Communiqué de Jean-Pierre Chevènement


Ce matin, la direction du groupe américain General Electric a annoncé la suppression de 1 050 emplois sur Belfort, 800 dans les turbines à gaz, 250 dans le centre de services installé il y a deux ans, conformément aux engagements pris, et désormais voué à la fermeture.

Le coup est terrible pour Belfort, qui voit de surcroît l’exécution des nouvelles commandes transférée aux Etats-Unis.
Dans ce sinistre industriel, la responsabilité de l’Etat est doublement engagée. D’abord pour avoir accepté, dans la plus grande opacité, un accord déséquilibré avec General Electric en 2014. Ensuite pour n’être pas monté au capital pour y remplacer Bouygues en 2017 et ainsi donner vie aux trois « co-entreprises » prévues entre Alstom et General Electric. « Tout pour les actionnaires, haro sur les salariés ! », ainsi se résume ce bradage à 12,5 milliards d’euros.

Belfort est un grand site industriel français depuis 1878. Je n’imagine pas que le Président de la République, que j’ai accompagné à Belfort en 2015 quand il était ministre de l’Economie et qui connait parfaitement bien le dossier Alstom, ne prenne pas aujourd’hui des initiatives d’abord pour rappeler à General Electric que le slogan « America first ! » ne saurait s’appliquer en violation des engagements pris, et qu’ensuite il ne donne pas une vigoureuse impulsion aux projets de diversification industrielle qui existent en matière aéronautique comme dans la maintenance nucléaire.

Belfort est une ville résistante. Elle espère que son gouvernement ne la livrera pas une seconde fois.

Rédigé par Chevenement.fr le 28 Mai 2019 à 15:08 | Permalien | Commentaires (8)

Entretien de Jean-Pierre Chevènement à L'Express, propos recueillis par Alexis Lacroix, dimanche 28 avril 2019.


  • L'Express : Etre né en 1939, aux marches de l’Est de la France, a-t-il exercé une influence déterminante sur le façonnement de votre pensée ?

    Jean-Pierre Chevènement : Dans nos régions, on choisissait comme première langue l’allemand, langue du voisin. La culture prestigieuse de l’Allemagne avait pénétré la nôtre, car un Français de l’Est, à cette époque, connaissait mieux la littérature allemande, de Goethe à Ernst Jünger, que la littérature américaine. Nous étions au lendemain de la guerre et les souvenirs de l’occupation allemande étaient encore très vifs. Mon père prisonnier, ma mère m’avait élevé, seule, tout au long de la guerre.

  • La vulnérabilité de la France, cela a donc été une des données immédiates de la conscience de Jean-Pierre Chevènement ?

    Certainement. Les soldats allemands occupaient l’étage de l’école et nous avaient confinés, ma mère institutrice et moi-même, au rez-de-chaussée. Les trois maisons de ma grand-mère avaient été incendiées le 18 juin 1940. Et ma mère soupçonnée de faire des tracts avec la postière contre les Allemands et leurs suppôts de Vichy, était convoquée par la Gestapo à Montbéliard. Bref, on ne se sentait plus chez soi. Et l’immensité des tâches roses, matérialisant sur les cartes de Vidal et Lablache, l’Empire français, nous faisaient ressentir plus encore la profondeur de l’abîme où le pays avait sombré.

Rédigé par Chevenement.fr le 29 Avril 2019 à 11:19 | Permalien | Commentaires (3)

Jean-Pierre Chevènement était L'invité des Matins animé par Guillaume Erner sur France Culture, le mercredi 24 avril 2019. Thème de l'émission : 50 ans après la démission du général de Gaulle : quel est son héritage ?


Verbatim

  • Guillaume Erner : Quel est votre sentiment sur l'évolution de la démocratie ? Beaucoup de chefs d'Etat sont considérés comme « bonapartistes » y compris de Gaulle, et on vous a parfois classé dans cette catégorie.

    Jean-Pierre Chevènement : De Gaulle nous a légué une conception sacerdotale de l'Etat, du service de la chose publique. Aujourd'hui, il y a une campagne très idéologique visant à discréditer la démocratie citoyenne : celle qui part du peuple souverain, dont chaque citoyen est une composante, et qui fait du peuple la source du droit.
    J'ai entendu Martin Wolf, en tout cas les citations qu'on en a faites : mélanger Erdogan, Poutine, Bolsonaro, Xi Jinping, Trump, Orban est un subterfuge un peu grossier. Il faut garder de la mesure et analyser la spécificité de chaque régime. Par exemple, Vladimir Poutine s'est plié à la Constitution russe de 1993 en ne sollicitant pas un troisième mandat ; il a laissé la place à Medvedev. On peut dire que tout cela était arrangé, mais qu'est-ce qui n'est pas arrangé dans la vie politique ?

  • A l'époque où de Gaulle se défendait d'être un dictateur alors que la Gauche, Mitterrand en tête, l'accusait de coup d'état permanent, qu'en pensiez-vous ?

    Je suis né plutôt à gauche dans une famille qui votait socialiste. J'ai été très impressionné par la figure de Pierre Mendès France dès l'âge de 15 ans et j'ai même failli adhérer au Parti radical. Mais j'ai vu en 1958 que de Gaulle avait la capacité d'éviter à la France une guerre civile, de dénouer et de trancher le nœud gordien qu'était la guerre d'Algérie. J'avais lu ses Mémoires de guerre et beaucoup de ses écrits. Au fond de moi-même, je suis devenu gaulliste dans les dernières années de la guerre d'Algérie.

Rédigé par Chevenement.fr le 26 Avril 2019 à 14:54 | Permalien | Commentaires (3)

Jean-Pierre Chevènement était l'invité de Sonia Mabrouk, dans l'émission Europe Soir sur Europe 1, le lundi 23 avril


Verbatim

  • Sonia Mabrouk : Les fêtes de Pâques sont endeuillées par les attentats au Sri Lanka contre des chrétiens. La piste islamiste est privilégiée. Assiste-t-on à une résurgence d'attaques ciblant cette communauté religieuse ?

    Jean-Pierre Chevènement : C'est certain. Il y a plus d'une cinquantaine de pays où il y a des persécutions dirigées contre les chrétiens. Jacques Julliard distingue deux formes de persécution : la persécution "marteau", c'est-à-dire l'attentat, l'exécution, et la persécution "étau" : la discrimination, le refus de citoyenneté. Cette question devrait être mise sur la table. On ne peut pas faire de différence entre des persécutions qui visent des délits d'opinion, d'orientation sexuelle ou d'origine ethnique, et des persécutions antireligieuses. J'ajoute que si ces persécutions ont souvent lieu en pays musulman, les musulmans ont payé le plus lourd tribut aux persécutions islamistes en Irak, en Syrie, au Pakistan et, plus près de nous, en Algérie pendant la décennie noire des années 1990.

  • Après l'incendie de Notre-Dame, vous avez appelé à un sursaut, affirmant qu'il fallait "rebâtir le patrimoine français, l'histoire de France, notre récit national".

    Je ne me suis pas exprimé d'un point de vue politique. Sous le coup de l'émotion, j'ai ressenti comme beaucoup de Français que Notre-Dame faisait partie de notre Sacré national, que c'était un patrimoine immatériel. Quand j'ai entendu le Président de la République proposer, à juste titre, qu'on se consacre à sa reconstruction, je me suis dit qu'il ne s'agissait pas seulement de la cathédrale matérielle mais immatérielle : l'édifice de la République, de notre histoire, la manière dont les Français se sentent entre eux. Quand on rentre de l'étranger, on est frappé de la violence des polémiques, de la bassesse des insultes : on ne peut pas vivre dans une atmosphère de guerre civile froide.



Rédigé par Chevenement.fr le 23 Avril 2019 à 12:34 | Permalien | Commentaires (4)

Communiqué de Jean-Pierre Chevènement, ancien ministre


Qui, parmi ceux que hante, depuis plus de cent ans, la fin de la France, n'a pas éprouvé, en voyant brûler Notre-Dame, cœur de notre Sacré, la réalisation symbolique de son pressentiment ?

Et aussitôt s'est levée la grande ombre de celui qui, même au fond de l'abîme, n'a jamais désespéré, je veux dire, bien sûr, Charles de Gaulle. Est-ce lui qui a inspiré Emmanuel Macron, quand celui-ci a déclaré : "Nous rebâtirons Notre-Dame !".

Mais ce n'est pas seulement Notre-Dame qu'il faut rebâtir, c'est le patriotisme français, c'est l'Histoire de France, notre récit national, notre République.

Au moment où le Président de la République allait apporter sa réponse au grand débat qu'il avait lancé il y a quatre mois pour reconstruire notre démocratie, Notre-Dame brûlant rappelle à tous l'ampleur de la tâche.

Comment cette reconstruction de la démocratie et du patriotisme français serait-elle possible dans une atmosphère de guerre civile froide ?

A cet égard, c'est Jean-Luc Mélenchon qui a trouvé les mots les plus justes pour dire que ce qui nous unit - la France, sa civilisation, son Histoire - est plus fort que ce qui, temporairement, nous divise. Ainsi Notre-Dame, du fond des siècles, nous appelle-t-elle, ensemble, à continuer la France.

Rédigé par Chevenement.fr le 16 Avril 2019 à 11:12 | Permalien | Commentaires (5)

Les actes du colloque du 29 janvier 2019 sont disponibles en ligne sur le site de la Fondation Res Publica.


Actes du colloque de la Fondation Res Publica : "Où vont les Etats-Unis ?"
  • Introduction, par Jean-Pierre Chevènement, président de la Fondation Res Publica
  • Analyse de la situation politique, par André Kaspi, historien, spécialiste des Etats-Unis, auteur, entre autres, de Les Américains (2 tomes, rééd. 2014, Points) et Les Présidents américains, en collaboration avec Hélène Harter (Tallandier, 2012)

Rédigé par Chevenement.fr le 8 Avril 2019 à 14:21 | Permalien | Commentaires (2)

Une tribune de Jean-Pierre Chevènement, paru dans Les Cahiers de l'Orient, n°133, hiver 2019


Y a-t-il une question laïque en France depuis le début des années 1980 ?
Il a fallu plus d’un siècle entre la proclamation des libertés d’opinions, « même religieuses », par la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (1789) et le vote de la loi sur « la Séparation de l’Église et de l’État » (1905). C’est le temps qu’il a fallu à la République pour fixer sa doctrine en matière de religion. Rien d’évident au départ dans un pays où le catholicisme constitue la religion très largement majoritaire des Français.

Au début, il y eut la tentation de s’assurer la fidélité du clergé aux institutions que fonde désormais non plus le droit divin mais la souveraineté populaire. Ce fut en 1790 la « Constitution civile du clergé » qui déboucha sur l’opposition entre les prêtres assermentés (ou « jureurs ») et les prêtres réfractaires, origine profonde des guerres de Vendée. Puis se fit jour, avec le « Culte de l’Être suprême », la tentation rousseauiste, c’est-à-dire déiste, de donner une religion à la République pour l’adosser à l’idée d’un « sacré ». Cette idée, si contraire à l’esprit voltairien ou à la philosophie des Encyclopédistes qui imprégnaient la majorité des membres de la Convention Nationale, perdit Robespierre. L’idée de laïcité, pensée par Condorcet, n’était pas mûre. Les tentatives de déchristianisation heurtaient le sentiment profond du pays.

Esprit pratique, Bonaparte reconnut le catholicisme non comme religion de l’État, mais comme la religion de la majorité des Français. Poussant à son terme la logique du gallicanisme, il imposa au Pape le Concordat de 1801, tout en préservant la liberté des autres cultes, quitte à les organiser, ce dont ceux-ci s’accommodèrent fort bien, tout comme d’ailleurs le catholicisme le fit du Concordat. Ce compromis réaliste a duré plus d’un siècle. La Seconde République a ignoré la question de la laïcité. La troisième ne s’y est référée qu’avec d’infinies précautions.

Mots-clés : france laïcité

Rédigé par Chevenement.fr le 8 Avril 2019 à 12:04 | Permalien | Commentaires (5)

Les actes du colloque du 5 décembre 2018 sont disponibles en ligne sur le site de la Fondation Res Publica.


Actes du colloque de la Fondation Res Publica : "Situation de l'Italie, réalité et perspectives"
  • La crise démographique et la question migratoire, par Gérard-François Dumont, professeur à l’université Paris-Sorbonne, président de la revue Population & Avenir, co-auteur avec Pierre Verluise de Géopolitique de l’Europe (Armand Colin, 2009)
Mots-clés : europe france italie

Rédigé par Chevenement.fr le 3 Avril 2019 à 13:58 | Permalien | Commentaires (3)
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