L’accord avec la Grèce auquel est parvenu le Conseil Européen des 25 et 26 mars est fragile. Les marchés financiers peuvent continuer à danser la sarabande. Le sauvetage d’un pays qui ne pourrait plus emprunter sur les marchés financiers n’est prévu qu’« en dernier recours » et à l’unanimité. La Grèce devra donc continuer d’acquitter des taux d’intérêt plus de deux fois supérieurs à ceux de l’Allemagne (6 % au lieu de 3 %). Combien de temps cela pourra-t-il durer ? Surtout l’intervention du FMI – au conseil duquel les Etats-Unis disposent d’une minorité de blocage – reste nécessaire, , à hauteur du tiers des prêts consentis. Et aussi l’accord de l’Allemagne. C’est un système à double clé !
Le résultat n’est pas brillant : chacun sent bien que derrière la Grèce, d’autres pays peuvent se sentir visés. C’est toute la zone euro qui est fragilisée. Madame Lagarde a justement souligné que la politique allemande basée depuis dix ans sur une déflation salariale compétitive et sur un excédent commercial qui se réalise pour plus de la moitié sur le reste de l’Europe, n’était plus soutenable. Certes les cigales méditerranéennes se plaignent que « la fourmi n’est pas prêteuse », comme si elles l’ignoraient quand elles ont accepté les rudes disciplines de Maastricht. Evidemment la zone euro n’est pas homogène : il y a les pays du Nord et les pays du Sud et ce n’est pas la même histoire économique. Ce n’est pas la même culture. Chaque pays a son propre modèle et l’Europe est faite de nations, irréductibles les unes aux autres où les divergences de politique économique redoublent plutôt qu’elles ne corrigent les différences de structures. L’article 125 du traité de Lisbonne interdit l’entraide mutuelle. Etrange conception de la solidarité dans une Europe qui selon la déclaration de Robert Schumann de 1950, devait réaliser « une union toujours plus étroite entre ses peuples ».
Le résultat n’est pas brillant : chacun sent bien que derrière la Grèce, d’autres pays peuvent se sentir visés. C’est toute la zone euro qui est fragilisée. Madame Lagarde a justement souligné que la politique allemande basée depuis dix ans sur une déflation salariale compétitive et sur un excédent commercial qui se réalise pour plus de la moitié sur le reste de l’Europe, n’était plus soutenable. Certes les cigales méditerranéennes se plaignent que « la fourmi n’est pas prêteuse », comme si elles l’ignoraient quand elles ont accepté les rudes disciplines de Maastricht. Evidemment la zone euro n’est pas homogène : il y a les pays du Nord et les pays du Sud et ce n’est pas la même histoire économique. Ce n’est pas la même culture. Chaque pays a son propre modèle et l’Europe est faite de nations, irréductibles les unes aux autres où les divergences de politique économique redoublent plutôt qu’elles ne corrigent les différences de structures. L’article 125 du traité de Lisbonne interdit l’entraide mutuelle. Etrange conception de la solidarité dans une Europe qui selon la déclaration de Robert Schumann de 1950, devait réaliser « une union toujours plus étroite entre ses peuples ».
En niant les nations, l’Europe de Maastricht s’est construite sur le sable. Au lieu de mettre en place comme le suggérait la Grande-Bretagne, une monnaie commune, réservée aux transactions extérieures, avec les souplesses maintenues entre des monnaies nationales aux parités ajustables, on a décrété, en 1990-91, une monnaie unique rigide qui ne tient compte ni des différences de structures, ni des orientations souvent opposées des politiques économiques.
Ceux qui ont créé la monnaie unique connaissaient pourtant son vice initial de conception. Ils croyaient que celle-ci créerait des convergences entre les politiques économiques. L’euro, avec les bas taux d’intérêt qu’il a d’abord permis, a encouragé l’endettement des Etats. La crise de 2008-2009 a fait exploser les critères du pacte de stabilité. Surtout, les concepteurs de la monnaie unique pariaient sur le développement d’un état d’esprit et surtout d’un budget fédéral. Aucun pays, en fait, n’est prêt à porter le budget européen à la taille d’un vrai budget fédéral. Ce qu’on voit avec l’euro s’observe encore plus dans le domaine de la politique étrangère et de la défense. Il n’y a pas, entre les Européens, de vision commune. Même avec le traité de Lisbonne, l’Europe fonctionne de plus en plus sur le mode intergouvernemental.
Constatons le comme un fait : les peuples européens ne sont pas prêts à faire jouer entre eux le même degré de solidarité qu’ils acceptent en leur sein, tout simplement parce que l’Europe reste faite de nations et n’est pas elle-même une nation. L’Allemagne refuse de payer pour des pays qui laissent filer leurs déficits. Cela peut se comprendre…jusqu’à un certain point. Car ces déficits sont -partiellement- l’envers d’un excédent commercial allemand qui résulte de la déflation salariale pratiquée outre-Rhin depuis dix ans. Celle-ci pèse inévitablement sur la croissance européenne.
Faut-il créer un FME (Fonds monétaire européen) pour remplacer le FMI ? Techniquement, c’est possible par une combinaison de prêts, de garanties d’emprunts et le cas échéant, de sanctions. Mais l’Europe peut-elle substituer au gendarme international qu’est le FMI, un gendarme européen ? L’Allemagne ne le croit pas qui regarde davantage vers l’Est. Il faut cependant la convaincre qu’elle a encore besoin de l’Europe et cela, dans son propre intérêt. Un gouvernement économique de la zone euro est nécessaire, afin d’impulser une politique européenne de croissance au service de l’emploi. Elle seule permettrait à terme de résorber les déficits des pays du Sud.
Pour cela il faudrait que l’Allemagne et les grands pays du Nord de l’Europe acceptent de soutenir davantage leur demande intérieure et de pratiquer une politique keynésienne concertée avec les autres grandes puissances économiques de l’Univers : les Etats-Unis, la Chine, le Japon, l’Inde etc. Si l’Allemagne n’était pas prête à soutenir sa demande intérieure, la seule perspective serait celle d’une politique récessionniste dans chaque pays, c’est-à-dire l’assurance d’une catastrophe économique et sociale généralisée, y compris en dernier ressort pour l’Allemagne.
Heureusement il y a des forces puissantes qui peuvent conduire l’Allemagne à revoir sa politique économique : les syndicats, le salariat de ce pays et tous ceux qui comprennent que l’Allemagne ne peut pas tourner le dos à l’Europe, sous prétexte de compétitivité sur les marchés mondiaux. Et puis il y a beaucoup d’autres pays de par le monde - à commencer par les Etats-Unis - qui ont besoin d’une locomotive allemande et européenne puissante. Voilà un sujet pour le prochain G24 qui se tiendra en Corée à la fin de l’année.
A moins d’un éclatement de la zone euro, ii n’y a pas d’issue raisonnable à la crise actuelle en dehors d’un compromis européen et mondial imposé par la « raison des nations ».
Ceux qui ont créé la monnaie unique connaissaient pourtant son vice initial de conception. Ils croyaient que celle-ci créerait des convergences entre les politiques économiques. L’euro, avec les bas taux d’intérêt qu’il a d’abord permis, a encouragé l’endettement des Etats. La crise de 2008-2009 a fait exploser les critères du pacte de stabilité. Surtout, les concepteurs de la monnaie unique pariaient sur le développement d’un état d’esprit et surtout d’un budget fédéral. Aucun pays, en fait, n’est prêt à porter le budget européen à la taille d’un vrai budget fédéral. Ce qu’on voit avec l’euro s’observe encore plus dans le domaine de la politique étrangère et de la défense. Il n’y a pas, entre les Européens, de vision commune. Même avec le traité de Lisbonne, l’Europe fonctionne de plus en plus sur le mode intergouvernemental.
Constatons le comme un fait : les peuples européens ne sont pas prêts à faire jouer entre eux le même degré de solidarité qu’ils acceptent en leur sein, tout simplement parce que l’Europe reste faite de nations et n’est pas elle-même une nation. L’Allemagne refuse de payer pour des pays qui laissent filer leurs déficits. Cela peut se comprendre…jusqu’à un certain point. Car ces déficits sont -partiellement- l’envers d’un excédent commercial allemand qui résulte de la déflation salariale pratiquée outre-Rhin depuis dix ans. Celle-ci pèse inévitablement sur la croissance européenne.
Faut-il créer un FME (Fonds monétaire européen) pour remplacer le FMI ? Techniquement, c’est possible par une combinaison de prêts, de garanties d’emprunts et le cas échéant, de sanctions. Mais l’Europe peut-elle substituer au gendarme international qu’est le FMI, un gendarme européen ? L’Allemagne ne le croit pas qui regarde davantage vers l’Est. Il faut cependant la convaincre qu’elle a encore besoin de l’Europe et cela, dans son propre intérêt. Un gouvernement économique de la zone euro est nécessaire, afin d’impulser une politique européenne de croissance au service de l’emploi. Elle seule permettrait à terme de résorber les déficits des pays du Sud.
Pour cela il faudrait que l’Allemagne et les grands pays du Nord de l’Europe acceptent de soutenir davantage leur demande intérieure et de pratiquer une politique keynésienne concertée avec les autres grandes puissances économiques de l’Univers : les Etats-Unis, la Chine, le Japon, l’Inde etc. Si l’Allemagne n’était pas prête à soutenir sa demande intérieure, la seule perspective serait celle d’une politique récessionniste dans chaque pays, c’est-à-dire l’assurance d’une catastrophe économique et sociale généralisée, y compris en dernier ressort pour l’Allemagne.
Heureusement il y a des forces puissantes qui peuvent conduire l’Allemagne à revoir sa politique économique : les syndicats, le salariat de ce pays et tous ceux qui comprennent que l’Allemagne ne peut pas tourner le dos à l’Europe, sous prétexte de compétitivité sur les marchés mondiaux. Et puis il y a beaucoup d’autres pays de par le monde - à commencer par les Etats-Unis - qui ont besoin d’une locomotive allemande et européenne puissante. Voilà un sujet pour le prochain G24 qui se tiendra en Corée à la fin de l’année.
A moins d’un éclatement de la zone euro, ii n’y a pas d’issue raisonnable à la crise actuelle en dehors d’un compromis européen et mondial imposé par la « raison des nations ».