Verbatim express :
- Sur l'annonce de la décapitation et crucifixion d'un jeune homme de 21 ans par l'Arabie Saoudite pour avoir manifesté contre le roi : Je pense que l'indignation de la France devrait s'exprimer d'une manière plus forte. Il faut qu'elle soit efficace. Il y a évidemment un certain malaise que je ressens à avoir comme allié privilégié dans la région l'Arabie Saoudite, qui en sera à sa 133ème décapitation depuis le début de l'année, et qui joue un rôle dans le monde entier pour propager une version ultra-rigoriste de l'islam, qui est le terreau d'un certain terrorisme. Donc il y a un peu de cohérence à mettre dans notre politique.
- Il n'y a pas de politique qui se fasse en-dehors des réalités. L'Arabie Saoudite est une puissance considérable, parce qu'elle détient des réserves pétrolières et gazières telles, surtout pétrolières, qu'en réalité elle fait les prix à l'échelle mondiale. C'est une puissance, c'est une réalité : il faut en tenir compte.
- Je pense que nous avons une longue tradition de politique arabe, mais qui était plutôt tournée vers les pays progressistes. Il faut que nous ayons un dialogue plus resserré avec les Saoudiens, dans leur intérêt même, et que nous arrivions à résoudre les conflits de la région.
- C'est avec l'accord de la Russie que les Mistral sont vendus à l'Egypte, car nous avons intérêt à renforcer l'Egypte. C'est un sujet sur lequel nous pouvons nous mettre d'accord avec l'Arabie Saoudite.
- Je suis l'ami du monde arabo-musulman, qui est notre voisin, avec qui nous devons travailler dans un esprit d'égalité, dans un monde qui n'est plus le monde colonial. C'est fini cela. Il faut par conséquent avoir une politique moderne.
- L'Iran est dans une position prééminente maintenant dans cette région, du fait de sa civilisation, de sa démographie, mais du fait aussi de la politique américaine : deux guerres, la destruction de l’État irakien, qui était le verrou du monde arabe, un Etat qui n'en est plus un, plus de politique, plus d'administration, aux mains d'un gouvernement chiite qui a montré beaucoup de sectarisme vis à vis des sunnites irakiens, qui les a offert, en quelque sorte, a Al Qaeda puis à Daesh, donc je pense qu'il faut retourner cette situation.
- Il n'y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités, disait le général de Gaulle. Ce sont les Américains qui ont mis l'Iran en position prééminente, ce n'est pas moi. Je rappelle que j'étais pour la paix, pour une solution diplomatique des problèmes qui se posaient au Moyen-Orient, il y a plus de 20 ans ! Et au lieu de cela, on a créé un désordre, une fragmentation, un désordre confessionnel, qui font prospérer Daesh. Donc il faut faire machine arrière, ou plus exactement, il faut revenir à une politique censée. Le président Rohani, qui est quand même le symbole de l'ouverture, va venir à Paris au mois de novembre. Il faut remettre les relations entre la France et l'Iran sur un pied élevé, ce qu'elles étaient autrefois, et il faut les utiliser, comme nous avons de bonnes relations avec le monde arabe, pour que des solutions interviennent en Syrie, en Irak, au Yémen si c'est possible, en Libye naturellement, de telle manière que la source de ces malheureux réfugiés actuels soit tarie. Il faut aller au but !
- J'aurais aimé que Mme Merkel pense comme moi il y a déjà quelques années. Cela aurait fait l'économie d'un conflit qui a été très coûteux en vies humaines. Je pense qu'il n'est jamais trop tard pour prendre une bonne inflexion. D'ailleurs j'ai observé, avec satisfaction, que Laurent Fabius s'était exprimé dans le même sens en disant qu'on ne pouvait pas commencer par demander à Bachar Al Asad des excuses – pourtant il aurait à en donner ça c'est sûr ! Quant on veut faire une coalition, il faut aller au but, et le but c'est effectivement de restaurer la Syrie et de permettre aux Syriens aujourd'hui réfugiés de retourner dans leur pays. Cela est humain !
- Il faut distinguer les problèmes. S'agissant de VW, les américains punissent un mensonge, et naturellement avec leur puritanisme habituel, cela a pris des proportions considérables, mais cela s'est passé sur leur territoire. Alors que BNP Paribas, Alstom, cela ne s'est pas passé sur leur territoire, simplement ils ont payé en dollars. Donc là, il y a abus de position dominante.
- Effectivement quant on voit aujourd'hui les moyens que déploient les Etats-Unis, avec un système d'écoute, la NSA, avec des procédures intentées par leur administration, le département de la justice, visant des entreprises étrangères, tétanisant nos banques, qui n'osent plus faire un prêt à la Russie ou à l'Iran, dans des conditions absolument incroyables, je dirai que c'est une forme de domination infiniment plus perverse. Cela s'appelle le soft-power, mais c'est le contrôle fiscal généralisé à l'échelle de la planète, c'est des procédures policières, judiciaires, des écoutes illégales, sur la base du Patriot Act, c'est une inféodation comme nous n'en avions jamais connu ! Et je demande que le gouvernement français prenne des mesures, je ne dis pas au niveau de l'Europe, parce que les européens n'en sont vraisemblablement pas capable, mais au niveau de l'OMC, et puis en tout cas que nous nous fassions respecter, parce que là nous avons dépassé les bornes.