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"François Hollande méconnaît la spécificité de l’école"


Entretien de Jean-Pierre Chevènement accordé au quotidien Le Figaro, mardi 19 mai 2015. Propos recueillis par Caroline Beyer.


"François Hollande méconnaît la spécificité de l’école"
Le Figaro : Vous êtes opposé à la réforme du collège. Pour quelles raisons ?
Jean-Pierre Chevènement : L’école souffre depuis longtemps d’une incessante « réformite ». Pourtant, l’école a besoin de stabilité. Et les élèves issus de milieux modestes ont avant tout besoin d’une école structurée. Sa mission fondamentale est la transmission des savoirs et des valeurs républicaines. Cela ne va pas sans effort. Or, la « réforme » va toujours dans le même sens : le laxisme, au prétexte de l’ouverture et du « suivi personnalisé ». Cette réforme du collège diminue les horaires des disciplines pour promouvoir des enseignements pratiques interdisciplinaires. Or, il n’y a de véritable interdisciplinarité que sur la base de savoirs disciplinaires maîtrisés.

Selon François Hollande, « il n’y a pas de raison qu’il y ait du statu quo à l’école, alors qu’il n’y a pas de statu quo dans les entreprises ». Que pensez-vous de cet argument ?
François Hollande méconnaît la spécificité de l’école : c’est, en France, une institution de la République et non la juxtaposition d’établissements qui définissent eux-mêmes leur projet. Cette thèse, c’était celle de Luc Chatel. Le philosophe Alain voulait faire de l’école républicaine « un sanctuaire ». Nous en sommes loin !

Cette réforme est défendue comme le remède contre les inégalités et la reproduction sociale. N’est-ce pas utopique ?
L’égalitarisme niveleur est l’ennemi de la démocratie véritable. Revenons à la République des Lumières ! L’« élitisme républicain »consiste à donner à chacun la possibilité d’aller au bout de ses possibilités.

Najat Vallaud-Belkacem défend-elle bien sa réforme ?
La ministre donne l’image d’une jeune femme qui a réussi. Je souhaite qu’elle mette son caractère au service d’une conception républicaine de l’école. Je souhaite également qu’elle écoute les conseils donnés de bonne foi et ne se mette pas dans la main de la superstructure du ministère de l’Éducation nationale…

Parallèlement, les programmes scolaires sont revus. La proposition sur les programmes d’histoire déchaîne les passions. Quelle est votre position ?
Il n’y a pas de démocratie qui tienne sans un puissant sentiment d’appartenance partagée. Il peut et il doit y avoir un récit national objectif qui rende compte de l’Histoire de notre peuple et lui donne envie de la continuer, en préservant dans les nouvelles générations une raisonnable estime de soi. Comment voudrait-on donner aux jeunes issus de l’immigration l’envie de s’intégrer à un pays qui ne cesserait de se débiner ?

Dans une récente interview au Monde, Michel Lussault, le président du Conseil des programmes, estime que« l’idée de vouloir faire de l’histoire un “roman national” est dérangeante ». Qu’en pensez-vous ?
Michel Lussault semble avoir oublié cette phrase de Michelet :« La France est une personne… » Ni Jaurès, ni De Gaulle, ni Mendès-France n’auraient renié cette pensée. Il confond volontairement « roman national » et « récit national ». Le roman, c’est de la fiction. On ne peut qu’être contre. Mais le récit national, lui, peut être objectif. C’est pourquoi le gouvernement qui, en République, est responsable des programmes, peut demander que le « récit national » ne valorise pas systématiquement des ombres de notre Histoire, mais nous parle de ses lumières et nous rappelle que la Révolution française a fait des juifs des citoyens français comme les autres, et qu’elle a aboli une première fois l’esclavage en 1794. Dans « récit national », ce qui semble gêner Michel Lussault, c’est l’adjectif « national ».

On sait que le collège va mal. Quelle est l’urgence ?
Il faut porter les efforts sur l’amont, les apprentissages fondamentaux. Bref, faire ce que François Hollande avait dit qu’il ferait pendant sa campagne.

SOURCE : Le Figaro


le Mardi 19 Mai 2015 à 10:14 | Lu 4208 fois



1.Posté par Jp JP le 19/05/2015 11:44
JPChevènement président de la république, voilà l'homme qu'il faut à notre pays pour ne pas disparaître dans la bêtise instituée....en outil de gouvernance !

2.Posté par Jérôme DECUP le 19/05/2015 15:33
Les familles de langues du parler roman (Italo-Celtique) et hellénique sont agressées par la famille de langues germaniques et plus précisément de la culture commune qui leur est sous-jacente. Le « globish » ne tolère pas l'autre comme possible. Son seul argument : la force. Alors les lumières et la raison doivent s'éteindre devant la force. Pour certains, les faciles, les éblouis du globish, la capitulation, la complicité, sont actées depuis longtemps.
Je suis un prolétaire et j'existe dans la République ­ Régis Debray , La République expliquée à ma fille – éditions Seuil, mais pas dans le « globish » dont je ne partage quasiment aucune valeur.
Malgré plusieurs échecs, je n'ai jamais cessé d'aimer l'effort qui élève. Ni Dieu ni maître et quelques amours, un esprit Républicain et une âme libre.
La transition libérale nous contraint à passer d'un référentiel basé sur des valeurs de laïcité, de démocratie, et sociales ­ (liberté, égalité, fraternité) ­, la richesse, à une référentiel dont les seules valeurs sont le droit, celui de la société civile, comme en témoigne les tribunaux d'arbitrages qui tendent à ce développer, et l'argent, la pauvreté absolue. La cupidité et la force sont liées dans une même maladie !.
Derrière cela je suppute un modèle, pour que l'hégémonie puisse toujours exister, l'Occident économique (l’unique par la croissance - fusion acquisition - l’ingérence), face aux nouvelle "forces" indiennes, chinoises et autres, qu'il convient d'apprendre à détester sans même les connaître.
Le libéralisme est la constitution de forces de combat (sans raison, battez-vous pour que le un pour-cent puisse dominer! ­- la compétitivité) par l'aseptisation. La République, la Constitution, le citoyen, le patriote, la déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen, sont autant d'éléments de savoir que l'école républicaine transmet pour que les croyances soient éclairées. Des choix sont à faire et ceux du plus fort ne sont pas les miens.

3.Posté par Carl GOMES le 19/05/2015 17:12
Najat Vallaud Belkacem montre qu'elle n'est pas au niveau du poste qu'elle occupe. Sa réforme est celle de pédagogues illuminés qui voudraient mêler les différentes disciplines. En confiant l'enseignement des mathématiques au professeur d'histoire et celui de l'histoire au professeur de mathématiques, voire avec des interventions simultanées des deux professeurs cela serait une farce à échelon national.

4.Posté par Maité Lafourcade le 19/05/2015 19:01
Merci, M. Chevènement de redire ce que je pense toujours : revenir aux fondamentaux...
Votre culture et votre bon sens nous manquent à l'Education Nationale.

5.Posté par Michel LEFEVRE le 20/05/2015 16:32
michelouis_lef
Oui de même je suis d'accord avec la personne précédente; merci Monsieur Chevenement. je crois que vous êtes influencé par le bon sens ! ma femme était enseignante elle dit la même chose,nous avons oubliés les fondamentaux !

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