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Entretien sur Europe 1: "Pour terrasser l'islamisme radical, nous devons nous appuyer sur les Français musulmans"


Jean-Pierre Chevènement était l'invité de l'émission « Mediapolis » sur Europe 1. Il répondait aux questions d’Olivier Duhamel et de Catherine Nay, samedi 17 octobre 2020.


Le passage de Jean-Pierre Chevènement peut être écouté en replay.

Verbatim

Olivier Duhamel : Bonjour à tous.

Catherine Nay : Bonjour Olivier, bonjour Jean-Pierre Chevènement et bonjour à tous ceux qui nous écoutent.


Olivier Duhamel : Nous avons la chance de recevoir ce matin Jean-Pierre Chevènement. C’était prévu à l’origine à l’occasion de la sortie de son livre Qui veut risquer sa vie la sauvera, titre ô combien en résonnance avec les évènements actuels, sous-titre Mémoires. Un formidable livre de près de 485 pages. Finalement nous nous sommes dit que Jean-Pierre Chevènement était l’homme à entendre plus que jamais ce matin car hier, vendredi à 17h, un professeur d’histoire, Samuel Paty, a été décapité à Conflans-Sainte-Honorine pour avoir discuté avec ses élèves des caricatures de Mahomet lorsqu’il traitait de la partie du programme consacrée à la liberté d’expression. Le parquet national anti-terroriste a ouvert une enquête pour assassinat en relation avec une entreprise terroriste. Jean-Pierre Chevènement, fils d’instituteurs, a été ministre de l’Éducation nationale, de l’Intérieur (et à ce titre en charge des cultes). C’est un homme politique au rôle décisif dans l’histoire de la gauche française depuis presque un siècle. Sa voix nous importe donc. Commençons par les faits, par l’effroyable fait d’un professeur d’histoire décapité. Écoutez le président de la République, hier.

(Enregistrement)

J’imagine, Jean-Pierre Chevènement, qu’en tant qu’ancien ministre de l’Éducation nationale et qu’en tant que fils d’enseignants, vous êtes particulièrement concerné et touché. À la page 32 de votre livre, vous rappelez que vos parents étaient instituteurs et à la page suivante vous écrivez que vos parents corrigeaient les copies de leurs élèves jusqu’à des heures très tardives. Vos parents n’ont évidemment pas été assassinés, mais vous êtes particulièrement concerné.

Jean-Pierre Chevènement : Je sais ce qu’a, à la fois, d’ingrat et de très valorisant le métier d’enseignant. C’est du travail. La tâche d’éduquer est une tâche de tous les jours et de tous les instants. Jusqu’à présent cependant, on ne courait pas de péril mortel en enseignant à ses élèves. Nous sommes aujourd’hui dans une situation différente. Nos enseignants ont fait un travail formidable. Si l’on prend ce qui s’est passé depuis Jules Ferry et les années 1880, ils ont fait la France et permis à ce que celle-ci continue, mais ils se heurtent maintenant à une réalité particulière : le développement de l’islamisme radical, non seulement dans leurs classes mais aussi dans leur environnement (avec les parents notamment). On voit bien que l’assassin est quelqu’un qui tournait dans ses milieux. Il y a une pression extérieure qui s’exerce sur l’école et qui demande aux étudiants beaucoup de courage. Il leur faut non seulement poursuivre leur tâche mais l’adapter au terrain et le faire avec beaucoup d’intelligence, en sachant qu’ils prennent des risques face à des fanatiques dont nous ne viendrons pas à bout en quelques années. Cela dure depuis très longtemps.

Catherine Nay : La violence, elle n’est pas à l’école depuis très longtemps. De votre temps, quand vos parents enseignaient, c’était impossible que des parents viennent agresser les professeurs, voire les battre puisque leurs enfants avaient eu de mauvaises notes. Ça ne se faisait pas.

Jean-Pierre Chevènement : Non, à l’époque les parents soutenaient plutôt les instituteurs et venaient les encourager à manifester plus de sévérité encore si c’était possible. La situation s’est retournée depuis une cinquantaine d’années. Les parents prennent maintenant le parti des élèves, de leurs enfants.

Olivier Duhamel : Si vous me le permettez, vous généralisez un peu. Je ne pense pas que tous les parents prennent le parti de leurs enfants, que tous les parents s’en prennent aux professeurs. Là vous faites un tableau apocalyptique. Je ne dis pas que ça n’existe pas mais dire les parents…

Jean-Pierre Chevènement : La tendance générale est que la majorité des parents prenne le parti de leurs enfants contre les professeurs. C’était l’inverse il y a plus de cinquante ans.

Catherine Nay : Les choses étant ce qu’elles sont, vu l’islamisme radical dont vous avez parlé, l’école est-elle le lieu où un professeur peut tout dire et tout expliquer ? Cela n’est-il pas dangereux ?

Jean-Pierre Chevènement : Il doit tout expliquer mais, comme Jules Ferry recommandait qu’on le fasse, en veillant à ne pas blesser la conscience des enfants, en veillant à ce qu’ils puissent être instruits, en ne s’autocensurant pas, et en ayant toujours à l’esprit que la conscience des enfants est une chose précieuse qu’on ne doit pas violenter. C’est un travail d’autant plus difficile que la France n’a plus l’homogénéité qui était celle de la société française il y a encore une cinquantaine d’années. La France est une France qui comporte des mouvances d’origines diverses qui ne se fondent pas facilement dans le creuset national. La tâche est d’autant plus rude parce qu’il faut poursuivre ce travail et ne pas baisser les bras en abandonnant l’intégration républicaine.

(Pause)

Olivier Duhamel : Jean-Pierre Chevènement, notre invité spécial, publie chez Robert Laffont Qui veut risquer sa vie la sauvera. C’est une citation si je me souviens bien de Saint Matthieu.

Jean-Pierre Chevènement : Saint Matthieu oui. Je ne l’ai pas cité. Je lui ai emprunté cette phrase qui correspondait à mon état d’esprit au jour de mon premier engagement risqué.

Olivier Duhamel : À propos d’engagement risqué, vous souligniez tout à l’heure que les professeurs étaient devenus des cibles. Écoutez la réaction de Jean-Rémi Girard, président du SNALC (Syndicat national des lycées et des collèges).

(Enregistrement)

Jean-Pierre Chevènement, vous avez été ministre de l’Éducation nationale de juillet 1984 à mars 1986. Supposons que vous soyez aujourd’hui ministre de l’Éducation nationale et que moi je sois professeur, mettons en 3ème, et que j’ai à assurer des heures d’enseignement moral et civique (ENC). Je vous pose la question : est-ce que, dans un cours sur la liberté d’expression, je peux montrer des caricatures de Mahomet et les commenter avec mes élèves pour qu’ils apprennent qu’ils vivent dans un pays où le blasphème n’existe pas et où la liberté d’expression peut se moquer de tout, y compris des religions ? Monsieur le Ministre, est-ce que je peux faire ça ? Que me répondez-vous ?

Jean-Pierre Chevènement : Je vous réponds que s’il s’agit d’enseigner la liberté d’expression, on peut prendre toutes sortes d’exemples, en évitant peut-être de prendre ceux qui peuvent surprendre la conscience d’un élève. Cela peut être les caricatures de Mahomet mais celles-ci doivent être dans le contexte et doivent être bien expliquées. C’est tout ce qui fait la difficulté du métier d’enseignants. Ce n’est pas simple. Compte tenu de l’environnement, cela peut consister à prendre des risques. Et il y a dans nos écoles, un certain nombre d’atteintes à la laïcité, d’insultes, de violences, de refus d’enseignements, qui se manifestent et qui sont d’ailleurs rapportées au Ministre par des référents laïcité sur toute l’étendue du territoire.

Olivier Duhamel : Catherine Nay, j’ai entendu le chef du service politique de France Inter qui rapportait que, lorsque ce professeur a eu ce cours, il a annoncé à ses élèves musulmans qu’il allait montrer des caricatures et que si cela les gênait ils pouvaient sortir. Le chef du service politique en question contestait cela en disant que ce n’était pas normal et qu’en raison de la laïcité il n’aurait pas dû dire cela. D’autres disent au contraire qu’il a eu raison car il a fait son cours et respecté ses élèves. Quelle serait votre position ?

Catherine Nay : D’après ce que j’ai lu dans les journaux ce matin, ce professeur avait déjà appliqué cette méthode l’année précédente en essayant de ne pas choquer. Personnellement je pense qu’il a voulu trop ménager ses élèves. Mais se faisant demander aux musulmans de partir c’était déjà créer une cassure.

Olivier Duhamel : Selon ce que j’ai lu, il aurait dit : « Ceux d’entre vous musulmans que ça pourrait choquer peuvent, s’ils le veulent, sortir. » Ce n’est pas la même chose. Ce n’est pas : « les musulmans, dehors ! »

Catherine Nay : Je me suis mal exprimé, mais il a fait une différence entre les élèves musulmans et les autres, comme si les premiers ne pouvaient pas entendre une explication sur la liberté d’expression.

Jean-Pierre Chevènement : La réponse est qu’il faut que le professeur rende son discours audible, en prenant peut-être quelques précautions. Le cas échéant, il doit choisir d’autres exemples pour expliquer ce qu’est la liberté d’expression. Il doit aussi pouvoir choisir cet exemple là car le droit au blasphème existe dans la société mais n’existe pas dans l’école laïque. Dans la société, ce droit existe. Je ne vais pas revenir à l’affaire Callas et à l’Ancien Régime.

Olivier Duhamel : C’est très important ce que vous dites et très clair. Je vais le répéter à ma manière : nous sommes dans un pays démocratique et laïc, où la liberté d’expression et la liberté de conscience existent, ce qui fait qu’il n’y a pas de délit de blasphème dans la société. À l’intérieur de l’école en revanche, on doit respecter l’ensemble de ses élèves et un professeur ne doit pas blasphémer. Mais ici il n’a pas blasphémé…

Jean-Pierre Chevènement : … il a pris un exemple pour faire comprendre ce qu’était la liberté d’expression, y compris le droit au blasphème, en dehors de l’école. C’est très difficile. Cela demande beaucoup de pédagogie et un choix attentif des exemples à donner aux élèves pour qu’ils comprennent.

Catherine Nay : Montrer aussi qu’on peut blasphémer la religion catholique sans que des catholiques viennent égorger un professeur.

Jean-Pierre Chevènement : Ce malheureux a été assassiné ignoblement, alors même que si des parents avaient été choqués, il aurait été facile de demander un rendez-vous au proviseur.

Olivier Duhamel : Ce que certains ont fait d’ailleurs. C’est très intéressant car nous essayons d’être précis sur les questions concrètes auxquelles les enseignants, les parents et les élèves sont confrontés. Dans notre société, il faut tenir les deux bouts face à des situations aussi dramatiques : avoir une sorte de rassemblement et d’unité nationale et pouvoir en même temps discuter dans le respect mutuel. Ce thème de l’unité est ressorti très fortement hier.

(Pause)

Notre invité, Jean-Pierre Chevènement, l’homme qui est mort il y a 22 ans et qui a ressuscité, qui vient de publier ses mémoires aux éditions Robert Laffont. Un homme qui a la passion de la nation. L’incipit de son livre, je vous la lis : « On ne nait pas impunément en 1939. Ma passion de la France a commencé cette année-là avec la guerre mettant à nu ses faiblesses. » Et sur le mot « passion » il ajoute une note en bas de page : « du latin « pati » : souffrir ». C’est un mixte, cet incipit, du général de Gaulle et de Saint-Just : « On ne règne pas impunément. » Vous avez pensé aux deux en écrivant cette ligne ou pas du tout ?

Jean-Pierre Chevènement : Non, j’ai laissé ma plume faire ce qu’il y a de plus difficile : tracer la première ligne. J’ai voulu exprimer moi-même la manière dont ma vie s’est agencée puisque mon père a été fait prisonnier. Par conséquent, pendant six ans, j’ai été élevé par ma mère dans un petit village du Haut-Doubs, dans une classe à école unique.

Olivier Duhamel : Vous étiez au fond de la classe. C’est votre inconscient politico-historique qui a parlé car dans le fond vous êtes un gaullo-robespierriste.

Jean-Pierre Chevènement : Comme tous les Français !

Olivier Duhamel : Je n’ai jamais entendu une phrase aussi inexacte et drôle à la fois ! Au soir même de cet évènement absolument abominable, le président de la République s’est rendu sur place. On en a entendu un bref extrait tout à l’heure. Il a appelé à l’unité, écoutez.

(Enregistrement)

Alors, je ne veux pas faire de la polémique, mais on a voulu atteindre la République dans ses valeurs. C’est une phrase qui aurait pu être prononcée par vous, Jean-Pierre Chevènement. Et pourtant, à la page 335 de votre livre, je lis à propos de vous-même et de votre démission au moment de la première guerre du Golfe : « Il fallait une foi quasi sacrificielle dans la France et dans les valeurs qu’elle porte. Je ne suis pas sûr qu’elles inspirent encore les hommes politiques qui ont grandi avec la mondialisation, l’Europe et le sentiment que la nation a plus ou moins fait son temps. » C’est assez sévère pour les hommes politiques d’aujourd’hui. Est-ce que ce qu’a dit Emmanuel Macron n’est pas un démenti à votre sombre évaluation ?

Jean-Pierre Chevènement : C’est un sérieux bémol car, en effet, Emmanuel Macron trouve une très bonne inspiration dans la nation quand il s’adresse à elle. Une nation de citoyens, une nation où les enseignants ont un rôle éminent, où l’école républicaine a un rôle éminent qui est de faire des citoyens, de les aider à pense par eux-mêmes et à accueillir des connaissances et les mettre en ordre de telle façon qu’ils ne perdent pas de vue l’idée du bien commun.

Olivier Duhamel : Catherine Nay, vous avez surveillé vous, une partie de la nuit et de la matinée, la diversité des réactions politiques. Est-ce que vous pensez qu’il y a quand même, fort heureusement, un minimum de rassemblement, non pas d’unité nationale, mais d’unité de la nation dans la réaction immédiate à cette horreur ? Ou qu’au contraire c’est déjà les petites musiques critiques ?

Catherine Nay : De ce que j’ai lu, il me semble que oui, mais il faut voir comment la polémique va surgir dans les jours qui viennent.

Olivier Duhamel : C’est normal qu’elle surgisse à un moment donné.


Catherine Nay : On est tous sous le coup de l’horreur car on a coupé la tête à un professeur. Il n’y a pas de hasard si le terroriste s’en est pris à un enseignant. Si j’étais enseignante, je serais morte de peur, car si ce n’est pas un hasard, cela veut dire que ça va continuer.

Jean-Pierre Chevènement : Le métier d’enseignant a toujours été difficile. Il demande aujourd’hui du courage, en particulier dans certains secteurs. Parce que la situation est ce qu’elle est, la France est faite d’apports très divers, venus aujourd’hui du monde entier, et c’est donc plus difficile qu’à l’époque que j’ai connue. Dans l’école de ma mère, c’était des petits Italiens qu’il fallait intégrer à la France.

(Pause)

Olivier Duhamel : Jean-Pierre Chevènement, auteur de Qui veut risquer sa vie la sauvera, chez Robert Laffont. Si vous permettez, on va faire un zoom arrière et essayer de regarder les choses d’un peu plus loin, et en profondeur, et poser la question suivante : n’y a-t-il pas eu un aveuglement collectif depuis plusieurs années, voire décennies. Lorsque j’ai appris cet évènement, j’étais sur LCI. Nous avons eu en duplex Philippe Val, l’ancien directeur de Charlie Hebdo. Il a été très sévère, considérant qu’on avait laissé s’installer les choses. Je cite ses mots : « De l’ordre de la terreur. On n’a pas voulu voir. Rien n’a été fait de vraiment important. Il va falloir agir mais très vite. » Jean-Pierre Chevènement, ancien ministre de l’Intérieur de juin 1997 à août 2000, écrit quant à lui dans ses mémoires à la page 358 : « Si je croyais au départ, comme Emmanuel Todd, à la formidable capacité d’intégration de la société française, la multiplication des incidents dans nos banlieues avait éveillé ma vigilance quant au désir d’intégration des populations concernées et à la volonté même de la société française d’y parvenir. Sur cette question, la gauche avait longtemps péché par naïveté. J’entendais d’autant plus imprimer à notre politique les moyens d’une conversion républicaine que je voyais avec la montée des communautarismes s’accumuler de lourds nuages à l’horizon. » Je rappelle ce que j’ai dit au début. Jean-Pierre Chevènement évoque ici ce qu’il pensait il y a quasiment un quart de siècle, il y a 23 ans. Jean-Pierre Chevènement, est-ce que cet aveuglement a continué ? Si oui, pourquoi ? S’il n’a pas continué, pourquoi est-ce que les choses ne se sont pas améliorées.

Jean-Pierre Chevènement : Pour revenir sur l’aveuglement, rappelez-vous l’affaire du voile au collège de Creil en 1989. Cela fait plus de 30 ans. Revenons un peu plus encore en arrière : la prise du pouvoir par l’ayatollah Khomeini en Iran en 1979, et la même année l’occupation des lieux saints de La Mecque par des extrémistes sunnites qu’on envoie ensuite en Afghanistan mener le djihad contre les Soviétiques. Tous ces faits je les voyais déjà à l’horizon. J’étais déjà très sensible à la montée de l’islamisme radical quand il était déjà possible de le conjurer. Si j’ai pris la position que j’ai prise au moment de la guerre du Golfe, c’est parce que j’avais compris qu’en brisant l’échine de l’État irakien, on allait ouvrir la voie à l’extrémisme sunnite : Al-Qaïda et Daech, tout en installant l’Iran en puissance prépondérante au Moyen-Orient.

Olivier Duhamel : Contrairement à ce que vous pensez, vous n’avez pas toujours eu raison sur tout. Mais sur ce point-là vous aviez un point de vue extrêmement minoritaire (je parle de la première guerre du Golfe en 1991) et que, le temps passant, de plus en plus de gens vous donnent raison.

Jean-Pierre Chevènement : C’est vrai. Il ne faut pas oublier cependant qu’il y a des facteurs endogènes dans l’islam, autrement dit je fais bien la distinction entre l’islam (1 milliard et demi d’humains) et l’islamisme radical qui précisément est représenté par une tradition ancienne : le hanbalisme, la tradition du djihad, le wahhabisme depuis le XVIIIe siècle, les Frères musulmans depuis la chute du califat ottoman (1924-1928). Ces deux courants, le wahhabisme et les Frères musulmans, expriment naturellement cet islam radical que nous avons devant nous et qu’il faut combattre. Essayons de bien comprendre le monde dans lequel nous vivons pour cibler l’adversaire exactement. Rien ne serait pire que l’hystérisation de tout cela entre l’Occident, l’Europe et le monde musulman.

Catherine Nay : Vous avez dit tout à l’heure que vous avez réagi avant tout le monde, et avant la gauche, sur ces question-là. Vous parlez d’un moment où il était encore possible d’éradiquer l’islamisme radical montant. Pensez-vous que c’est très difficile, voire impossible aujourd’hui ?

Jean-Pierre Chevènement : Ce n’est pas impossible. Il faut aider les musulmans. Le président de la République a dit que l’islam était partout en crise. C’est vrai, mais il doit surmonter cette crise. Cette crise est celle de la modernité. Il faut qu’il sorte d’interprétations littéralistes qui le conduisent naturellement dans le mur. Il faut compter sur les musulmans eux-mêmes pour se reprendre et pour dominer cette question, pour mettre à l’écart la minorité fanatique qui leur fait du mal. Je pense qu’il y a des forces dans les sociétés musulmanes qui sont hostiles à l’islamisme. Nous devons être capables de choisir.

Olivier Duhamel : On va revenir à la fin de l’émission sur ce point très important puisque maintenant il faut se poser la question de ce qu’il faut faire pour faire reculer l’islamisme radical.

(Pause)

Notre invité, Jean-Pierre Chevènement, auteur de Qui veut risquer sa vie la sauvera, qui a été, je le répète, ministre de l’Intérieur. Depuis 1982, il y a eu 33 attentats islamistes. Depuis 2015, il y en a eu seulement 25, pour 61 déjoués. Et 32 déjoués depuis 2017. J’ai une première question tout d’abord. Je n’ai pas du tout la réponse, je suis donc obligé de vous la poser. Comment expliquer qu’entre 1996 et 2011, notamment pendant les trois années où vous étiez ministre de l’Intérieur, il n’y a pas eu d’attentat islamiste en France ? Avez-vous une explication ?

Jean-Pierre Chevènement : J’ai une explication. Le GIA (Groupe islamique armé) a commencé à être sérieusement affaibli. Ses échecs patents avaient frappé les imaginations. Rappelez-vous l’Airbus à Marseille en décembre 1994, rappelez-vous les attentats du RER et l’attentat raté de Khaled Kelkal sur un TGV. Disons qu’on pouvait avoir l’impression que cet islamisme territorialisé, puisqu’il avait quelque chose avec les évènements en Algérie, était dominé parce qu’en même temps en Algérie les islamistes avaient le dessous.

Olivier Duhamel : Le GIA était finissant et Al-Qaïda et Daech n’était pas encore là.

Jean-Pierre Chevènement : Il n’était pas encore là et la France n’était pas encore, je dirais, impliquée dans les guerres du Moyen-Orient. Elle n’avait plus de soldats là-bas. Nous étions en quelque sorte dans une période relativement à couvert.

Catherine Nay : Vous voulez dire par-là que c’est un danger pour la France aujourd’hui que d’être présente au Mali.

Jean-Pierre Chevènement : Je pense que nous n’avons pas le choix. Nous sommes environnés de pays en crise, en Afrique du Nord, en Libye, en Égypte, en Irak, au Liban, etc. C’est un chaudron. Il faut savoir la moins mauvaise politique possible. S’agissant du Mali aujourd’hui, malheureusement c’est une guerre qui s’est étendue au Sahel et qui pourrait emporter toute l’Afrique de l’Ouest, voire toute l’Afrique. Des djihadistes sont très actifs au Nigéria (pensons à Boko Haram), au Mozambique, en République démocratique du Congo, etc. C’est un combat de longue durée qu’il faut voir dans toute sa perspective historique. Pour cela, il faut bien choisir nos cibles.

Olivier Duhamel : Ce sont des éclairages géopolitiques très intéressants pour nos auditeurs. J’ai une autre question un peu difficile à vous poser. Vous n’êtes pas droit de l’hommiste mais vous êtes attaché aux libertés et aux droits fondamentaux. Lorsque se produisent des actes terrifiants comme celui d’hier, une partie de la population, et une partie des acteurs politiques font des propositions qui sont parfois contraires à des principes fondamentaux de notre droit pénal civilisé, de notre démocratie. Par exemple des gens disent que les personnes qui ont été condamnés pour liens avec le terrorisme et ont purgé leur peine doivent rester en prison. Peut-on recourir à des mesures qui piétinent nos droits fondamentaux ?

Jean-Pierre Chevènement : Il y avait une exception, la double peine, que j’avais maintenue lorsque j’étais ministre de l’Intérieur. On pouvait interdire du territoire national des gens qui s’étaient rendus coupables de crimes terroristes.

Olivier Duhamel : Et quand ils sont français ?

Jean-Pierre Chevènement : Cela pose un problème particulier mais on peut les assigner à résidence. Il faut faire preuve d’un peu d’imagination. Le problème n’est certainement pas simple, mais il y a beaucoup à faire au niveau de la justice. Celle-ci doit être sensible aux problèmes que nous pose, dans la durée, l’islamisme radical.

Olivier Duhamel : On aborde finalement la question la plus difficile, je crois, mais aussi la plus nécessaire. Celle-ci va au-delà des strictes mesures sécuritaires, du renforcement du renseignement, de l’infiltration, des attentats déjoués en amont. Comment mener le combat, et je ne dis pas la guerre car nous ne sommes pas en guerre contre un État, contre l’islamisme radical ? Comment éviter que plus de gens se radicalisent et se radicalisent encore, au-delà même du fait de déjouer les attentats ? Écoutez le président de la République disant qu’il faut le faire, sans pour autant dire comment.

(Enregistrement)

Avec Catherine Nay, nous évoquions pendant la pause le fait que, pour nous, le « ils ne passeront pas » d’Emmanuel Macron rappelait le « No pasarán » des Républicains espagnols face au fascisme. On se disait que c’était une curieuse référence étant donné que les fascistes sont passés. Vous nous avez alors dit qu’il y avait une autre référence. Laquelle ?

Jean-Pierre Chevènement : La bataille de la Marne. Les deux batailles de la Marne en 1914 et en juin-juillet 1918 quand l’armée allemande renforcée par les divisions venues de Russie, puisque la Russie avait mis bas les armes, ont essayé de l’emporter dans une dernière manœuvre avant l’arrivée des troupes américaines.

Olivier Duhamel : Évidemment que le président de la République avait cela en mémoire lorsqu’il a repris cette expression. « Les actes sont là et seront là » : j’imagine qu’il s’agit pour le coup d’une référence implicite au projet de loi à l’origine dit contre le séparatisme mais, sur le fond, pour lutter contre l’islamisme radical.

Catherine Nay : On ne sait pas ce qu’il y aura dans cette loi. Elle sera présentée le 9 décembre en conseil des ministres, soit le jour anniversaire de la loi de 1905. Il faudra voir ce qu’il y aura dedans pour empêcher ces gens de ne pas passer, alors qu’ils sont déjà là, qu’ils occupent le terrain et qu’ils sévissent presque tous les jours.

Olivier Duhamel : Il y a quand même des choses annoncées qui, si j’ai bien compris, sont dans l’esprit de ce que vous avez tenté le premier lorsque vous étiez ministre de l’Intérieur, en charge des cultes. Vous évoquez la volonté de créer un Islam de France, à la page 337 de votre livre. Certains comme Hakim El Karoui vous suivent de longue date sur le contrôle des financements, sur la transparence des comptes dans les associations, sur la formation des imams, sur un financement qui ne serait pas lié à l’étranger.

Jean-Pierre Chevènement : Je veux revenir sur l’appel à l’unité par le président de la République qui voit que notre pays est menacé de tous les côtés : risque islamiste, risque sanitaire, effondrement de l’économie, plans sociaux à l’horizon, etc. Tant que nous avons besoin d’unité, de rassemblement, pour aller à l’essentiel. S’agissant de l’islamisme radical, nous devons nous appuyer sur les musulmans français qui veulent absolument terrasser ce mal.

Catherine Nay : Vous trouvez qu’on les entend suffisamment ?

Jean-Pierre Chevènement : C’est à eux de se faire entendre. Olivier Duhamel a évoqué la consultation que j’ai lancée sur l’islam dont Nicolas Sarkozy a tiré le CFCM qui doit certainement être perfectionné pour être mieux associé à la sélection des imams, à leur formation, à des habilitations qui pourraient être données ou retirées. Tout cela ça fait partie de la loi contre le séparatisme. Et je voudrais souligner le rôle de la FIF (la Fondation pour l’islam de la France) qui est une fondation laïque, éducative et culturelle, confiée à Ghaleb Bencheikh, et qui peut faire un travail de formation à la loi républicaine pour enseigner la République à ceux qui visiblement l’ignorent.

Olivier Duhamel : Ce qui est essentiel. Et ce sera le dernier mot avec la chanson. Je reviens sur ce que vous avez dit concernant l’appel à l’unité lancé par le président. Je pense que parfois les choix des hommes politiques aux responsabilités sont dictés par la force des évènements. À un moment de sa vie, Macron a été chevènementiste, puis il est devenu le symbole de l’européisme, de la mondialisation, de l’ordolibéralisme allemand. Depuis la crise de la pandémie d’une part, et compte tenu de ce qui vient de se passer, peut-on dire que les évènements le font revenir à ses origines chevènementistes ?

Jean-Pierre Chevènement : Je m’interdis tout commentaire à ce sujet. Je ne vais pas tirer la couverture dans mon sens. Je vous en laisse la responsabilité. Je dis que naturellement Emmanuel Macron est confronté à d’immenses défis. Il y fait face. Je ne me sens pas d’humeur à participer à tous ceux qui visent à le décrédibiliser ou à lui tirer le tapis sous les pieds. Je pense que dans ce moment-là nous devons faire bloc.

Olivier Duhamel : Il faut que nous fassions bloc ! Chevènement reprend les mots de Macron, qui lui-même reprend des idées fortes de Chevènement. Ainsi va notre histoire politique. Nous allons avoir un extrait d’une chanson pour finir, d’une chanson gaie sur la résurrection, pour vous qui avez revécu en 1998. Vous dites dans votre livre que les Français se souviennent de vous comme un ministre ayant dit qu’un ministre devait fermer sa gueule ou démissionner, et comme quelqu’un étant mort avant de ressusciter.

Jean-Pierre Chevènement : Je n’ai pas vraiment rencontré la mort. La mort et moi, nous nous sommes frôlés.

Olivier Duhamel : C’est une chanson de Gilbert Bécaud qui est une ode à la vie : « Si je pouvais revivre un jour ma vie ».

(Enregistrement)

Ce matin, grâce à vous Jean-Pierre Chevènement, nous sommes allés en profondeur sur des réflexions nécessaires après le drame terrible qui s’est produit hier. Je vous en suis reconnaissant et je rappelle une dernière fois qu’il faut lire votre livre Qui veut risquer sa vie la sauvera. Merci à Catherine Nay de participer si intensément à cette émission, et merci à tous ceux qui contribué à la produire.

Source : Mediapolis- Europe 1


Rédigé par Chevenement.fr le Vendredi 23 Octobre 2020 à 20:45 | Lu 1414 fois



1.Posté par Affectif RETOUR le 01/03/2023 03:53
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