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La motion d'orientation du MRC et son annexe


Ci-dessous au format PDF la motion d'orientation et son annexe, adoptées au cours du Congrès du MRC au Kremlin-Bicêtre les 21 et 22 juin 2008.




Rédigé par Chevenement.fr le Jeudi 26 Juin 2008 à 12:37 | Lu 4848 fois



1.Posté par BA le 27/06/2008 15:48
Les marchés financiers, dont beaucoup d'experts soulignaient la capacité de résistance à la crise bancaire et économique, ont lourdement chuté, jeudi 26 juin. A Paris, Londres et Francfort, les indices ont cédé près de 2,5 %, finissant à des niveaux inférieurs à leur plancher du mois de mars 2008, atteint juste après l'annonce de la quasi-faillite de la banque d'affaires américaine Bear Stearns. Depuis le début de la crise, à l'été 2007, la baisse du CAC 40 atteint maintenant près de 30 %.

La déconfiture européenne a accompagné celle des Bourses américaines. Jeudi 26 juin, le Dow Jones et le Nasdaq ont perdu plus de 3 %. La dégradation s'est aussi prolongée en Asie. Vendredi, le Nikkei japonais a cédé 2,01 % tandis que sur les marchés chinois la place de Shanghaï a reculé de 5,29 %.

" J'ai 40 ans, j'ai vécu plusieurs crises, le choc pétrolier des années 1980, l'éclatement de la bulle Internet post-2001, mais je n'avais jamais vu ça ! Les marchés baissent sans cesse, plus personne ne veut acheter ", s'inquiète Steven Grasso, courtier au parquet de New York.

La nervosité est extrême. " Nous ne sommes pas loin d'un potentiel krach ", estime Alexandre Capez, trader à Londres chez Lehman Brothers. " Il n'y a plus de logique, plus de raison, tout devient un jeu de psychologie, il suffit d'un souffle " pour que tout craque, s'inquiète-t-il.

Pour les analystes, la sanction du marché est étonnante. " Les valorisations des actions sont à des niveaux inédits depuis vingt à trente ans ", calcule Vincent Treulet, responsable de la stratégie actions chez Natixis.

En Bourse, le secteur bancaire en particulier est devenu " toxique ", poursuit-il. Les investisseurs redoutent que leurs pertes liées aux subprimes, ces crédits immobiliers à risque, ne s'aggravent encore dramatiquement. Leurs inquiétudes semblent fondées. Jeudi 26 juin, la direction du groupe belgo-néerlandais Fortis a annoncé un " plan de solvabilité " pour récolter 8 milliards d'euros. Son titre s'est effondré de 18,9 % provoquant la débâcle de tout le secteur.

Quelques jours plus tôt, la banque britannique Barclays a annoncé une levée de fonds de 6 milliards d'euros. Quant à la plus grande banque américaine, Citigroup, elle a averti qu'elle serait contrainte de passer de nouvelles dépréciations " substantielles " au deuxième trimestre.

Pis, le secteur financier n'est plus le seul sujet de préoccupation. Les investisseurs redoutent la contagion de la crise au secteur industriel. Les rumeurs délétères s'accumulent sur les secteurs les plus fragiles en particulier l'automobile. Jeudi, elles visaient le groupe automobile Chrysler suspecté d'avoir recours au " chapter 11 ", la loi américaine de protection des faillites.

" Ça craque de partout ", ajoute Vincent Treulet. A la crise financière et immobilière s'ajoute l'impact inflationniste d'un troisième choc pétrolier. Le cours du pétrole, installé depuis plusieurs mois au-dessus de 130 dollars, a franchi jeudi à New York un nouveau record historique à plus de 140 dollars le baril. Les prix pourraient même atteindre 150 à 170 dollars " au cours de l'été " a averti Chakib Khelil, président de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), interrogé sur la chaîne France 24.

Désormais, la grande crainte est celle d'une stagflation, c'est-à-dire la conjonction d'une croissance molle et d'une inflation incontrôlable liée à la flambée de l'or noir et des autres matières premières. Mercredi, la Réserve fédérale américaine (Fed) a d'ailleurs souligné ce risque. Prise en étau entre une croissance chancelante et des pressions inflationnistes inquiétantes, l'autorité monétaire a décidé de maintenir le niveau des taux d'intérêt aux Etats-Unis à 2 %, en restant évasive sur l'attitude à adopter dans l'avenir.

De fait, la lutte contre la stagflation est, pour une banque centrale, très délicate à mener. Baisser ses taux pour soutenir la croissance, c'est prendre le risque d'attiser la flambée des prix. Les relever pour contrer les tensions inflationnistes, c'est au contraire prendre le risque de casser la consommation et l'investissement.

La Banque centrale européenne (BCE), de son côté, a choisi de privilégier la lutte contre l'inflation et devrait durcir sa politique monétaire dès le début du mois de juillet.

Une perspective qui affaiblit encore le dollar. " Cela rappelle ce qui s'est passé en 1987 ", indique Anton Brender, directeur des études économiques chez Dexia. En 1987, l'effondrement du billet vert et un désaccord entre autorités monétaires avaient contribué à un krach boursier historique.

Une répétition de 1987 est-elle possible? " On pense un jour que c'est la crise de 1929, et le lendemain que c'est fini ", philosophe M. Brender. Pour l'économiste, une chose est néanmoins certaine : " Rien n'est réglé. "

Claire Gatinois.

http://www.lemonde.fr/economie/article/2008/06/27/subprimes-petrole-immobilier-le-triple-choc-qui-secoue-les-places-boursieres_1063490_3234.html#ens_id=1049228

2.Posté par Elie Arié le 28/06/2008 01:25
Petit complément sur la politique de santé (voir l'annexe à la motion d'orientation):

La gauche doit cesser de prêcher et de militer, contre tout ce qu'elle ferait si elle était au pouvoir: la déception n'en serait que plus grande.

Un thème récurrent est celui du combat contre la fermeture des petits hôpitaux, dits "de proximité": sans soutenir ouvertement ceux qui sont engagés dans ces combats d'arrière-garde (et pour cause!) la gauche a le tort de ne pas les décourager.

On sait pourtant que les regroupements d'hôpitaux, leur mise en réseau, la définition de "qui fait quoi" a été courageusement initiée par la gauche, et sera continuée par elle si elle revient au pouvoir; on sait que la FHF, Fédération Hospitalière de France, qui représente les hôpitaux publics, et qui est dirigée par l'ancien Ministre socialiste de la santé et de la sécurité sociale Claude Evin, soutient cette évolution; on sait que l'époque de l'"hôpital qui fait tout" est révolue; on sait que, plus l'activité d'un hôpital est faible, moins la sécurité y est garantie; et qu'une maternité qui fait moins de 300 accouchements par an, c'est-à-dire moins d'un accouchement par jour, est une maternité à risques; on sait que ceux qui manifestent contre la fermeture de ces petits hôpitaux et de ces petites maternités ne le font que pour préserver l'emploi local, mais que, lorsque eux-mêmes doivent se faire hospitaliser ou accoucher, ils vont dans des grands centres...et qu'ils ont raison; on sait que la France manque cruellement (et manquera de plus en plus, avec le vieillissement de la population) de maisons de retraite médicalisées, d'hôpitaux de moyen et long séjour, de centres de rééducation, pour lesquels la proximité est indispensable.

Alors, il faut avoir le courage de ne pas entretenir les illusions de ceux qui s'imaginent que la gauche au pouvoir soutiendra leurs combats archaïques, et subventionnera l'emploi local aux dépens de la sécurité.


Il n’y a, en effet, pas grand’chose à redire :

- sur le « plan Larcher » sur les hôpitaux,

-sur le financement des hôpitaux à partir de leur activité réelle, médicale, mais aussi sociale (budgétisée dans l’enveloppe spécifique MIGAC),

- sur la volonté de fondre les Agences Régionales de l’ Hospitalisation avec les Unions Régionales des Caisses d’ Assurance-Maladie pour constituer des Agences Régionales de Santé, de façon à harmoniser la médecine de ville avec la médecine hospitalière…une vieille revendication de la gauche, qui figure dans tous ses programmes-santé depuis 10 ans !

Rien , non plus, à redire sur le principe (on peut discuter des modalités d’application)

-des déremboursements de médicaments à efficacité, faible, nulle ou non démontrée : démarche rationnelle commencée sous les gouvernements socialistes, et poursuivie sous Chirac puis Sarkozy ; rien, enfin, à redire sur ces vieilles revendications de la gauche que sont

-le parcours rationalisé de soins avec un médecin-traitant,

-l’ introduction d’une part forfaitaire, non payée à l’acte, de la rémunération des médecins pour leurs activités de prévention,

- la remise en cause de la liberté totale d’installation.

C’est sur d’autres points de la politique de santé du gouvernement que doivent porter les critiques de la gauche :

1- Un parti-pris purement idéologique de privatisation, en transférant une part croissante des remboursements sur les complémentaires (assurances privées ,mutuelles, instituts de prévoyance ) aux dépens du financement par la Sécurité Sociale, qui, lui, est un financement solidaire réalisant une redistribution des revenus ( chacun paye en fonction de ses revenus pour des soins en théorie identiques) ; non seulement les franchises (qui sont, pour l’instant, plafonnées à 50 € par assuré et par an) mais l’ensemble du « reste à charge » des assurés, et qui, lui, n’est pas plafonné : dépassements des honoraires des spécialistes, tickets dits modérateurs, prothèses indispensables de toutes sortes (dentaires, auditives, lunettes, etc., dont un meilleur remboursement par l’assurance-maladie faisait d’ailleurs partie des promesses oubliées de la campagne présidentielle de Sarkozy), forfait journalier hospitalier, etc.

Une étude de la Cour des comptes réalisée à la demande du Sénat révèle que les frais de gestion des complémentaires santé atteignent 25,4%, alors que ceux de l'assurance maladie n'atteignent que 5,4%. ; il est d'ailleurs amusant qu'il ait fallu faire intervenir le Sénat et la Cour des Comptes pour découvrir un fait connu depuis longtemps, et qui peut aussi s'énoncer ainsi: les assureurs-santé, lorsqu'ils sont en concurrence, doivent consacrer 20 % de leurs frais de gestion à la publicité, au marketing, et à la recherche permanente de nouveaux adhérents...

D’autre part, cette étude montre que l’addition des différentes aides publiques consacrées à accroître le taux de couverture de la population par des assurances complémentaires s’élève à un montant total de 7,6 milliards d'euros. Ce montant représente 35% du montant des prestations complémentaires versées. Il correspond aussi au coût, pour la collectivité, du déplacement du remboursement de certaines dépenses de l'assurance-maladie obligatoire vers les assurances complémentaires. Qui a dit que le contribuable économisait lorsqu’on opérait des transferts de dépenses ?

2- Le mythe d’un financement d’organismes de lutte contre la maladie d’Alzheimer par les franchises médicales : le budget de l’ Assurance-Maladie est « un tout », et si les franchises ont pour effet d’entraîner une baisse de la consommation et des dépenses, on imagine mal un gouvernement affecter ces économies à un autre poste, et ramener ainsi à son niveau antérieur un déficit qu’il aurait réussi à combler partiellement ;

3- Le statut des cliniques, qui, devant redistribuer des profits à leurs actionnaires, peuvent, à tout moment, se retirer de ce secteur s’ils ne le jugent pas assez lucratif, et faire s’effondrer un équilibre entre public et privé que le rapport Larcher tente péniblement de mettre sur pied : comme c’est le cas de la majorité des hôpitaux privés aux Etats-Unis, ceux-ci devraient avoir le statut de Fondations, qui sont obligées de réinvestir la totalité de leurs profits ;

4- Les effets d’annonce, comme le discours de Nicolas Sarkozy tenu lors de la Conférence nationale du handicap: rien sur les méthodes, le calendrier et, une nouvelle fois, sur les moyens.



On voit donc que l’opposition a mieux à faire que de « suivre ses troupes puisqu’elle en est le chef », et de condamner les réformes qu’en réalité elle approuve (ce fut déjà le cas lors du « plan Juppé » de 1995, d’inspiration plus étatique que libérale en matière de santé, et que le gouvernement Jospin a, pour l’essentiel, appliqué sans le dire) , qu’elle regrette de ne pas avoir eu le courage de mener, et sur lesquelles elle ne reviendra évidemment pas ; mais on ne peut que s’étonner de son silence sur ses divergences pourtant profondes avec le démantèlement de l’assurance-maladie solidaire.












3.Posté par BA le 28/06/2008 13:23
La banque Barclays annonce une tempête financière, ainsi que l’effondrement de la crédibilité de la Réserve Fédérale américaine.

Barclays Capital a conseillé à ses clients de fermer les écoutilles en prévision d’une tempête financière mondiale, les avertissant que la Réserve fédérale américaine avait laissé sortir de sa bouteille le mauvais génie de l’inflation et laissé sa crédibilité chuter « au-dessous de zéro ».
« Nous sommes dans une mauvaise passe », déclare Tim Bond, le responsable du secteur boursier de la banque Barclays. « Il y a à l’heure actuelle un choc inflationniste. Cela va s’avérer très négatif pour les actifs financiers. Nous allons nous mettre en position défensive. Les investisseurs s’en sortiront bien s’ils parviennent à préserver leur patrimoine. »

Barclays Capital vient de publier ses Perspectives Mondiales, toujours très lues, où la banque estime que l’inflation aux USA devrait atteindre 5,5 % en août 2008 et que la Fed devra relever ses taux d’intérêt à six reprises d’ici la fin de l’an prochain, afin de prévenir une spirale inflationniste des prix et des salaires. Si elle hésite, les marchés obligataires devraient passer à l’action. « C’est le premier test pour les banques centrales depuis 30 ans et elles l’ont traité à la légère. Elles ont zéro crédibilité, et celle de la Fed est négative - en admettant que cela soit possible. Elle a perdu toute crédibilité », juge M. Bond.

Ce sombre verdict sur la Fed pilotée par Ben Bernanke a été confirmé par les marchés hier alors que le dollar a baissait par rapport à l’euro après la publication ce mercredi du communiqué de la Fed à la tonalité conciliante.

Les courtiers ont estimé que la Fed paraissait s’éloigner du relèvement de ses taux qui était attendu. Avec pour effet la montée du baril de pétrole à 138 dollars, confirmant ainsi sa fonction d’ « anti-dollar » et sonnant comme un reproche adressé par les marchés à la politique monétaire trop accommodante de Washington.

La décision de la Fed va se répercuter dans les 45 pays dont la devise est liée au dollar dans le monde entier, entraînant la flambée des prix des matières premières. L’inflation mondiale est passée de 3,2 % à 5 % durant la dernière année.

M. Bond juge que le monde émergent est maintenant sur le point de traverser une grave crise. « L’inflation est hors de contrôle en Asie. Le Vietnam a déjà explosé. La réponse des politiques c’est de s’en prendre au messager, comme ce fut le cas dans les pays développés à la fin des années 1960 et 1970 », note-t-il.

« Ils devront appuyer sur les freins. Il va y avoir une profonde récession mondiale au cours des trois prochaines années, pendant lesquelles les responsables essaieront de ré-enfermer l’inflation dans sa boîte. »

Barclays Capital recommande purement et simplement de prendre des positions vendeuses sur les marchés obligataires en Asie, avertissant que les rendements pourraient bondir de 200 à 300 points de base. Les devises des pays dont la balance commerciale est déficitaire, comme l’Inde devraient être vendues. La courbe des rendements US est susceptible de s’accentuer dangereusement, ce qui provoquerait un bain de sang pour les détenteurs d’obligations.

David Woo, le responsable des marchés des changes de la banque, considère que la politique de la Fed consistant à manifester un laisser-aller vis-à-vis du dollar avait été contrariée par les cours du pétrole, qui pèse désormais lourdement sur la consommation américaine. « Le monde a changé tout d’un coup. Le marché va pousser la Fed à un durcissement de sa position », prévoit-il.

La Barclays estime que les dégâts causés par la crise bancaire mondiale se mettront encore une année avant de révéler toute leur ampleur.

Rob McAdie, en charge de la stratège du secteur du crédit à la Barclays, déclare : « Les problèmes de fonds n’ont pas été traités. Nous sommes encore dans un cycle de réduction de l’effet de levier et nous voyons que les pertes continuent de monter. Nous pensons que les petites banques auront des difficultés à lever des capitaux. Nous sommes très très baissier - à long terme - sur les créances à haut rendement. Le taux de base atteindra 8 à 9 % l’année prochaine. »

M. McAdie estime que les investisseurs ont détourné leur attention de la catastrophe au ralenti qui engloutit les assureurs obligataires américains, ou « monolines ». Dans leur ensemble, ces entreprises garantissent 170 milliards d’instruments de crédit structuré et 1000 milliards d’obligations émises par les villes américaines et les institutions publiques.

Les deux majors du secteur - MBIA et AMBAC - ont déjà été déclassées par les agences de notation qui sont devenues plus strictes sur le tard. Le risque réside dans le fait qu’une deuxième baisse de leur note pourrait déclencher une nouvelle vague de difficultés pour les banques. « La solvabilité de nombreuses institutions financières américaines diminuera dans les mois à venir », avertit-il.

La banque a également mis en garde au sujet de l’industrie automobile qui est susceptible de faire face à une crise avec la hausse du prix de l’acier du pétrole. « Leur modèle d’entreprise devra être substantiellement modifié si elles veulent survivre », déclare M. McAdie.

Une petite cohorte de banquiers de la City ne partage cependant pas l’opinion que l’inflation est le principal danger aux États-Unis et dans les pays de l’OCDE. Les équipes de la Société Générale, de la Dresdner Kleinwort, et de la Banque AIG avertissent que la déflation pourrait s’installer lorsque les marchés immobiliers vont s’effondrer sous le poids des niveaux record d’endettement des ménages.

Bernard Connolly, analyste stratégique mondial à la Banque AIG, considère que le ciblage de l’inflation par les banques centrales est devenu une forme de « totémisme qui menace de broyer l’économie mondiale ».

Pour lui ce serait une folie que de créer des millions de chômeurs en déflatant une partie de l’économie afin de compenser une hausse des importations de carburants et des prix des produits alimentaires. Les salaires réels sont compressés par le prix des hydrocarbures, qu’advienne que pourra. Il pourrait être plus sain pour la société de laisser les choses agir en douceur.

Ambrose Evans-Pritchard, The Telegraph, 27 juin 2008.


http://www.telegraph.co.uk/money/main.jhtml?xml=/money/2008/06/27/cnbarclays127.xml

4.Posté par Elie Arié le 28/06/2008 17:33
Santé (suite): réflexion que j'assume, et qui émane pour l'essentiel de gens tenus à l'obligation de réserve par leurs fonctions:


La tarification à l'activité est intrinsèquement une bonne chose. En gros, on répartit l'Objectif National des Dépenses d'Assurance Maladie entre les établissements en fonction de leur activité réelle, et non plus en fonction d'un budget reconduit à l'identique depuis 20 ans, au mépris des évolutions démographiques de chaque territoire. L'assurance maladie paie désormais un forfait fixe par Groupe Homogène de Séjours (par exemple, une même somme pour chaque appendicectomie sans complication sur un sujet de 15 à 60 ans).

Ce qui suppose de savoir précisément ce que coûte chaque activité d'un hôpital donné, et de ce caler sur des pratiques moyennes nationales (tant de jours, de temps médical, de temps infirmier, de coûts administratifs, de temps de bloc opératoire pour mon appendicectomie) pour ne pas perdre d'argent sur un séjour. Ou bien faire des choix stratégiques : un hôpital doit être à l'équilibre dans son ensemble, pas sur chacune de ses activités.

Il peut choisir d'équilibrer ses activités non rentables, mais correspondant à des exigences de service public, avec des activités rentables (toutes les réanimations ayant un taux d’occupation inférieur à 50 % sont déficitaires, ça ne veut pas dire qu'on les ferme). Pour prendre les décisions de ce type, la loi permet désormais un dialogue constructif entre ceux qui utilisent et qui fournissent par leur activité la ressource d'un établissement (les médecins) et ceux qui la gèrent (l'administration). Ce dialogue est incontournable dans un système contraint, qui doit être géré et non plus administré.

Ce ne sont pas les réformes en cours qui augmentent la durée de vie, et par là-même le besoin de soins, ni la technicité de la médecine. Chaque année le Parlement doit voter un Objectif National des Dépenses d'Assurance Maladie croissant. Le vrai choix de société, c'est le niveau de cet ONDAM, et pas la façon dont on répartit les ressources ainsi définies entre les hôpitaux. On sait qu'on n'a plus assez pour soigner tout le monde avec les structures actuelles. Que faire ? Dire "Il faut des moyens" ? Peut-être, mais il faut voir lesquels, et jusqu’à quel niveau, si on ne veut pas se cantonner au classique « demander plus à l’impôt et moins au contribuable ».

Le deuxième axe de réflexion, c'est réformer non plus les règles de financement, mais les structures hospitalières. Car la tarification à l'activité n'est qu'un outil de redistribution entre les structures existantes.

En gros, accepter de regrouper les activités de court séjour (médecine et chirurgie aigües) sur des gros plateaux techniques de territoire qui permettent une meilleure qualité de soins et des économies d'échelles (en plus d'être plus attractifs pour des médecins qui refusent de plus en plus de travailler en petites équipes pour partager les gardes et les astreintes). Pour les petites communes, garder des antennes d'urgences,des services de médecine polyvalente et du moyen séjour, en plus d'activités de gériatrie.

Ce système ressemble plus à ce qui se fait ailleurs, et garantit aux communes qui cèdent une partie de leurs activités de court séjour de conserver l'emploi local. En gros, la France est sous-dotée en gériatrie et moyen séjour, mais surdotée en court séjour par rapport à ses voisins. Les patients âgés et les patients de réadaptation/rééducation ne sont pas pris en charge dans les lits (et par les personnels) les plus adpatés, et en plus coûtent plus cher à l'assurance maladie quand ils sont hébergés dans des lits "surmédicalisés" (là où les équipes savent utiliser les équipements complexes, mais pas stimuler ou toiletter un vieux).Perdant/perdant.

Aujourd'hui, on a réformé les règles du jeu, mais contrairement à ce que disent Patrick Pelloux et Jean-Pierre Pernaut (étrange collusion de fait),on avance très peu sur les réorganisations territoriales. Parce qu'au pays de Clochemerle, les élus locaux, qui prennent les décisions importantes via les Conseils d'Administration, ne sont jamais d'accord sur les projets de réorganisation territoriale, et préfèrent voir crever à petit feu leur hosto.

De son côté, l'État peut imposer les rapprochements, mais ne le fait pas non plus du fait du même défaut de courage politique. Ce qui fait que tout le monde y perd. Le statu quo est absolument destructeur. J'ai 50 exemples en tête : ce sont les mêmes élus, de droite comme de gauche, qui manifestent avec leurs écharpes tricolores pour sauvegarder une maternité où ils n’enverraient pas accoucher leur chatte, et qui reconnaissent en petit comité qu'ils n'ont pas le choix à 1/2/3 ans des élections. Et qu'ils envoient leur famille se faire soigner au CHU, parce que leur hosto est une calamité. Ce n'est pas l'idéologie dominante aujourd'hui qui crée l'hôpital à 10 vitesses : il existe depuis longtemps.

Restent des propositions valables : pourquoi ne pas réajuster les nouvelles règles de financement pour mieux prendre en compte les spécificités du public ? Deux aspects doivent être travaillés, et l'article les relève : la part de forfait pour les missions de service public dans le financement à l'activité, et la remise en cause de la convergence entre tarifs versé au public et au privé pour une même prestation. Cette convergence tarifaire est un vrai cauchemar.

Car le vrai problème pointé par ce genre de collectifs, ce sont les rapports entre public et privé. Et là, il y a beaucoup à dire. En gros, le public a encore pas mal de marge pour s'organiser aussi bien, c'est absolument indéniable, mais même s'il y parvenait un jour les dés resteraient pipés. Le privé n'a aucune contrainte, et il finira par toucher autant que l'hôpital pour chaque séjour réalisé. Il peut embaucher des personnels 5 fois plus rapidement, et se débarrasser de ceux qui plombent le travail des équipes.

Il peut pénaliser un praticien qui arrive 1 heure en retard au bloc alors qu'une équipe entière l'attend parce qu'il veut finir ses 18 trous. Il peut ouvrir ou fermer une activité avec la même célérité. Il n'a pas de missions de service public ultra onéreuses à assurer. Il peut s'engager auprès d'un hôpital qui bat de l'aile à boucler un partenariat dont il pourra in fine se retirer quand il voudra. Là où le système est incompréhensible (ou bien hélas l'est-il bien trop), c'est qu'il tolère ces déséquilibres et fait comme s'ils n'existaient pas.

Le vrai problème que pose l’hôpital privé est que, devant distribuer des profits élevés à court terme à ses actionnaires, ceux-ci peuvent, à tout moment, décider de se retirer de ce secteur s’ils ne le jugent plus assez rentable, comme ils viennent de le faire en Italie, et ruiner en une journée le laborieux équilibre entre public et privé que le rapport Larcher essaye de mettre sur pied ; nous serions à l’abri de ce risque si, comme aux Etats-Unis, la majorité de nos hôpitaux privés avaient le statut de Fondation, et devaient obligatoirement réinvestir tous leurs profits : mais « la question ne sera pas posée »…



5.Posté par la fourmi rouge le 29/06/2008 13:13
.oui, il n'assure aucune greffe de coeur,... ultra coûteuse, par exemple.

Très intéressants vos posts E.Arié.

6.Posté par Elie Arié le 29/06/2008 14:20
Sur les retraites (le chapitre "Protection sociale" du MRC est vraiment léger à ce sujet):

L'approche de Ségolène Royal, à partir du "système suédois", est sans doute la bonne, car c'est tout de même celui qui sert les retraites les plus élevées au monde, bien supérieures à celles des Français.

Ce système part de constats incontournables:

-la disparition progressive (qui ne sera jamais totale) des métiers physiquement pénibles, délocalisés ou remplacés par des machines,

- l'allongement non seulement de l'espérance de vie, mais de l'état intellectuel des plus de 60 ans (dont la plupart des politiques donnent un bon exemple, excellent démenti au postulat de certains selon lequel "on ne peut plus travailler après 60 ans"),

- l'impossibilité de maintenir des avantages acquis à l'époque où cette espérance de vie était inférieure à l'âge de la retraite (65 ans).

En gros, le système suédois sert des retraites d'autant plus élevées:

-qu'elles sont prises plus tardivement, entre 60 et 70 ans, au libre choix de chacun,

-qu'on a exercé une profession à l'espérance de vie plus courte, seule façon objective de mesurer la pénibilité.

Mais il se heurte, en France, à la politique des entreprises consistant à se débarrasser des plus de 50 ans: à 60 ans, 2 Français sur 3 ne travaillent plus, cette inactivité étant le plus souvent subie et non choisie: dans ces conditions, reculer l'âge de la cessation d'activité pour pouvoir bénéficier d'une retraite à taux plein revient, en fait, à diminuer le nombre de ceux qui la toucheront, et à accroître non pas la durée du travail mais celle du chômage (même si on le baptise "pré-retraite").

Il faut donc encourager la politique actuelle du gouvernement (eh oui!) d'inciter les entreprises à ne pas "dégraisser les seniors".

Et, surtout, tordre le cou à l'idée selon lequel le passage à la retraite par capitalisation résoudrait par miracle le problème, en créant des richesses à redistribuer qui n'existent pas; ce discours-là est essentiel, et il convient de développer, de marteler et de vulgariser l'excellente analyse de Jean-Paul Fitoussi que je reproduis ci-dessous dans son intégralité:




Retraites : le vrai problème c'est le chômage


Jean-Paul Fitoussi pour Le Monde du 06-06-01

L'URGENCE de la question des retraites naîtrait de l'exigence morale de ne pas faire peser sur les générations futures la charge insupportable de faire vivre la population inactive. Or il n'existe aucun moyen financier de réduire cette charge, aucun changement de régime qui permettrait d'aboutir à pareil résultat. La question des retraites est une question réelle, le partage, année après année, du revenu national entre actifs et inactifs. Si la population âgée de plus de dix-huit ans est de cent et qu'il existe trente inactifs, il faudra affecter, quel que soit le régime, une part de la production nationale à la survie des « vieux », disons 20 % (car les actifs doivent aussi subvenir aux besoins des jeunes), si l'on veut que les retraités aient le même niveau de vie que la moyenne des actifs. Certes on peut faire en sorte que cette part soit la plus faible possible, bien inférieure par exemple à 20 %, mais cela signifie que l'on accepte une sérieuse dégradation du sort des retraités, au profit transitoire des générations actives présentes, qui auront moins à cotiser.

Ce bénéfice n'est que passager, car ces mêmes générations se trouveront bien dépourvues lorsqu'elles seront à la retraite. Il n'existe aucune raison pour que les nouvelles générations actives acceptent ce que les anciennes ont refusé, à savoir un prélèvement supérieur sur leurs revenus. En fait, en arbitrant immédiatement au profit de leur s revenu d'activité, et au détriment s des générations déjà à la retraite, les générations actives arbitrent en même temps à leur détriment lorsqu'elles-mêmes seront plus âgées. C'est en ce sens que les cotisations aux régimes de retraites constituent un revenu différé, et non une charge. Le montant des cotisations détermine directement le niveau de vie pendant toute la période de retraite.

On comprend mieux maintenant que rien dans cette affaire ne relève de la générosité, mais d'un arbitrage entre présent et futur auquel procèdent les individus. Si je ne contribue en rien aujourd'hui, je n'aurai rien demain, lorsque j'aurai cessé toute activité. Pour dire les choses de façon plus emphatique, si aujourd'hui je renie mes parents, je m'ex- pose au risque d'être renié par mes enfants.

>C'est pure myopie que de considérer les contributions aux régimes de retraite comme autant d'amputation du pouvoir d'achat. Elles consistent en réalité à lisser le niveau de consommation pendant toute la durée de vie. Plus aujour- d'hui signifie moins demain, et vice versa. C'est parce que nous vivons dans des sociétés qui ont perdu le sens du long terme, où l'avenir est déprécié, que nous avons tendance à percevoir les prélèvements pour la retraite comme autant d’amputations de notre train de vie. Et que nous considérons que bous sommes plus pauvres parce que nous vivons plus longtemps ! Mais j'entends souvent dire que la création d'un régime par capitalisation permettrait à la fois d'enrichir les actifs, dont l'épargne (et donc le patrimoine) croîtrait, et de soulager les générations futures, dont les cotisations n'auront pas à augmenter. Un vrai miracle, en ce sens que toute la chaîne des générations en profiterait. Examinons ce tour de force de plus près. Les actifs devront contribuer à des fonds de pension, ce qui est équivalent à une augmentation des cotisa- tions et donc à une baisse du revenu disponible. Certes, en contrepartie, ils acquièrent des droits à pension, c'est-à-dire une part de pro- priété sur la production des générations à venir. Mais alors ces dernières subiront, comme dans un régi- me par répartition, un prélèvement sur la production réalisée grâce à leur travail. C'est ce travail, et lui seul, qui permettra de rémunérer l'épargne des individus qui auront cessé toute activité de production. La capitalisation ne peut donc pas, à l'échelle de la société, réduire la contribution des actifs au financement des retraites et se substituer aux transferts intergénérationnels directs (entre générations actives et retraitées vivant au même moment). S'il n'est pas possible d'échapper à ces transferts, leur montant dépend directement du rapport entre inactifs et actifs et s'élève nécessairement lorsque ce rapport augmente. Dans le demi-siècle à venir, il est de l'ordre de la certitude que ce rapport augmentera, sous l'effet transitoire de l'arrivée à l'âge de la retraite des générations du baby- boom, mais surtout sous l'effet permanent des variables démographiques : baisse de la fécondité et allongement de la durée de vie. Il est de nombreuses façons de faire face à une telle situation, toutes impliquent un arbitrage entre la consommation pendant la vie active et celle pendant la période de retraite.

QUATRE SOLUTIONS

La première consiste à ne rien changer au système et à laisser les cotisations augmenter au fur et à mesure que s'accroît le nombre de retraités relativement à celui des actifs. Parce que ce rapport, aujou d'hui de 0,52, ne commencera à augmenter qu'à partir de 2006 (voi- re 2010 si la situation du marché du travail continue de s'améliorer), pour passer à 0,64 en 2020 et à 0,84 en 2040, la question n'a pas l'urgence que certains affirment pour inquiéter les gens et les pousser vers des arrangements privés. Le contrat intergénérationnel est alors clair : chaque génération accepte la charge de ses parents, sachant qu'elle sera supportée par ses enfants parvenus à l'âge adul- te. Les variations démographiques peuvent engendrer d'apparentes inégalités au profit des générations qui ont eu beaucoup d'enfants comme celles qui sont parvenues à l'âge de la retraite dans les années 1980. Mais ces inégalités sont pour ainsi dire équitables, ces générations ayant accepté, au détriment de leur niveau de vie, d'accroître leurs transferts vers les jeunes. Contrairement aux affirmations de certains, un tel système n'est nullement défavorable à la croissance. Les cotisations des uns étant le revenu des autres, la dépense glo- bale n'en est en rien affectée. Mais, entend-on dire aussi, l'augmentation des prélèvements réduit les incitations au travail, et diminue donc les capacités d'offre de l'économie. A quoi bon travaiUer davantage si l'Etat prélève une part aussi importante de mes revenus ? C'est un très mauvais argument car il est fondé sur l'hypothèse d'individus-cigales qui ne perçoivent pas que les cotisations de retraite ont pour contrepartie une augmentation de leurs revenus quand ils seront vieux. Une deuxième solution revient à ajouter un étage de capitalisation au dispositif actuel sans augmen- ter les cotisations. Il implique, qu'on le dise ou non, le sacrifice de quelques générations, celles qui sont à l'âge de la retraite ou pro- ches de l'être, sans que l'on perçoive de façon claire le bénéfice qu'en retireront les autres générations.

Le fait de ne point augmenter les cotisations alors que s'accroît le nombre des retraités signifie une détérioration relative du sort de ces derniers. D'un autre côté, les générations actives verront de tou- tes les façons s'accroître leurs prélèvements en vue de la retraite. Certes, leurs cotisations au régi- me de répartition resteront stables, mais il faudra bien qu'elles contribuent aux fonds de pension, seule façon pour elles d'acquérir des droits supplémentaires sur les générations futures. Le changement de système ne se fait donc pas au profit de ces dernières, sauf à prouver qu'un système par capitalisation est plus favorable à la croissance, question qui est loin d'être tranchée. Si tel est le choix de la société, il est préférable de mettre en place le nouveau système le plus tôt possible afin que les sommes capitalisées permettent effectivement d'abonder les retraites des généra- tions actives lorsqu'elles auront cessé de travailler. Mais on perçoit alors un second inconvénient de la solution : les sommes affectées à la capitalisation sont soustraites en grande partie à la consommation, puisqu'elles ne servent pas, comme dans la solution précédente, à abonder directement le revenu des retraités actuels. Elles impliquent donc une augmentation du taux d'épargne à un moment où une tel- le augmentation n'est pas nécessai- rement bienvenue.

Une troisième solution est que les générations actives « fassent » plus d'enfants ! Ainsi pourront- elles reruser de voir leurs cotisations augmenter, tout en étant assurées qu'avec le même taux de cotisation elles disposeront d'une retraite plus élevée que celle de leurs parents, qui comme dans la solution précédente sont plus ou moins sacrifiés. Cette « solution » ne réduit pas la charge des transferts intergénérationnels qui pèse sur les générations actives, la réduction des transferts vers les vieux étant compensée par l'aug- mentation des transferts vers les jeunes. Elle n'est pérenne que si les générations à venir font le même choix en termes de fécondi- té que leurs parents. Autrement elle leur posera un problème analogue à celui du « papy-boom » actuel. On perçoit ainsi une vérité élémentaire :. moins de cotisations, c'est-à-dire moins de trans- ferts vers les vieilles générations, implique plus d'enfants et donc plus de transferts vers les jeunes générations. La dernière solution pour alléger la charge des générations futures serait de modifier le taux de dépendance, c'est-à-dire le rapport entre retraités et actifs : un an de recul de l'âge du départ à la retraite représente une économie de 5 % sur les prestations. Si, par exemple, l'âge de la retraite était porté à soixante-cinq ans, le ratio du nombre des retraités à celui des actifs serait, en 2020, inférieur à ce qu'il est aujourd'hui, ce qui permettrait une baisse des cotisations. En 2040, toutefois, l'augmentation des cotisations redeviendrait inévitable, mais dans une pro- portion bien moindre que dans l'hypothèse où une telle réforme n'était pas mise en œuvre. Le recul de l'âge de la retraite implique aussi que le nombre de personnes au travail et donc la production soient plus élevés. Dans un contexte où l'espérance de vie augmente et où les gens vivent plus longtemps en bonne santé, qu'est-ce qui s'oppose au recul de l'âge de la retraite ? La réponse est le chômage et la désaf- fection des entreprises pour le travail des personnes que paradoxalement on considère comme vieilles, c'est-à-dire âgées de plus de cin- quante ans, et dont le taux d'activi- té est particulièrement bas en France. On sait que le chômage touche de façon disproportionnée les âges extrêmes : les jeunes et les « vieux ». S'il n'était pas porté remède au chômage, le recul de l'âge de la retraite ne servirait à rien. Cela reviendrait à demander aux gens de travailler plus longtemps alors qu'ils manquent déjà de travail. Par contre, l'emploi des catégories les plus âgées de la population active est grandement facilité lorsqu'il n'existe pas de chômage parmi les jeunes. C'est une condition néces- saire, mais non suffisante, car il fau- drait aussi que le système de valeur qui préside à l'emploi en nos socié- tés évolue, et que l'on parvienne à faire aussi bien que ce que d'autres sociétés accomplissent déjà : atta- cher de la valeur à l'expérience. Si ces deux conditions étaient réu- nies, il n'y aurait aucune augmentation de la charge sociale, le léger accroissement des cotisations de retraite étant compensé par la bais- se des autres charges sociales (chômage et famille).

INÉGALITÉS ENTRE GÉNÉRATIONS

Des quatre solutions que nous venons d'envisager, aucune ne parvient vraiment à alléger la charge des générations actives ou futures, et certaines se traduisent par une détérioration de la situation des retraités et de ceux qui sont pro- ches de l'âge de la cessation d'activité. La dernière solution ne réduit la charge financière qu'au prix d'un accroissement de la charge réelle, à savoir le temps de travail nécessaire pour bénéficier d'une retraite à taux plein. Mais il s'agit là d'un arbitrage que la société doit être libre de faire. Et elle en a les moyens, car quelle que soit la solu- tion choisie, le pouvoir d'achat net de toutes les générations continuera de croître. Dans l'hypothèse apparemment la plus « coûteuse », à savoir la première, où il ne serait pas touché à l'âge de la retraite, Gaël Dupont et Henri Sterdyniak ont montré que les cotisations devront augmenter de 7,5 points sur trente ans (entre 2006 et 2036), soit de 0,25 point par an (Revue de l'OFCE, n° 68, jan- vier 1999). Pendant la même période, la productivité du travail aug- mentera au moins de 1,75 % l'an. Autrement dit, les revenus nets, au lieu d'augmenter à ce taux, n'aug- menteront «que» de 1,5% par an : sur trente ans, le niveau de vie moyen de la population augmentera de 56 % au lieu de 68 % dans l'hy- pothèse où l'âge de la retraite serait repoussé de cinq ans. Les inégalités entre générations ne viennent pas du « problème » des retraites mais de l'emploi. C'est la situation de chômage de masse qu'a connu l'Europe pen- dant plus de vingt ans qui a contri- bué à accroître les inégalités de des- tin entre les générations, certaines ayant eu plus de difficultés que d'autres à s'intégrer par le travail. Il ne faudrait pas que, sous prétexte d'équité intergénérationnelle, nous réglions cette question par l'absurde, en laissant se dégrader le sort relatif des retraités. Or c'est ce que nous sommes en train de faire ou de laisser faire, en ayant accepté que les retraites ne soient indexées que sur les prix et non plus sur les salaires. Nous avons probablement oublié en chemin que nous Sommes tous de futurs retraités.

Jean-Paul Fitoussi pour Le Monde





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