Jean-Pierre Chevènement était l'invité du Grand Journal sur Canal+, jeudi 28 janvier 2016.Entretien à L'Est républicain, Propos recueillis Philippe Piot, jeudi 28 janvier 2016.
L'Est républicain ; En 1985, ministre de l’Education nationale, vous avez fixé l’objectif d’amener 80 % d’une classe d’âge « au niveau du bac ». Ce slogan a souvent été compris comme « 80 % de bacheliers ». Quelle différence faites-vous entre les deux formules?
Jean-Pierre Chevènement : J’ai en effet fixé, en 1984, lors de la Conférence de presse de rentrée, un objectif ambitieux au système éducatif : porter de moins de 40 % à l’époque à 80 % la proportion des jeunes poursuivant leurs études jusqu’au niveau du baccalauréat, c’est-à-dire la terminale (niveau IV) comme en Allemagne, aux Etats-Unis, au Japon ou en Suède. Cet objectif, qui a été atteint en France à la fin des années 1990, n’a pas toujours été bien compris. J’avais dit très explicitement « jusqu’au niveau du bac » et beaucoup de commentateurs trop pressés ont traduit « au bac ». Telle n’était pas mon intention. J’ai toujours considéré que l’école de la République devait concilier à la fois la quantité et la qualité. Je n’aurais jamais donné des consignes de laxisme comme certains de mes successeurs en demandant d’abaisser à 9 la moyenne requise pour obtenir le baccalauréat. Le but n’était pas de « faire du chiffre », mais de démocratiser l’accès au baccalauréat selon le principe de « l’élitisme républicain » : permettre à chacun d’aller au bout de ses capacités. Jean-Pierre Chevènement était l'invité de LCI, mardi 26 janvier 2016. Il répondait aux questions de Audrey Crespo-Mara.Agenda et médiasJean-Pierre Chevènement était l'invité de l'émission Salut les terriens, samedi 23 janvier 2016 sur Canal Plus.
Edmonde Charles-Roux était une grande dame. Engagée dès 1939 comme infirmière dans l’armée française, elle reprend du service en 1944 aux côtés du Général De Lattre de Tassigny. La Légion étrangère avait reconnu ses mérites en la faisant caporal d’honneur.
Elle s’est très tôt affirmée comme une figure majeure dans la Culture, dans la littérature de notre pays. Oublier Palerme lui avait valu le prix Goncourt et son œuvre lui a ouvert toute grandes les portes de l’académie Goncourt, qu’elle présidait encore il y a peu. Mais Edmonde était aussi une grande figure de la vie politique. Edmonde avait de fortes convictions qui l’ancraient dans la meilleure tradition de la gauche : la liberté de l’esprit alliée à la générosité du cœur. Compagne de Gaston Deferre, qu’elle aimait et qu’elle admirait, et qui le lui rendait bien, elle a été l’inspiratrice d’une politique qui visait au rassemblement de toute la gauche. C’était aussi une patriote intransigeante. Je n’oublie pas le soutien qu’elle m’a apporté en maintes occasions ni sa venue à Belfort où nous avions inauguré ensemble la rue Gaston Deferre en centre-ville. Son influence en matière de politique culturelle n’a pas besoin d’être soulignée à Marseille et ailleurs. Elle a été une héroïne aux multiples talents, courageuse, curieuse de tout, à nulle autre pareille. Je suis fier d’avoir été son ami.
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Agenda et médiasEntretien de Jean-Pierre Chevènement à Atlantico, dimanche 17 janvier 2016.
Atlantico : La loi sur la déchéance de nationalité occupe le débat depuis les attentats de novembre alors que pour la majorité des intervenants, celle-ci serait inefficace. Pourquoi, selon vous, s'attache-t-on ainsi à des symboles ?
Jean-Pierre Chevènement : La France depuis les attentats de 2015 est entrée dans une période nouvelle de son histoire. Il est malheureusement prévisible que ces attentats se reproduisent. Ils vont mettre la France à rude épreuve. Notre pays, jusqu'à présent, a réagi avec sang-froid et dignité. Il a montré beaucoup de résilience. Nos concitoyens, dans l'épreuve, se sont regroupés autour de la France, de la République et de leurs symboles et nous avons évité jusqu'à présent le piège de l'escalade qui est naturellement le calcul de Daesh. Celui-ci veut susciter des affrontements qui pourraient conduire à une guerre civile en France, eu égard au contexte politique tendu que nous allons connaître. Je renvoie à Gilles Kepel selon qui le Syrien Abou Moussab Al Souri a identifié l'Europe et la France comme le maillon faible du monde occidental. Le maillon faible n'a pas craqué jusqu'à présent. La tâche du Président de la République et du Premier Ministre est évidement très difficile. Leur prompte réaction a été salutaire. S'agissant de la révision constitutionnelle, j'ai lu que le Président de la République envisageait d'y faire entrer la réforme du Conseil Supérieur de la Magistrature et le statut du parquet. Cela m'inquiète plutôt. La révision se justifie pour définir la place et les conditions du recours à l'état d'urgence. L'état d'urgence n'est pas une situation qui est faite pour durer. Cette révision constitue donc une garantie apportée à la liberté. ActualitésLes actes du colloque du 28 septembre 2015 sont disponibles en ligne sur le site de la Fondation Res Publica.
Dans le numéro du Débat du mois de janvier, Jean-Pierre Chevènement consacre un long et passionnant article à François Mitterrand. L'ancien ministre choisit le tournant de 1983 pour tracer le portrait d'un homme politique secret et décidé, persuadé que le destin de la France ne peut se faire sans l'Europe. Le Figaro en publie de larges extraits.
La méthode du secret
J'ai rarement vu François Mitterrand hésiter. Je ne parle évidemment pas de la tactique, qu'il savait faire évoluer au gré des circonstances. Les grands choix - il y en avait peu -, il les faisait seul. Ensuite, il les imposait, à la faveur des événements, à ses amis comme à ses adversaires. Le secret était aussi sa manière d'être. Il contribuait à son charme puissant. François Mitterrand savait deviner les êtres et se les attacher. Il professait sur la fin de sa vie qu'en politique il n'y avait pas d'amis. Pourtant, toute sa vie et sa carrière politique ont été la démonstration du contraire : François Mitterrand a pu compter sur des fidèles, entièrement dévoués à sa personne. Pour ma part, je n'ai jamais fait partie de ces mamelouks. Je lui avais offert les clés du parti d'Épinay avec le Ceres et cela nous autorisait à marquer clairement nos désaccords déjà dans l'élaboration du programme socialiste, puis ultérieurement, sur la guerre du Golfe et sur Maastricht, notamment. Mais ces désaccords, si fondamentaux qu'ils fussent, n'empêchaient pas cette « loyauté globale » sur laquelle, me dit-il un jour, il savait pouvoir compter et restaient contenus par la compréhension que j'ai toujours recherchée des raisons qui pouvaient être les siennes. La méthode du secret réussissait à François Mitterrand là où il excellait, dans le maniement des hommes, aussi bien en politique intérieure que dans les affaires internationales. Il en allait différemment en économie, matière à laquelle il était étranger. Il ne croyait pas à la ridicule prétention de figer le réel en formules mathématiques. Sa culture était à l'opposé : un roman, un livre d'histoire lui ouvraient de vastes horizons. Les notes du Plan ou celles de la petite garde de conseillers qui, au lendemain du 10 mai 1981, s'était spontanément constituée entre l'Élysée, Matignon et la rue de Rivoli pour guider ses choix économiques lui tombaient des mains. Il les voyait venir. Sous l'habit du courtisan, il devinait les « rocardiens » qu'issus du même moule ils avaient toujours été. |
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