La social-démocratie en France n’a pas de réalité organisationnelle.
La République en France plonge ses racines dans l’événement fondateur de la Révolution française.
La relation à la République du mouvement ouvrier naissant au XIXe siècle n’a pas été simple. A deux reprises en effet – en 1848 et en 1871 – la République libérale a pris le visage de la répression. Ce divorce initial s’inscrira durablement dans le paysage institutionnel. La Charte d’Amiens, en 1902, proclamera l’apolitisme, ou en tout cas la réserve des syndicats par rapport aux partis. Dans le même temps, en 1905, l’unification socialiste se réalisera, au sein de la SFIO, sur une base idéologique précise : la synthèse opérée par Jaurès entre l’idée républicaine et la pensée marxiste.
Si Jaurès avait anticipé le rôle des réformes sociales pour combler le fossé entre la classe ouvrière et la République, il faudra attendre le Front Populaire puis la Libération pour réaliser la fusion du mouvement social et de l’idée républicaine. Et cette fusion procède moins de la lutte syndicale que d‘une victoire électorale d’abord, en 1936, et surtout du programme du Conseil National et la Résistance à la Libération. Politique d’abord, cette conception est celle de la République, non celle de la social-démocratie. Celle-ci, en France, n’a pas de réalité, au plan de l’organisation.
La République en France plonge ses racines dans l’événement fondateur de la Révolution française.
La relation à la République du mouvement ouvrier naissant au XIXe siècle n’a pas été simple. A deux reprises en effet – en 1848 et en 1871 – la République libérale a pris le visage de la répression. Ce divorce initial s’inscrira durablement dans le paysage institutionnel. La Charte d’Amiens, en 1902, proclamera l’apolitisme, ou en tout cas la réserve des syndicats par rapport aux partis. Dans le même temps, en 1905, l’unification socialiste se réalisera, au sein de la SFIO, sur une base idéologique précise : la synthèse opérée par Jaurès entre l’idée républicaine et la pensée marxiste.
Si Jaurès avait anticipé le rôle des réformes sociales pour combler le fossé entre la classe ouvrière et la République, il faudra attendre le Front Populaire puis la Libération pour réaliser la fusion du mouvement social et de l’idée républicaine. Et cette fusion procède moins de la lutte syndicale que d‘une victoire électorale d’abord, en 1936, et surtout du programme du Conseil National et la Résistance à la Libération. Politique d’abord, cette conception est celle de la République, non celle de la social-démocratie. Celle-ci, en France, n’a pas de réalité, au plan de l’organisation.
Social-démocratie et partage de la valeur ajoutée
L’hégémonie des idées social-démocrates devint manifeste en Europe, tout au long des trente glorieuses, c’est-à-dire dans une période où le rapport des forces à l’échelle mondiale favorisait les intérêts du monde du travail : victoire en 1945 du New-Deal mais aussi du communisme. Les partis socialistes et sociaux-démocrates en Europe de l’Ouest surent monnayer efficacement la crainte du communisme et leur ralliement à l’atlantisme, en avantages sociaux sonnants et trébuchants au bénéfice du monde du travail. Si on entend par social-démocratie non pas une organisation liant les syndicats et un parti politique comme en Suède, en Grande-Bretagne ou en Allemagne, mais un partage de la valeur ajoutée favorable aux salariés et au monde du travail, on peut dire que la IVe République aussi bien que le gaullisme et le pompidolisme furent sociaux-démocrates à leur manière.
Ce pacte se défit progressivement à partir du milieu des années 70 et jusqu’au début des années 90 avec le triomphe de la « globalisation : l’ouverture généralisée des marchés sous l’égide du néo-conservatisme libéral anglo-saxon et de l’Hyperpuissance américaine.
Dans ce contexte, le modèle républicain français va être mis à rude épreuve. Sommée par l’Europe de remettre en cause, au nom du principe de la « concurrence libre et non faussée », le compromis social né du programme du CNR, la France donnera toujours l’impression d’être en retard d’une guerre. Ce n’est pas le moindre paradoxe de la période de voir les socialistes au gouvernement présider, à partir de 1983, au grand renversement du partage entre les salaires et les profits. L’intérêt général et l’intérêt du monde du travail semblent diverger, même si la gauche essaie de limiter le creusement des inégalités par la progression de l’assistance sociale (RMI – CMU – APA, etc.).
Face à la mondialisation, la refondation républicaine de la gauche
Quel peut être le rôle de la gauche (on a vu que la social-démocratie, en France, n’existe pas) face à la mondialisation ? Et que reste-t-il du modèle républicain dans une Europe contrainte à s’ouvrir et à subir aussi bien la loi du moins disant social dans les pays à bas coûts salariaux, que l’hégémonie monétaire destructrice du dollar ?
Poser la question c’est y répondre : la République française a accepté par le traité de Lisbonne de ne pas remettre en cause des règles du jeu sociales, commerciales, monétaires, que pourtant le peuple français avait rejetées le 29 mai 2005. Elle est donc prisonnière, pour l’heure, d’un équilibre géopolitique qui fait dépendre des évolutions intérieures allemandes (politiques, syndicales, patronales) une réorientation d’ensemble de la construction européenne qu’impose le développement de la crise financière mondiale.
Ce serait désespérer de la République que de la voir durablement condamnée à l’impuissance. La gauche ne fera pas l’économie d’une refondation républicaine. C’est en se battant contre la domination du capital financier et pour de nouvelles règles du jeu à l’échelle française, européenne et mondiale que la gauche retrouvera de l’espace, jettera les bases d’un nouveau compromis social, favorisant le monde du travail, et s’ancrera à nouveau dans les couches populaires.. Ainsi la gauche aurait grand tort de prendre congé de l’idée républicaine, car c’est dans la conscience civique – en France mais pas seulement – que réside l’espoir d’un nouveau cours.
Le fil de l’Histoire n’a pas été définitivement tranché par la ratification, par voie parlementaire, du traité de Lisbonne. La souveraineté populaire, qui est une autre définition de la République, n’a pas encore dit son dernier mot.
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Voir le sommaire de la revue de l'ENA, dont le dossier est "Quel avenir pour la social-démocratie ?"
L’hégémonie des idées social-démocrates devint manifeste en Europe, tout au long des trente glorieuses, c’est-à-dire dans une période où le rapport des forces à l’échelle mondiale favorisait les intérêts du monde du travail : victoire en 1945 du New-Deal mais aussi du communisme. Les partis socialistes et sociaux-démocrates en Europe de l’Ouest surent monnayer efficacement la crainte du communisme et leur ralliement à l’atlantisme, en avantages sociaux sonnants et trébuchants au bénéfice du monde du travail. Si on entend par social-démocratie non pas une organisation liant les syndicats et un parti politique comme en Suède, en Grande-Bretagne ou en Allemagne, mais un partage de la valeur ajoutée favorable aux salariés et au monde du travail, on peut dire que la IVe République aussi bien que le gaullisme et le pompidolisme furent sociaux-démocrates à leur manière.
Ce pacte se défit progressivement à partir du milieu des années 70 et jusqu’au début des années 90 avec le triomphe de la « globalisation : l’ouverture généralisée des marchés sous l’égide du néo-conservatisme libéral anglo-saxon et de l’Hyperpuissance américaine.
Dans ce contexte, le modèle républicain français va être mis à rude épreuve. Sommée par l’Europe de remettre en cause, au nom du principe de la « concurrence libre et non faussée », le compromis social né du programme du CNR, la France donnera toujours l’impression d’être en retard d’une guerre. Ce n’est pas le moindre paradoxe de la période de voir les socialistes au gouvernement présider, à partir de 1983, au grand renversement du partage entre les salaires et les profits. L’intérêt général et l’intérêt du monde du travail semblent diverger, même si la gauche essaie de limiter le creusement des inégalités par la progression de l’assistance sociale (RMI – CMU – APA, etc.).
Face à la mondialisation, la refondation républicaine de la gauche
Quel peut être le rôle de la gauche (on a vu que la social-démocratie, en France, n’existe pas) face à la mondialisation ? Et que reste-t-il du modèle républicain dans une Europe contrainte à s’ouvrir et à subir aussi bien la loi du moins disant social dans les pays à bas coûts salariaux, que l’hégémonie monétaire destructrice du dollar ?
Poser la question c’est y répondre : la République française a accepté par le traité de Lisbonne de ne pas remettre en cause des règles du jeu sociales, commerciales, monétaires, que pourtant le peuple français avait rejetées le 29 mai 2005. Elle est donc prisonnière, pour l’heure, d’un équilibre géopolitique qui fait dépendre des évolutions intérieures allemandes (politiques, syndicales, patronales) une réorientation d’ensemble de la construction européenne qu’impose le développement de la crise financière mondiale.
Ce serait désespérer de la République que de la voir durablement condamnée à l’impuissance. La gauche ne fera pas l’économie d’une refondation républicaine. C’est en se battant contre la domination du capital financier et pour de nouvelles règles du jeu à l’échelle française, européenne et mondiale que la gauche retrouvera de l’espace, jettera les bases d’un nouveau compromis social, favorisant le monde du travail, et s’ancrera à nouveau dans les couches populaires.. Ainsi la gauche aurait grand tort de prendre congé de l’idée républicaine, car c’est dans la conscience civique – en France mais pas seulement – que réside l’espoir d’un nouveau cours.
Le fil de l’Histoire n’a pas été définitivement tranché par la ratification, par voie parlementaire, du traité de Lisbonne. La souveraineté populaire, qui est une autre définition de la République, n’a pas encore dit son dernier mot.
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Voir le sommaire de la revue de l'ENA, dont le dossier est "Quel avenir pour la social-démocratie ?"