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"Je suis un candidat patriote"


Entretien de Jean-Pierre Chevènement au Parisien / Aujourd'hui en France, dimanche 6 novembre 2011.


"Je suis un candidat patriote"
Jean-Pierre Chevènement a officialisé ce samedi soir au journal télévisé de France 2 sa candidature à l'élection présidentielle de 2012. Dans une interview au «Parisien» - «Aujourd'hui en France», l'ancien ministre, président d'honneur du Mouvement républicain et citoyen (MRC), dessine les axes de sa future campagne.

Le Parisien: Vous êtes donc candidat ?
Jean-Pierre Chevènement
: Oui. J’ai beaucoup réfléchi, écouté. Et je suis candidat à l’élection présidentielle pour faire bouger les lignes. Ma candidature se veut pédagogique à l’égard des citoyens mais aussi des autres candidats. Ceux qui nous dirigent ne sont malheureusement pas préparés à faire face aux secousses très fortes qui sont devant nous.

La crise que traverse le pays a-t-elle été l’élément déclencheur ?
Assurément car cette crise est sous- analysée. Voilà vingt ans, j’ai pris position contre le traité de Maastricht que tous ceux qui nous dirigent ont soutenu. Le vice est dans la conception de la monnaie unique : on ne peut pas transférer la souveraineté monétaire de 17 pays très différents par leurs structures économiques, leurs langues et leurs options politiques à un aréopage de banquiers centraux, irresponsables et obnubilés par l’inflation. Après hier, le défaut partiel de la Grèce, aujourd’hui l’Italie, demain l’Espagne, ce qui nous menace, c’est une récession généralisée ! Nicolas Sarkozy ne nous offre qu’une austérité à perte de vue : son horizon est le maintien du triple A . La souveraineté populaire a été transférée aux agences de notation ! Quant à François Hollande, il promet de réduire le déficit budgétaire à 3 % du PIB en 2013 sans remettre en cause la logique actuelle de la monnaie unique. Pour sortir de l’impasse, la solution consiste à donner à la Banque centrale européenne les mêmes prérogatives que la Banque centrale américaine afin qu’en rachetant les titres de dette des Etats, elle puisse casser la spéculation et doper la croissance.

Etes-vous le candidat de la fin de l’euro ?
L’abandon de la monnaie unique au profit d’une monnaie commune n’est pas un tabou pour moi, si l’Allemagne persiste dans son refus d’étendre les missions de la Banque centrale. La monnaie unique, qui méconnaît les réalités nationales, a creusé un gouffre entre une Allemagne industrielle et excédentaire et les économies du sud de l’Europe, déficitaires et en voie de désindustrialisation. Si la Grèce et surtout l’Italie devaient un jour faire défaut, ce serait le début d’un processus de dissociation de la monnaie unique. Il faudrait alors préparer le passage le plus harmonieux possible de la monnaie unique à une monnaie commune. Celle-ci utilisable dans les échanges extérieurs coexisterait avec des monnaies nationales réservées aux transactions intérieures.

Quels sont les points clés de votre programme ?
Nos dirigeants sont comme ceux de 1940 : ils ne sont pas préparés à faire face à des événements qu’ils ne comprennent pas, car ils sont la conséquence des choix faits par eux il y a vingt ans. Quatre repères d’intérêt vital pour la France et pour la République motivent ma candidature. D’abord une monnaie moins chère : l’euro, surévalué de 25 %, écrase notre compétitivité. Notre base industrielle, sans laquelle nous ne pourrons maintenir une protection sociale efficace, a rétréci de moitié depuis trente ans. Deuxièmement, la croissance plutôt que la récession. Troisièmement, la sauvegarde de notre souveraineté budgétaire et fiscale : notre dissuasion nucléaire elle-même peut être menacée par des restrictions budgétaires. Enfin, une France forte est nécessaire pour construire une Europe européenne appuyée sur les nations. L’Europe n’est pas mûre pour une fédération qui serait aujourd’hui un espace essentiellement disciplinaire : le « saut fédéral » que certains préconisent à droite comme à gauche serait un saut dans le vide, sans élastique et sans retour. Ce qu’il faut, c’est une Europe européenne à forme confédérale.

Le projet socialiste vous paraît-il à la hauteur de l’enjeu ?
Il y a quelques bonnes idées mais il est irréalisable dans un contexte de croissance réduite à 1 %, et encore… Son défaut est de ne pas chercher une issue progressiste à la crise de l’euro.

François Hollande a-t-il les épaules pour diriger le pays dans un contexte de crise grave ?
L’expérience, cela s’acquiert… François Hollande est un homme fin et intelligent. Mais, en fidèle héritier de Jacques Delors, il a été pour le traité de Maastricht, puis pour la Constitution européenne. Je ne suis pas candidat contre François Hollande. Je veux aider la gauche et la France à se mettre à la hauteur des défis. Cela ne peut se faire autrement que sur la place publique : il faut un dialogue ouvert et franc. Je tiendrai un discours de vérité pour éviter toute déception ultérieure.

Le candidat socialiste a déjà mis en garde contre les risques d’éparpillement de la gauche…
Nous n’en sommes pas là. Ma voix manquerait si on ne l’entendait pas s’élever aujourd’hui. Je ne suis motivé que par le souci de servir le pays dans une période critique. Pourquoi la voix de Mme Joly serait-elle légitime et pas la mienne ?

Un nouveau 21 avril 2002 est-il possible ?
En 2002, déjà, j’ai mis en garde contre l’omnipotence des marchés financiers, j’ai proposé une politique industrielle, le redressement de l’Europe, des repères clairs pour l’école, la sécurité, l’intégration : je n’ai eu le tort que d’être en avance sur les événements. Ceux qui, depuis des décennies, ont fait le lit du Front national par leur ralliement au néolibéralisme essaient de renverser les rôles pour me faire porter le chapeau. Une voix républicaine doit s’élever pour proposer une politique conforme à l’intérêt national. Elle fera barrage au Front national.

Le patriotisme n’est-il pas un peu vieux jeu ?
Non. Le patriotisme, c’est l’amour des siens, le nationalisme, c’est la haine des autres. La nation est le cadre irremplaçable de la démocratie et de la souveraineté. Je suis un candidat patriote, ce qui ne m’empêche pas de vouloir redresser l’Europe.

En cas de victoire en 2012, seriez-vous prêt à participer à un gouvernement de gauche et des écologistes ?
Je ne demande rien pour moi-même. Je veux débattre, y compris avec les écologistes. Qui sait que la fermeture du tiers de notre parc nucléaire coûterait 250 Mds€ et renchérirait de 40 % la facture d’électricité pour les Français ? Pour un contrat de gouvernement, il faudrait surmonter des divergences très importantes. Ce n’est pas ma perspective.

Quel type de campagne allez-vous mener ?
J’irai dans les usines. L’avenir de la France passe par sa réindustrialisation. La reconquête de l’électorat ouvrier, cela me paraît essentiel. Les couches populaires se reconnaîtront dans ma campagne.

Avez-vous vos 500 parrainages ?
Beaucoup de maires m’ont promis de me soutenir. J’ai déjà à peu près la moitié de mes parrainages. Je crois en la dynamique de ma campagne.

Vous étiez ministre en 1981, vous êtes candidat à l’élection présidentielle trente ans plus tard : n’est-ce pas la campagne de trop ?
Dans une période de crise, les Français ont besoin d’un homme d’expérience et de caractère. Le renouvellement, je le ferai autour de moi en défendant les intérêts de notre jeunesse sans la flatter à travers un « jeunisme » démagogique.


Propos recueillis par Eric Haquemand
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Source : LeParisien.fr


Rédigé par Chevenement.fr le Samedi 5 Novembre 2011 à 21:57 | Lu 3208 fois



1.Posté par Guillaume DELYE le 06/11/2011 00:26
Le plan d'austérité du Gouvernement Fillon est tellement comptable et aveugle qu'il devient une caricature de l'esprit de Maastricht. Le premier ministre parle d'"heure de vérité" mais de quelle vérité parle t-il ? Du vice de conception du traité de Maastricht ou de l'échec de sa propre politique ? En tout cas, une heure de vérité sur tout un quinquennat, cela représente peu, et, en fin de mandat, cela ressemblerait davantage au temps du bilan.
A cette conception purement comptable de l'économie, il est en effet grand temps d'opposer une conception volontariste fondée sur une politique industrielle solide et visionnaire. Jean Pierre Chevènement est ici le candidat idéal.
Le plan A de le refondation européenne défendu par J.P. Chevènement est parfait, mais compte tenu de la couleur politique des pays de la zone euro, il est plus que probable que l'on doive se rabattre sur le plan B.
L'esquisse d'un plan B fait oeuvre utile tant la monnaie unique commence à se fissurer. Seulement, le plan B que l'on pressent à travers les écrits et déclarations de notre candidat bien-aimé gagnerait à être revu, approfondi et élargi. S'il est vrai que la bateau européen coule, il vaudrait mieux être plusieurs sur une grande chaloupe que tout seul sur une petite...

2.Posté par Patrick LENORMAND le 06/11/2011 00:41
Désolé, vraiment, je suis désolé de votre décision...
J'ai voté pour vous avec enthousiasme en 2002 ... mais là vous divisez non la gauche, mais les patriotes déjà représenté par Dupont-Aignan. Vous ne pouviez donc pas faire cause commune ?
Vous aimez la France dites-vous ... Alors dommage !

3.Posté par gerard pendaries le 06/11/2011 08:43
Twitter
Je suis heureux que M. Chevènement se porte candidat. Si «Gouverner c’est prévoir » il a été un des rares lucides et hélas, non compris. Plaise que son expérience et son intelligence soit aujourd’hui entendue par le Champion socialiste désigné, qui me parait quelque peu ambigu sur la conduite à suivre. Tout le contraire de son adversaire qui pilote en zigzag mais donne l’impression de suivre la ligne droite.
Mis en scène par le Président Obama lui-même (excusez du peu) Nicolas Sarkozy a très bien réussi son numéro d’illusionniste, qui consiste à faire croire qu’il a fait ce qu’il aurait fallu faire mais qui n’a pas été fait…Rendons hommage à l’Artiste…
M. Hollande, lui, a manqué le rendez-vous. Entre deux siestes, il se contente du rôle de moniteur d’auto-école fustigeant les erreurs sans, pour autant, montrer comment il faudrait conduire. On ne sait toujours rien de sa capacité au volant quand viendra son tour de disputer le Grand Prix.

 Qu’elle est sa position au sujet des paradis fiscaux et va-t-il exiger que le Luxembourg révise sa Constitution au sujet du secret Bancaire ?
 Va-t-il demander aux Iles Caïman de faire ce dont nous sommes parfaitement incapables en Europe ?
 Va-t-il exiger la parité de l’Euro avec le Dollar (monnaie de référence) condition sine qua non, pour que les petites et moyennes entreprises (hors Cac 40) retrouvent des chances à l’exportation, un nécessaire besoin pour faire face à la dette sans trop casser la croissance et éviter un surcroit de chômage.
 Va-t-il contenir les dictats technocratiques conjoints de l’Europe et du FMI, pour reprendre la main Politique ?
 Va-t-il renouer avec une véritable Démocratie sans craindre les appels au Peuple pour les décisions capitales ?
 Dans le contexte actuel des relations Européennes, va-t-il continuer le copinage, mais en version molle, avec les Allemands ?

Ces questions qui sont importantes pour la France, ne sont, sans doute, pas de mise pour assurer une élection. Comme disait François Mitterrand « En politique il n’est pas de problème qui ne se résolve de lui-même…pourvu qu’on ne s’en mêle pas »











4.Posté par Jacques POUZET le 06/11/2011 10:43
Bravo pour votre décision ; vous avez dépassé la critique méprisante de" souverainiste" pour redonner un sens au mot patriote en 2012; La République en a bien besoin.
Maintenant , il s'agit de démystifier la pensée unique et la fuite en avant des "européïstes".
Pardonnons leur : ils ne savent pas ce qu'ils font ! mais PERSEVERARE DIABOLICUM.

Il ne s'agit pas que de la star' ac présidentielle mais de la pillule amère ou d'espoir du lendemain

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