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L’intercommunalité: une œuvre de longue haleine


Intervention de Jean-Pierre Chevènement au Sénat lors du débat sur la proposition de loi "assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale" le 20 février 2012.


L’intercommunalité: une œuvre de longue haleine
Il est bon que les dispositions relatives à l’intercommunalité puissent faire l’objet d’un vote consensuel.
Pour cela, le gouvernement a fait une concession importante. Il a de fait renoncé aux pouvoirs spéciaux accordés aux Préfets pendant l’année 2012. Le pouvoir d’avis et d’amendement des CDCI est prolongé jusqu’en juin 2013, tant qu’un schéma directeur de la coopération intercommunale n’a pas été adopté. Lors du débat organisé au Sénat, le 9 novembre 2010, je vous avais moi-même conseillé de renoncer à ces pleins pouvoirs préfectoraux qui ne conviennent pas à l’esprit de l’intercommunalité. Vous aviez choisi, vous disais-je alors, d’ « utiliser un marteau pilon pour écraser une mouche ».
Vous avez heureusement retiré de votre arsenal le marteau-pilon. Les préfets ont un pouvoir de conviction suffisant par eux-mêmes et les élus ont un sens de la responsabilité que nul ici ne contestera.

La proposition de loi, qui nous est transmise par l’Assemblée nationale doit doute à M Pélissard et aux travaux de l’AMF. Elle doit beaucoup aussi à la proposition de loi sénatoriale de M Jean-Pierre Sueur dont je salue la contribution décisive. La commission des lois, selon le rapport de M Alain Richard, considère que les ultimes réglages, auxquels il a été procédé, remplissent l’essentiel des objectifs que la proposition de loi sénatoriale s’était assignés et qu’il n’y a donc pas lieu de prolonger le débat.

Les mandats des membres des bureaux des EPCI sont préservés jusqu’à 2014 dans des conditions qui seront réglées soit par délibération de l’EPCI soit à défaut, sur décision du Préfet.
Il en va de même pour les suppléants, les dispositions antérieures étant maintenues jusqu’en mars 2014.

Mais c’est évidemment la consultation obligatoire de la CDCI qui est le cœur du projet qui nous est soumis. La préservation de son pouvoir d’amendement est essentielle, y compris en l’absence de schéma arrêté. La proposition de loi prévoit aussi de porter de 3 mois à deux ans le délai fixé à l’EPCI à fiscalité propre résultant d’une fusion, pour se déterminer sur les compétences facultatives exercées précédemment par les groupements dissous, en lui ouvrant la possibilité de n’en exercer qu’une partie et de restituer le surplus aux communes : c’est le temps qu’il faut pour mener à bien les concertations nécessaires.

Je me réjouis de voir progresser ainsi l’intercommunalité. L’achèvement de la carte de celle-ci était certainement la partie de la loi portant réforme des collectivités territoriales qui posait le moins de problèmes. En tout cas, il est satisfaisant de saluer à ce jour la disparition d’une centaine d’enclaves ou de discontinuités territoriales, et l’entrée de 1200 communes isolées dans des intercommunalités, la réduction d’environ 20 % du nombre des EPCI et l’augmentation de 24 % de leur population moyenne vont dans le sens d’un progrès de la solidarité financière et de la cohésion territoriale.

Je me réjouis, par ailleurs, de voir qu’à ce jour huit pôles métropolitains ont été constitués. Cette formule donne une visibilité certaine à nos grandes agglomérations, même si par ailleurs, seule une métropole – celle de Nice – a été constituée. Faut-il s’en étonner ? Il fallait s’attendre à ce que les régions et les départements ne se laissent pas facilement étêter.

L’intercommunalité est une œuvre de longue haleine. Une première clause de rendez-vous a été fixée à 2015. C’est une bonne chose. Il y a toujours des progrès à faire : certaines communautés de communes ne disposent pas de ressources suffisantes, alors que d’autres situées à proximité sont beaucoup plus riches. Il y a encore des regroupements à opérer.

Ultérieurement à 2015 d’autres clauses de rendez-vous interviendront, à intervalle de six ans, c’est-à-dire l’année qui suivra le renouvellement des conseils municipaux. L’intercommunalité est une œuvre d’ampleur qui doit permettre un meilleur aménagement du territoire et la mise en œuvre de politiques permettant d’améliorer la mixité sociale, notamment dans le domaine de l’habitat. Surtout elle est, je le crois, la bonne réponse apportée au problème spécifique à la France des 36 600 communes. La commune doit rester l’échelon de base de la démocratie. Il faut la préserver. L’intercommunalité le permet en créant un échelon stratégique pertinent pour la mise en œuvre de politiques efficaces.

Mesurons le chemin parcouru en vingt ans depuis la loi de 1992 dite Joxe-Marchant-Baylet qui a été une réussite en milieu rural, la loi de juillet 1999 qui a permis la création de 170 communautés d’agglomérations et de plusieurs communautés urbaines nouvelles ainsi que de nombreuses intercommunalités autour de gros bourgs ou de villes petites et moyennes jusqu’à la loi du 16 décembre 2010 rectifiée qui va permettre d’achever sur tout le territoire la carte de l’intercommunalité. Et tout cela s’est réalisé avec des majorités très larges voire à l’unanimité des assemblées parlementaires. Veillons à ce que cet esprit consensuel se maintienne et se prolonge sur le territoire, car c’est le gage d’une réussite véritable.


Rédigé par Chevenement.fr le Lundi 20 Février 2012 à 18:00 | Lu 3819 fois


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