fondation Res Publica.
le 11 Juillet 2016 à 18:22
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Carnet de Jean-Pierre Chevènement
J’apprends avec grande peine le décès de Michel Rocard. Il reste pour moi le jeune secrétaire général du PSU que j’ai connu au milieu des années 1960, quand j’ai crée moi-même le CERES, avant tout un militant sincère qui croyait à la force des idées et à bien des égards, l’espoir de sa génération.
Il est devenu ensuite un acteur incontournable du Parti Socialiste. Il a campé, en 1977, au congrès de Nantes, une opposition entre deux cultures du socialisme, l’une jacobine, l’autre autogestionnaire et décentralisatrice. Cette opposition qui m’a toujours parue un peu factice a gouverné nos relations sans nuire à leur cordialité .Sa culture était plus mendésiste que mitterrandienne. Les Français ont aimé sa sincérité. Ils ont apprécié la compétence du premier ministre. Michel Rocard n’a pas été Président de la République mais il restera comme une figure idéologique majeure du socialisme français dans la seconde moitié du XXème siècle. J’exprime à sa famille et à ses proches toute ma sympathie et ma tristesse
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michel rocard
Entretien de Jean-Pierre Chevènement avec Le Figaro Magazine, propos recueillis par Alexandre Devecchio et Eléonore de Vulpillières, vendredi 1er juillet 2016
Nous avions rendez-vous avec l’ancien ministre de l’Intérieur pour évoquer sa vision de l’Histoire de France. Le Brexit nous a fait dévier de notre chemin initial. Mais pour cet homme d’Etat, qui raisonne encore à l’échelle du temps long, tout se tient : le passé éclaire le présent.
L’apocalypse n’a pas eu lieu. Le Brexit, loin d’être le cataclysme annoncé est, pour Jean-Pierre Chevènement une chance de sursaut. Une nouvelle page de l’Histoire qui s’ouvre. L’Histoire, à l’entendre, c’est ce qui manque aux Français pour se réconcilier avec eux-mêmes. Pour mieux la défendre, l’ancien ministre de l’Education nationale a rédigé la préface d’un manuel scolaire à paraître *, qui fait la part belle à la chronologie et aux grands hommes. Jean-Pierre Chevènement y rappelle son attachement au « récit national » et signifie son refus de toute repentance. « L’incompréhension du présent naît fatalement de l’ignorance du passé. Mais il n’est peut-être pas moins vain de s’épuiser à comprendre le passé, si l’on ne sait rien du présent », écrit Marc Bloch dans Apologie pour l’histoire ou Métier d’historien. En disciple de l’auteur de L’Etrange Défaite, Jean-Pierre Chevènement scrute les siècles précédents pour mieux analyser les maux de notre époque. Il voit dans « la déconsidération de soi à laquelle nous nous sommes laissé réduire depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale », la cause profonde de la crise existentielle de l’Europe contemporaine. Le Figaro Magazine: Avec le Brexit, une nouvelle page de l’Histoire de l’Europe s’ouvre-t-elle ? Jean-Pierre Chevènement: Certainement. Il faut repenser l’Europe à partir de l’exigence de la démocratie. Les Britanniques n’avaient qu’un pied dans l’Europe mais ils ont voulu conserver leur capacité à décider par eux-mêmes de ce qui les regarde. Ils sont attachés à leur Parlement. Ils ne veulent pas être régis de manière opaque par des anonymes qu’ils n’ont pas désignés. La démocratie vit dans les nations. Elle suppose un sentiment d’appartenance. La seule instance démocratique légitime dans l’Europe actuelle c’est le Conseil des chefs d’Etats et de gouvernement. Mais elle n’est pas outillée pour décider. Quant au Parlement européen, il gagnerait à procéder des Parlements nationaux. Il n’y a pas de « démos » européen. Personne ne connaît son « député européen ». Il faut faire un retour et un détour par les nations pour refonder démocratiquement l’Europe. En second lieu, l’Europe telle qu’elle a été conçue par Jean Monnet et Jacques Delors (marché unique, monnaie unique) souffre de son économicisme : elle n’a jamais été une entité stratégique. Elle n’offre aucune protection face aux menaces et aux défis qui nous attendent. Je suggère une grande conférence pour revoir les traités, à la lumière de ces deux observations. Si ce n’est pas possible, il faudra saisir les Français par référendum.
Tribune de Jean-Pierre Chevènement, Marianne, 1er juillet 2016.
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