Je regrette que des obligations contractées antérieurement et que je ne pouvais remettre m’empêche d’être parmi vous pour rendre à Nicole l’hommage qui lui est dû et dire à tous les siens, à son fils Renaud, à ses petits-enfants et à tous ceux qui l’ont aimé, particulièrement à Jean-Paul Planchou, ma tristesse et ma fidélité.
Nicole Bricq qu’une mort brutale vient de nous enlever était à l’image même de cette jeunesse qui face au discrédit ou à l’impuissance des anciens partis s’était levée, au début des années 1970, pour redonner sens à la politique et à l’engagement militant.
1971 fut l’année où Nicole enfanta d’un petit Renaud, mais ce fut aussi l’année où elle s’engagea au Parti Socialiste, via le CERES que ses adversaires décrivaient, à juste titre d’ailleurs, comme « un parti dans le parti ».
Nicole et son mari, Philippe, adhérèrent à Mazamet dans le Tarn, où ils travaillaient avec la ferme détermination de bousculer les anciens de la SFIO et de forger l’outil politique qui permettrait l’alternance pour « changer la vie » : tel était en effet le titre du programme socialiste de 1972. Nous voulions réussir, là où nos anciens avaient échoué, sous le Front Populaire face à la montée du fascisme, et à la Libération face à la guerre froide. Nous pensions possible dans un contexte nouveau, de surmonter la division de la gauche en France et en Europe, en forgeant un Parti Socialiste renouvelé, en prise avec les nouvelles générations.
Nicole était le symbole de cette détermination. Entier était son engagement, comme entière était sa personnalité. Chez elle pas de faux-fuyant.
Nicole Bricq qu’une mort brutale vient de nous enlever était à l’image même de cette jeunesse qui face au discrédit ou à l’impuissance des anciens partis s’était levée, au début des années 1970, pour redonner sens à la politique et à l’engagement militant.
1971 fut l’année où Nicole enfanta d’un petit Renaud, mais ce fut aussi l’année où elle s’engagea au Parti Socialiste, via le CERES que ses adversaires décrivaient, à juste titre d’ailleurs, comme « un parti dans le parti ».
Nicole et son mari, Philippe, adhérèrent à Mazamet dans le Tarn, où ils travaillaient avec la ferme détermination de bousculer les anciens de la SFIO et de forger l’outil politique qui permettrait l’alternance pour « changer la vie » : tel était en effet le titre du programme socialiste de 1972. Nous voulions réussir, là où nos anciens avaient échoué, sous le Front Populaire face à la montée du fascisme, et à la Libération face à la guerre froide. Nous pensions possible dans un contexte nouveau, de surmonter la division de la gauche en France et en Europe, en forgeant un Parti Socialiste renouvelé, en prise avec les nouvelles générations.
Nicole était le symbole de cette détermination. Entier était son engagement, comme entière était sa personnalité. Chez elle pas de faux-fuyant.
Sincérité, dédain de la petite politique qui faisait passer les questions de personnes avant les idées, tel était son caractère.
Après le Tarn, Nicole fit un crochet formateur au Portugal, de 1974 à 1977, où elle avait suivi son mari. Le Portugal de la Révolution des Œillets qui éclate en avril 1974, était considéré alors comme le laboratoire de l’union de la gauche en Europe.
Le CERES se sentait très proche du « Mouvement des capitaines » qui avait réussi d’un seul coup la décolonisation en Afrique, la dé-salarization au Portugal, et l’ouverture d’un processus révolutionnaire en Europe.
Nicole et Philippe reviennent en France en 1977.
La Fédération de Paris que le CERES avec Georges Sarre animait depuis 1969 leur ouvrit les bras.
La Fédération de Paris qui avait inventé « le Poing et la Rose » était le bélier du CERES dans le Parti Socialiste. Le CERES pesait alors plus du quart du parti et la Fédération de Paris comptait près de 5000 adhérents jeunes et hypermotivés. Après Georges Sarre, Christian Pierret pris, en 1977, Jean-Paul Planchon comme Premier secrétaire, vient en 1981 le tour de Nicole Bricq, première femme Première secrétaire de la Fédération capitale, fer de lance d’une entreprise qui n’aurait pu pleinement réussir que si les socialistes avaient fait une conversion républicaine et non pas seulement libérale après leur accession au pouvoir en 1981.
La suite est connue. Nicole avait acquis assez de visibilité pour accéder à de nouvelles responsabilités : Présidente de la Commission des Affaires Culturelles au Conseil régional d’Ile-de-France, élu pour la première fois, en 1986, au suffrage universel, Nicole me secondera, de 1988 à 1991, comme chargée de communication au cabinet du ministère de la Défense.
Elle n’a pas partagé mon choix et celui de la majorité de « Socialisme et République » qui avait succédé au CERES au moment de la guerre du Golfe. Mais il est normal, à mes yeux, que des gestes forts, dont seule l’histoire est juge, suscitent en même temps approbations enthousiastes et franches désapprobations.
Ce désaccord aurait pu nous séparer durablement. Il n’en a rien été. J’ai retrouvé Nicole Bricq au Sénat où elle a été élue en 2004 après un mandat au Palais Bourbon, de 1997 à 2002.
J’ai eu l’occasion d’apprécier son métier, sa parfaite connaissance des dossiers, quand elle a été rapporteure générale du Budget. Elle m’a beaucoup aidé quand elle fut nommée, de 2012 à 2014, ministre du Commerce extérieur, sur les questions de coopération aéronautique avec la Russie, notamment. Elle comprenait, en effet, l’importance pour la France d’une relation solide et durable avec la Russie.
J’ai admiré son efficacité. C’était une « bosseuse », comme on dit. Elle maîtrisait parfaitement les dossiers les plus difficiles.
Dans la vie de Nicole, riche et bien remplie, il y a eu, bien sûr, comme dans toute vie, plusieurs vies.
Dans sa vie politique, on pourrait distinguer la vie de la militante et de la responsable de parti engagée, puis une phase plus rangée dans l’exercice de responsabilités parlementaires puis gouvernementales. L’honneur du politique est de s’affronter un jour aux réalités. Il y a bien sûr plusieurs manières de le faire, soit pour s’y plier soit pour les dominer. Nicole Bricq avait trop de caractère pour ne pas chercher sa manière à elle de dominer le réel.
Permettez-moi pour finir, une note plus personnelle.
Comme beaucoup d’entre nous, elle a éprouvé la violence de la politique. Mais cela ne lui a rien enlevé de sa gaîté. J’entends encore son rire résonner, un rire communicatif par lequel elle exprimait sa vraie nature, très au-dessus des petitesses de la vie politique ordinaire. Une gaîté qui disait sa robustesse et qui nous rend sa disparition comme irréelle.
Après 46 ans d’engagement politique, parvenue au terme d’un long cycle, Nicole a voulu s’engager dans la rénovation de la vie politique française. Car Nicole avant d’être socialiste, était, me semble-t-il, une républicaine, soucieuse de servir le Bien public et d’être utile, encore et toujours, à son pays.
Après le Tarn, Nicole fit un crochet formateur au Portugal, de 1974 à 1977, où elle avait suivi son mari. Le Portugal de la Révolution des Œillets qui éclate en avril 1974, était considéré alors comme le laboratoire de l’union de la gauche en Europe.
Le CERES se sentait très proche du « Mouvement des capitaines » qui avait réussi d’un seul coup la décolonisation en Afrique, la dé-salarization au Portugal, et l’ouverture d’un processus révolutionnaire en Europe.
Nicole et Philippe reviennent en France en 1977.
La Fédération de Paris que le CERES avec Georges Sarre animait depuis 1969 leur ouvrit les bras.
La Fédération de Paris qui avait inventé « le Poing et la Rose » était le bélier du CERES dans le Parti Socialiste. Le CERES pesait alors plus du quart du parti et la Fédération de Paris comptait près de 5000 adhérents jeunes et hypermotivés. Après Georges Sarre, Christian Pierret pris, en 1977, Jean-Paul Planchon comme Premier secrétaire, vient en 1981 le tour de Nicole Bricq, première femme Première secrétaire de la Fédération capitale, fer de lance d’une entreprise qui n’aurait pu pleinement réussir que si les socialistes avaient fait une conversion républicaine et non pas seulement libérale après leur accession au pouvoir en 1981.
La suite est connue. Nicole avait acquis assez de visibilité pour accéder à de nouvelles responsabilités : Présidente de la Commission des Affaires Culturelles au Conseil régional d’Ile-de-France, élu pour la première fois, en 1986, au suffrage universel, Nicole me secondera, de 1988 à 1991, comme chargée de communication au cabinet du ministère de la Défense.
Elle n’a pas partagé mon choix et celui de la majorité de « Socialisme et République » qui avait succédé au CERES au moment de la guerre du Golfe. Mais il est normal, à mes yeux, que des gestes forts, dont seule l’histoire est juge, suscitent en même temps approbations enthousiastes et franches désapprobations.
Ce désaccord aurait pu nous séparer durablement. Il n’en a rien été. J’ai retrouvé Nicole Bricq au Sénat où elle a été élue en 2004 après un mandat au Palais Bourbon, de 1997 à 2002.
J’ai eu l’occasion d’apprécier son métier, sa parfaite connaissance des dossiers, quand elle a été rapporteure générale du Budget. Elle m’a beaucoup aidé quand elle fut nommée, de 2012 à 2014, ministre du Commerce extérieur, sur les questions de coopération aéronautique avec la Russie, notamment. Elle comprenait, en effet, l’importance pour la France d’une relation solide et durable avec la Russie.
J’ai admiré son efficacité. C’était une « bosseuse », comme on dit. Elle maîtrisait parfaitement les dossiers les plus difficiles.
Dans la vie de Nicole, riche et bien remplie, il y a eu, bien sûr, comme dans toute vie, plusieurs vies.
Dans sa vie politique, on pourrait distinguer la vie de la militante et de la responsable de parti engagée, puis une phase plus rangée dans l’exercice de responsabilités parlementaires puis gouvernementales. L’honneur du politique est de s’affronter un jour aux réalités. Il y a bien sûr plusieurs manières de le faire, soit pour s’y plier soit pour les dominer. Nicole Bricq avait trop de caractère pour ne pas chercher sa manière à elle de dominer le réel.
Permettez-moi pour finir, une note plus personnelle.
Comme beaucoup d’entre nous, elle a éprouvé la violence de la politique. Mais cela ne lui a rien enlevé de sa gaîté. J’entends encore son rire résonner, un rire communicatif par lequel elle exprimait sa vraie nature, très au-dessus des petitesses de la vie politique ordinaire. Une gaîté qui disait sa robustesse et qui nous rend sa disparition comme irréelle.
Après 46 ans d’engagement politique, parvenue au terme d’un long cycle, Nicole a voulu s’engager dans la rénovation de la vie politique française. Car Nicole avant d’être socialiste, était, me semble-t-il, une républicaine, soucieuse de servir le Bien public et d’être utile, encore et toujours, à son pays.