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Pour la réunion d’une conférence chargée de redéfinir les institutions européennes


Tribune de Jean-Pierre Chevènement dans Le Figaro, samedi 25 juin 2016.


Le peuple britannique n’a pas cédé au chantage et à la peur orchestrés par les milieux financiers dominants. Son vote courageux a montré qu’il mettait la démocratie, c’est-à-dire le contrôle des décisions qui le concernent, au-dessus de tout. L’Angleterre a montré encore une fois son esprit d’indépendance et son caractère qui est justement ce pour quoi nous l’aimons. De Gaulle avait raison : elle continue de vivre au rythme de l’anglosphère et du monde, même si son peuple est incontestablement un grand peuple européen.

Je demande aux dirigeants des vingt-sept pays européens de l’Union d’accueillir avec fair-play et sans esprit vindicatif la décision souveraine du peuple britannique. La négociation d’un statut d’association de la Grande-Bretagne au marché unique européen, sur le modèle norvégien, peut intervenir dans les deux ans qui viennent, délai donné par l’article 50 des traités européens. Je rappelle que la Norvège, avec une population de 5 millions d’habitants (onze fois moins que la Grande-Bretagne), acquitte, pour avoir accès au marché unique, une contribution annuelle de 432 millions d’euros.

Allons à l’essentiel : le Brexit peut être un service rendu à l’Europe. Il doit donner une deuxième chance à l’idée européenne : celle d’une refondation démocratique qui articulerait la démocratie qui vit dans les nations avec une démocratie européenne qui reste à construire. Il me paraît clair qu’il faut outiller la seule instance européenne aujourd’hui démocratiquement légitime : le Conseil européen, qui réunit les chefs d’État et de gouvernement, afin qu’il dispose des services lui permettant de préparer et de suivre ses décisions. La Commission verrait ainsi redéfinir ses missions. Il faudra surtout restreindre le champ des interventions européennes à l’essentiel et laisser respirer la démocratie.

La deuxième réforme fondamentale à mes yeux est celle du Parlement européen. Celui-ci doit procéder des Parlements nationaux où vit la démocratie représentative fondée sur le sentiment de l’appartenance nationale. Il faut créer un continuum entre les démocraties nationales et une démocratie européenne qui reste, pour l’essentiel, à construire. Car il faut assurer un contrôle démocratique de l’exercice des compétences déléguées.

Je demande la réunion à bref délai d’une conférence chargée de redéfinir les institutions européennes et de repenser le modèle de développement qui résulte notamment du traité budgétaire dit TSCG de 2012 qui plombe la croissance européenne. Le modèle mercantiliste allemand (l’excédent extérieur correspond à plus de 10 % du PIB) est intransposable aux autres pays européens. Il faut concevoir un modèle européen de développement où l’Allemagne met ses surplus au service de la croissance européenne… et allemande.

Cette conférence européenne pourrait s’inspirer d’un précédent : celui de la conférence de Messine qui, après l’échec de la Communauté européenne de défense (CED), a permis, en 1955, de remettre l’Europe sur les rails et de préparer le traité de Rome. Cette conférence se tiendrait à vingt-sept, avec un statut spécial d’observateur pour la Grande-Bretagne. Il faut en effet voir large et voir loin.

N’oublions pas que le peuple britannique est un grand peuple européen et que nous partageons avec lui de très nombreux intérêts communs, notamment dans le domaine de la sécurité, si important aujourd’hui. Pour faire face aux nouvelles menaces et poursuivre notre coopération notamment nucléaire, nous avons besoin de la Grande-Bretagne.

Bien entendu, la Grande-Bretagne, le moment venu, aura toute sa place dans ce que le général de Gaulle appelait « une Europe européenne », c’est-à-dire une Europe capable d’exister stratégiquement par elle-même et pour elle-même, dans le monde du XXIe siècle. Une Europe forte sera nécessaire pour que nous ne soyons pas étouffés dans les pinces du « G2 ». Un monde multipolaire est de l’intérêt de tous.


Mots-clés : brexit, europe, grande-bretagne
Rédigé par Jean Pierre Chevenement le Vendredi 24 Juin 2016 à 22:25 | Lu 5364 fois



1.Posté par Geof Delav le 25/06/2016 07:24
bonjour, bonsoir,
encore du mou...comme j'écrivais sur un autre carnet en ligne, nos sociétés souffrent de : pollution, chômage, mal-être pour l'essentiel. Une réunion pour relancer l'Europe, c'est idiot ! Comme si, quant on était vieux comme le "Che", on ne devait pas se préoccuper de l'avenir "pour de vrai", qu'on pouvait s'amuser à se prendre pour Napoléon, "faire l'Europe"; et après nous le déluge...
Le "Che", ce qu'il lui faudrait, c'est une bonne guerre pour qu'il apprenne à ne pas jouer avec le feu - l'extrême-droite est-européenne va "saquer" l'UE, et ce sera bien mérité...
Geoffrey, communiste belge

2.Posté par Borderline le 25/06/2016 13:45
Plus personne ne veut de l'Europe. Redéfinie ou pas, le peuple veut sa nation souveraine et une collaboration étroite entre nations souveraines continentales, le reste ça finit comme maintenant, avec le peuple à genoux devant la banque. Mais continuez à faire semblant de ne pas le voir

3.Posté par Von Van le 25/06/2016 18:51
Il n'y a pas a "redefinir", ajuster, ou reformer les institutions Europeennes. On a depasse ce stade. Les gens tout simplement ne veulent plus de ce systeme dictatorial qui a rendu les parlements nationaux caduques, ou leur voix et leurs interets ne sont plus pris en compte. Vous pouvez deja commencer a preparer la sortie de la France, c'est une question de temps.

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