Pour être efficace, la défense requiert une disponibilité permanente. Nos soldats devront-ils demander à leurs adversaires de bien vouloir cesser les hostilités au terme de leur temps de travail réglementaire ? En effet, Henrik Saugmandsgaard, l’avocat général près la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), a proposé [le 28 janvier] à la plus haute juridiction de l’UE de conclure à ce que la directive européenne du temps de travail (DETT) trouve à s’appliquer par principe aux militaires.
En d’autres termes, il suggère aux juges d’imposer à notre armée un temps de travail hebdomadaire limité, des pauses lorsque le temps de travail est supérieur à six heures, ou encore des périodes minimales de repos journalier et hebdomadaire. Nos militaires n’en seraient temporairement exclus que dans l’exercice de leurs « activités spécifiques » (circonstances exceptionnelles ou missions d’unités d’élite).
Disons-le clairement : ce serait un coup mortel porté à notre défense. Il est encore temps pour la CJUE, qui ne suit pas toujours les recommandations de l’avocat général et qui statuera définitivement dans les mois qui viennent, d’éviter le désastre pour la France et pour l’Europe.
Pour la France, la solution proposée reviendrait immanquablement à affaiblir nos armées qui assurent en permanence la sécurité des Français et des Européens. Leur niveau d’engagement est bien plus élevé que celui de toute autre armée de l’Union et, contrairement à d’autres, elle est entièrement professionnalisée. Dans ces conditions, la continuité, la disponibilité, la permanence et l’efficacité dans l’action de nos militaires ne sont guère compatibles avec les 35 heures…
Leur imposer les dispositions de la directive européenne se traduirait immédiatement, soit par la nécessité de compenser substantiellement les vides créés (en matière d’effectifs et de budget), soit par l’obligation de renoncer à certaines de leurs missions. Mais si la Cour de justice de l’UE devait donner suite à ce mauvais combat, elle fragiliserait surtout l’Union elle-même. Elle porterait un rude coup à une armée française de métier, qui est, depuis le départ des Britanniques, la plus puissante force opérationnelle de l’UE. Déployée sur tous les continents, l’armée française est un acteur fondamental de la sécurité européenne. Limiter son action et mettre en danger les Européens pour des raisons liées au temps de travail est inimaginable.
Enfin, et ce n’est pas le moins grave, la solution juridique proposée revient à faire passer une directive avant le traité, au mépris de la hiérarchie des normes qui est la base de l’Etat de droit européen. L’avocat général semble vouloir neutraliser l’article 4.2 du traité sur l’Union européenne, qui réserve aux États membres la compétence en matière de sécurité nationale. Ce serait une atteinte intolérable au contrat qui lie les États souverains associés à la construction européenne.
Pour ces raisons, nous affirmons, pendant qu’il en est temps, une opposition formelle aux conclusions de l’avocat général. Si l’on veut bien regarder le monde tel qu’il est, on ne peut que constater que nos militaires ne seront jamais des travailleurs comme les autres. Sauf à vouloir faire d’eux des herbivores parmi les carnivores.
Source : Le Monde
Disons-le clairement : ce serait un coup mortel porté à notre défense. Il est encore temps pour la CJUE, qui ne suit pas toujours les recommandations de l’avocat général et qui statuera définitivement dans les mois qui viennent, d’éviter le désastre pour la France et pour l’Europe.
Pour la France, la solution proposée reviendrait immanquablement à affaiblir nos armées qui assurent en permanence la sécurité des Français et des Européens. Leur niveau d’engagement est bien plus élevé que celui de toute autre armée de l’Union et, contrairement à d’autres, elle est entièrement professionnalisée. Dans ces conditions, la continuité, la disponibilité, la permanence et l’efficacité dans l’action de nos militaires ne sont guère compatibles avec les 35 heures…
Leur imposer les dispositions de la directive européenne se traduirait immédiatement, soit par la nécessité de compenser substantiellement les vides créés (en matière d’effectifs et de budget), soit par l’obligation de renoncer à certaines de leurs missions. Mais si la Cour de justice de l’UE devait donner suite à ce mauvais combat, elle fragiliserait surtout l’Union elle-même. Elle porterait un rude coup à une armée française de métier, qui est, depuis le départ des Britanniques, la plus puissante force opérationnelle de l’UE. Déployée sur tous les continents, l’armée française est un acteur fondamental de la sécurité européenne. Limiter son action et mettre en danger les Européens pour des raisons liées au temps de travail est inimaginable.
Enfin, et ce n’est pas le moins grave, la solution juridique proposée revient à faire passer une directive avant le traité, au mépris de la hiérarchie des normes qui est la base de l’Etat de droit européen. L’avocat général semble vouloir neutraliser l’article 4.2 du traité sur l’Union européenne, qui réserve aux États membres la compétence en matière de sécurité nationale. Ce serait une atteinte intolérable au contrat qui lie les États souverains associés à la construction européenne.
Pour ces raisons, nous affirmons, pendant qu’il en est temps, une opposition formelle aux conclusions de l’avocat général. Si l’on veut bien regarder le monde tel qu’il est, on ne peut que constater que nos militaires ne seront jamais des travailleurs comme les autres. Sauf à vouloir faire d’eux des herbivores parmi les carnivores.
Source : Le Monde