Verbatim express :
Sur la question des réfugiés
Sur la question des réfugiés
- La photo du petit syrien est évidemment horrible, insoutenable, presque obscène. Je pense qu'il faut éviter les stratégies de culpabilisation. Par exemple M. Erdogan a dit que ce sont les pays européens qui ont transformé la Méditerranée en cimetière de migrants. Or, revenons aux faits : ce petit gamin vient de Kobané, en pays kurde, en Syrie, une ville que M. Erdogan a refusé de défendre parce qu'il a ses problèmes avec les kurdes. Donc je me méfie des stratégies de culpabilisation.
- Il y a huit millions de personnes déplacées à l'intérieur de la Syrie, quatre millions de réfugiés dans les pays limitrophes (Liban, Jordanie, Turquie), et deux-cent mille personnes sur les rivages grecs.
- Ces réfugiés viennt pour l'essentiel de Syrie, d'Irak, d'Afghanistan : ils sont originaires de pays qui ont été déstabilisés par des interventions dont l'Occident, les Etats-Unis particulièrement, portent la principale responsabilité. On pourrait dire la même chose de la Libye en ce qui concerne l'intervention franco-britannique. Les Américains ont détruit l'Etat irakien, livrés les sunnites à Al Qaeda d'abord, à Daesh ensuite.
- Pour moi, des gens qui fuient la guerre, ce sont plutôt des réfugiés.
- Mme Merkel a changé d'avis par rapport à ce qu'elle disait au mois de juillet, parce que l'Allemagne n'est pas dans la situation que d'autres pays européens. Mme Merkel l'a dit : l'Allemagne est forte économiquement, elle a une démographie en baisse, elle a besoin de main d'oeuvre qualifiée, et sa réputation ne peut pas souffrir de cette attitude. L'Allemagne défend aussi ses intérêts nationaux. Par rapport à sa réputation écornée par l'affaire grecque, cette question des réfugiés est une façon de présenter le pays comme un pays hospitalier et généreux, et de changer l'image. Mais les problèmes de la France sont différents, ceux de la Grèce aussi.
Sur Daesh
- La seule solution, c'est la paix en Syrie, et un Irak fédéral où les sunnites pourraient se débarrasser de Daesh.
- C'est aux musulmans eux-mêmes qu'il appartiendra en définitive de se débarrasser de Daesh, avec notre aide si on le peut, mais on ne peut pas se mettre à leur place.
- A partir du moment où nous effectuons des frappes en Irak, je ne vois pas d'inconvénients à ce que nous le fassions aussi en Syrie, à condition qu'elle soit coordonnée avec le régime syrien. Entre Bachar et Daesh ou Al Qaeda, nous n'avons le choix qu'entre de mauvaises solutions, mais il y a une qui est pire que toutes les autres, c'est Daesh – et Al Qaeda aussi.
- Il faut une solution dans le cadre de l'ONU, un rapprochement entre les protagonistes de ce conflit. On dit que c'est un conflit entre les sunnites et les chiites, en fait, entre l'Iran d'un côté, l'Arabie Saoudite et la Turquie de l'autre, les uns soutenus par la Russie et les autres par les Etats-Unis. Donc il faut mettre tous les protagonistes autour d'une table, et puis taper ensemble sur Daesh.
- Il faut se rapprocher de l'Iran et de la Russie, c'est l'évidence. C'est l'intérêt de l'accord auquel est parvenu Barack Obama avec l'Iran, de permettre à l'Iran de s'asseoir autour d'une table.
- Entre russes et américains, je pense qu'une coordination est possible. Vous savez, ni les soldats russes, ni les soldats américains, ne sont engagés au sol, et je ne pense pas qu'ils le feront. Mais ils peuvent quand même agir puissamment, car c'est eux qui fournissent les armes, les munitions, les renseignements. Un minimum de coordination serait nécessaire.
Sur la répartition des réfugiés
- Une répartition des réfugiés doit tenir compte d'un certain nombre de critères : le niveau du chômage, la richesse d'un pays, les besoins de main d'oeuvre qualifiée, le déficit ou l'excédent démographique, le désir des réfugiés car ils vont là où ils ont de la famille, où ils connaissent des gens, où ils ont l'espoir d'avoir du travail.
- La France a beaucoup moins les moyens d'accueillir des réfugiés que l'Allemagne, il faut le dire, car la France a 10% à 11% de chômage. On doit proportionner l'accueil à des critères d'intégration. Il faut qu'on puisse absorber ces populations.
- Je pense que, s'agissant des réfugiés syriens, il faut faire un large geste. En même temps, nous ne devons pas nous engager dans un mécanisme permanent, obligatoire. Cette décision ne devrait être prise que par les États européens, par le Conseil européen.
Sur les questions politiques
- A partir du moment où le PS a tourné le dos à ses promesses, en 1983, en choisissant une monnaie surévaluée déjà, dans la perspective de la monnaie unique, j'ai commencé à prendre mes distances en disant que le parti faisait fausse route. Et j'adjure le PS de reprendre une voie qui soit conforme à ce qu'attende de lui ses électeurs.
- Jean-Luc Mélenchon a changé d'avis sur la participation au colloque que j'organisais. Chacun devait présenter son point de vue, sur un thème « Europe et souveraineté. Comment peut-on se servir de la souveraineté populaire pour redresser l'Europe ? ».
- Dans la vie politique, on est exposé à des tireurs embusqués, de snipers, Mélenchon parle lui-même des chiens de garde du système. Ca fait peur a beaucoup autour de lui !
- Je ne lui demandais pas de débattre avec Nicolas Dupont-Aignan. Je pense qu'il faut savoir s'écouter. Et quant on veut être président de la République, il faut être l'homme de la Nation, partir de l'intérêt public.
- Je ne renonce pas à ce colloque, il est reporté et sera recalibré.
- Je ne peux pas aider Jean-Luc Mélenchon à échapper à ses mauvaises fées gauchistes s'il ne le souhaite pas lui-même. On n'empêche pas de se noyer un homme qui veut se noyer, surtout s'il veut vous entraîner par le fond. Mais je ne veux pas dire que je ne veux plus rien faire avec Jean-Luc Mélenchon. Il peut évoluer, il l'a montré.
- J'ai toujours dit que le FN mérité d'être isolé par un cordon sanitaire, et je n'ai pas changé d'avis. Mais je pense que si les électeurs sont aujourd'hui désespérés au point de se tourner trop souvent vers le FN – ils seraient d'ailleurs très déçus – c'est parce que dans les partis de gouvernement, on n'offre pas une perspective claire de redressement de la construction européenne, à propos de la monnaie unique par exemple, dont on a pas fini de voir les ravages. Il faudrait quand même que les républicains des deux rives débattent.
- Je me place dans une perspective longue : comment peut-on éviter à la France le naufrage ?
- Je demande à Jean-Christophe Cambadélis de s'interroger sur la pertinence de sa stratégie mirifique, la gauche plurielle, élaborée en 1996, qui conduit au naufrage que nous voyons.
- Plus que jamais, je reste fidèle à mes convictions fondamentales. Je suis un républicain, je crois à un chemin de vérité pour la France, et je ne pense pas que nous devions nous soumettre au capitalisme financier mondialisé.
Sur le code du travail
- Il y a une certaine simplification du code du travail à faire, mais sans entamer les protections dont je suis partisan. Je pense que la stabilité du contrat de travail à durée indéterminée est indispensable si on veut vivre dans une société tout simplement vivable et humaine.
Sur la laicité
- Ma définition de la laïcité, c'est d'apprendre à penser par soi-même, en dehors des dogmes, en fonction de la raison naturelle. Et pour moi, le fait de proposer un repas de substitution à des jeunes musulmans, juifs ou même végétariens, ne me paraît pas choquant. Cela ne me paraît pas un problème de laïcité.
- Je pense qu'il faut revenir à l'esprit de la laïcité, revenir à ce qui nous rapproche et pas ce qui nous divise. En même temps il y a des différences dans la vie, et sous le toit de la République, on peut aussi gérer les différences.
Sur la réforme du collège
- Je pense que le gouvernement devrait faire preuve de sagesse sur la réforme du collège. Le nombre d'heures d'enseignements disciplinaires a déjà beaucoup diminué depuis une trentaine d'années, environ cinq heures par semaine. Et là c'est cinq heures de moins. On ne peut pas faire de l'interdisciplinaire si les bases mêmes des disciplines ne sont pas acquises.
- Je soutiens de cœur la grève des enseignants, mais je souhaiterais que le gouvernement procède à un apaisement. Je veux rendre hommage aux enseignants. Si l'école tient, c'est parce qu'il y a des enseignants de qualité qui se battent, et je salue leur courage.
Sur la nomination de Myriam el Khomri
- Un bon ministre de l'emploi doit savoir écouter, faire des propositions, rapprocher les points de vue. Le rôle du ministre de l'emploi peut être très important pour aboutir à des conventions entre le patronat et les syndicats. Donc je souhaite bonne chance à Myriam el Khomri.