Verbatim express :
- La France a le droit de dire qui peut, ou ne peut pas, s'installer à demeure sur son sol. C'est un principe de base. A partir de là, il faut traiter la politique migratoire sans démagogie, avec fermeté mais avec humanité.
- On ne peut pas sortir des problèmes d'immigration sans chercher à résoudre, bien en amont, les problèmes de développement, de sécurité, qui génèrent ces flux, à travers notamment la Méditerranée. En particulier, tant que la zone sahélienne ne sera pas stabilisée, à travers une politique générale, on ne pourra pas faire front à cette immigration désordonnée.
- Prenons un exemple, la Libye, dont la situation actuelle est chaotique. La Libye de Khadafi avait beaucoup de défauts, mais elle exerçait un contrôle sur ses frontières. Nous avons détruit la Libye !
- La France, l'Angleterre, sous l'impulsion, il faut le dire, de M. Sarkozy, peut-être de Bernard Henri-Lévy, ont décidé qu'il fallait faire le ménage. On a violé la résolution des Nations Unies, qui nous donnait le droit de protéger les populations civiles de Benghazi, et on est allé jusqu'au changement de régime. Résultat de l'ingérence : aujourd'hui c'est le désordre complet.
- La politique d'ingérence est à la mode depuis très longtemps. Regardez la situation de l'Irak aujourd'hui. On vient se plaindre du sort des chrétiens d'Irak. Mais on a préféré la guerre à la paix. Aujourd'hui l'Irak n'est plus un Etat : beau résultat de la politique d'ingérence !
- La guerre n'est pas la solution que l'on doit rechercher. Elle peut se révéler inévitable, et je ne suis pas pacifiste, sinon je n'aurais pas été ministre de la Défense évidemment. Mais il est préférable de trouver des solutions politiques que d'ouvrir des boîtes de Pandore.
- La question qui se pose pour la France, c'est d'abord de savoir qui nous sommes. Est-ce que nous sommes membre de la famille des nations occidentales, comme le disait M. Sarkozy, ou l'aîné de la grande famille des nations humaines en général ? C'était la définition que la France se donnait depuis la révolution de 1789.
- En 1967, le général de Gaulle avait parlé des malheurs grandissant qu’Israël connaîtrait à occuper des territoires peuplés d'arabes. Et bien voilà : aujourd'hui nous sommes aux résultats.
- Si on veut travailler réellement à la sécurité d’Israël, il faut aller vers une solution à deux Etats, et ne pas chercher à coloniser les territoires palestiniens. Ou alors se poursuivra le conflit, qui débouchera sur la radicalisation du monde musulman, et le naufrage des Etats que nous soutenions jadis, que ce soit l'Irak, la Syrie. Nous irons vers la fragmentation.
- Sur l'Ukraine, les responsabilités sont partagées. Qu'est-ce que les institutions européennes recherchaient en allant chatouiller les moustaches de l'ours russe en Ukraine ? Il y avait un projet de libre-échange en direction de l'Ouest et un autre en direction de l'Est. Il fallait faire converger ces projets.
- Chacun sait que la nature de l'Ukraine est particulière. C'est un pays hétérogène, peuplé à l'ouest de gens qui sont des ressortissants d'Europe centrale, et à l'est de russophone.. Cette réalité aujourd'hui est méconnue. L'opinion aujourd'hui est sous-informée, manipulée.
- L'Ukraine est d'abord aujourd'hui un objet géopolitique. Brezinski avait écrit que, pour empêcher la Russie de redevenir une grande puissance, il fallait soustraire l'Ukraine à son influence. Nous y sommes. Il y avait eu la révolution Orange en 2004.
- Maintenant, je dois dire que j'ai exercé moi-même un certain rôle pour obtenir que la Russie reconnaisse les élections qui ont abouti à l'élection de M. Porochenko. Mais M. Porochenko a été élu pour faire la paix, pas la guerre. Qu'elles sont les initiatives qui sont prises aujourd'hui par les institutions européennes pour peser sur M. Porochenko ?
- Il y a eu 1800 morts en Palestine, 1100 en Ukraine, ce n'est pas suffisant ? On a vu des chars, des avions, tirer sur leur population... Il y a quand même un moment où l'Europe, si elle était libre, si elle était européenne pour reprendre l'expression du général de Gaulle, dirait : "Ecoutez, il y a quand même un terrain d'entente à trouver, une certaine régionalisation de l'Ukraine, pour que chacun s'y sente à l'aise".
- Il y a beaucoup de gens qui se réclament plus ou moins de moi aujourd'hui. Naturellement, je laisse faire et dire, parce que je ne peux pas corriger. J'ai toujours essayé d'avoir une vision d'homme d'Etat, qui tienne compte du monde tel qu'il est. Si on avait écouté ce que j'avais dit en 1983, plutôt que de s'accrocher à la monnaie forte, ce qui a abouti à la désindustrialisation de la France, sur le Moyen-Orient, sur la réforme de l'Etat et des collectivités territoriales engagée en Corse, aujourd'hui généralisée en dépit du bon sens, on devrait se dire qu'il y a un retour aux fondamentaux républicains qui est nécessaire.
- Le monde a changé, et la France doit se positionner par rapport au monde tel qu'il est, avec courage et avec ambition. La France n'est pas finie.