Extrait de Paris Match
Paris Match: Qu’est-ce qui vous a poussé à réagir par voie de communiqué à la victoire électorale de la N-VA et de Bart De Wever ?
Jean-Pierre Chevènement: J’ai fait un communiqué parce que, bien évidemment, la poussée de cette formation séparatiste pose beaucoup de questions quant au devenir de la Belgique. Des questions auxquelles les Français ne sont pas indifférents même s’ils ne désirent pas s’ingérer dans les affaires belges. J’ai simplement souligné le fait que les Wallons, et les Francophones plus généralement, ne sont pas contraints de négocier le dos au mur. Par conséquent, j’ai rappelé que si la Flandre voulait devenir indépendante et si, comme l’a dit Bart De Wever, il s’agissait de faire s’évaporer la Belgique, les francophones doivent savoir qu’une majorité de Français - 66 % d’après les sondages -, seraient près à les accueillir au sein de la République française. Mais seulement s’ils en exprimaient le souhait dès lors que cela ne pourrait se faire que sur base de l’autodétermination et, bien entendu, si l’hypothèse de l’évaporation de la Belgique devait se concrétiser.
Jean-Pierre Chevènement: J’ai fait un communiqué parce que, bien évidemment, la poussée de cette formation séparatiste pose beaucoup de questions quant au devenir de la Belgique. Des questions auxquelles les Français ne sont pas indifférents même s’ils ne désirent pas s’ingérer dans les affaires belges. J’ai simplement souligné le fait que les Wallons, et les Francophones plus généralement, ne sont pas contraints de négocier le dos au mur. Par conséquent, j’ai rappelé que si la Flandre voulait devenir indépendante et si, comme l’a dit Bart De Wever, il s’agissait de faire s’évaporer la Belgique, les francophones doivent savoir qu’une majorité de Français - 66 % d’après les sondages -, seraient près à les accueillir au sein de la République française. Mais seulement s’ils en exprimaient le souhait dès lors que cela ne pourrait se faire que sur base de l’autodétermination et, bien entendu, si l’hypothèse de l’évaporation de la Belgique devait se concrétiser.
Etes-vous attentif depuis longtemps à l’évolution de la situation communautaire en Belgique ?
Oui, j’y suis attentif parce que c’est un mouvement de fond qui remonte au début du siècle précédent. Je le vois se développer comme une revendication de type national qui met aujourd’hui en jeu l’existence de la Belgique telle qu’elle a été construite en 1830, même si elle a évolué par la suite, passant de l'État unitaire à l'État Fédéral. J’observe donc ce qui se passe chez vous de longue date et je suis notamment informé de la façon dont certains Flamands veulent remettre en cause les droits linguistiques des francophones de l’arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde. Or, je trouve qu’au cœur de l’Europe, il est souhaitable qu’une minorité – même si elle majoritaire dans certaines communes, - puisse s’exprimer dans sa langue. C’est un droit de l’homme après tout.
La Belgique expérimente sur son sol les poussées autonomistes, voire les tensions nationalistes, dont on observe de plus en plus de manifestations ailleurs en Europe. Trouvez-vous cela inquiétant ?
Je pense que ces tendances sont en effet préoccupantes dans la mesure où elles s’opposent à la conception républicaine de la nation à laquelle nous sommes traditionnellement attachés en France, à savoir qu’une nation se définit comme une communauté de citoyens. Mais dès qu’on propose une définition de la nation fondée sur l’ethnicité, cela nous ramène aux débats du XIXe siècle. On a par exemple vu s’affronter ces deux conceptions dans le cadre de la controverse historique au sujet de l’Alsace-Lorraine. Les Alsaciens-Lorrains souhaitaient demeurer Français, mais cette volonté fut remise en cause par le traité de Francfort, considérant qu’à partir du moment où l’ethnie dominante en Alsace-Moselle était alémanique ou francienne, il devenait parfaitement légitime de rattacher l’Alsace-Lorraine à l’Empire allemand. En 1882, à la Sorbonne, Ernest Renan donnait une conférence demeurée célèbre sur le thème « Qu’est-ce qu’une nation ? », dans laquelle il opposait les deux conceptions dont nous parlons. Près d’un siècle et demi plus tard, en Belgique comme ailleurs, la question est encore de savoir si l’on souhaite s’inscrire dans le cadre d’une nation citoyenne ou d’une nation ethnique.
Alors, comment appréhendez-vous les revendications nationalistes flamandes dans le cadre de l’Europe de Maastricht à laquelle on vous sait hostile, précisément parce qu’elle nierait les nations selon votre analyse ?
Par rapport à Maastricht, je dis qu’en méconnaissant la diversité des nations qui composent l’Europe, on a bâti quelque chose de très artificiel qui s’appelle la monnaie unique, en crise actuellement. Mais je parle là des nations telles qu’elles sont constituées au sein de la zone euro, ayant chacune des structures économiques, des politiques économiques, des repères culturels et des principes différents. En revanche, la volonté autonomiste flamande pose – et j’y reviens -, le problème de la conception ethnique ou citoyenne de la nation. Ça, c’est une affaire que les citoyens belges doivent débrouiller. En tant que Français, nous sommes au résultat comme on dit en langage footballistique. Maintenant, un peuple se définit par la volonté. Si les Flamands, qui ont incontestablement un sentiment d’identité propre, décidaient de devenir indépendants, je n’aurais rien à y objecter. Un peuple, ça se constitue et ça vit.
Mais au-delà de l’aspect ethnique, les revendications flamandes participent également d’une remise en cause fondamentale du principe de solidarité entre une région prospère et une autre qui l’est moins…
La même chose pourrait se faire à l’initiative des Catalans vis-à-vis des Espagnols, la Catalogne étant plus riche. Ou encore de la part des Lombards et des Piémontais à l’égard des Napolitains et des Siciliens. C’est d’ailleurs ce à quoi on a assisté en ex-Yougoslavie : les républiques qui ont voulu faire sécession, la Slovénie et la Croatie, étaient plus riches que la Serbie, le Monténégro et la Macédoine. Ceci étant, vous avez raison, c’est une atteinte au principe de la solidarité nationale. Mais dès le moment où vous niez la réalité de la nation, la solidarité nationale ne suit plus fatalement.
Revenons au scénario du rattachement à la France. En dépit des sondages, croyez-vous que les Français sont véritablement prêts à accueillir les francophones de Belgique au sein de la république ?
Je le répète, si les francophones le souhaitaient et le demandaient par référendum et si, en toute hypothèse, les flamands prenaient leur indépendance - conditions qui ne sont pas aujourd’hui réunies -, je trouverais juste de les accueillir dans la République française sous un statut à déterminer. Ça pourrait être le statut actuel avec un simple rattachement de la sécurité sociale wallonne à la sécurité sociale française. Mais ça mériterait naturellement que l’on regarde ça de plus près le cas échéant. Ceci étant, je vous accorde qu'à l’heure qu’il est, la question de l'éventuel éclatement de la Belgique n’étant pas posée, les Français ont d'autres préoccupations. D'autant qu'ils se trouvent actuellement confrontés à un affaiblissement de la conscience nationale. On a connu des époques comparables, notamment dans les années 30, quand la France ne savait plus vraiment où se situer, regardant vers Rome, Moscou ou encore Berlin. Avec l'adoption du traité de Maastricht, nos élites de droite et de gauche ont propagé l'idée selon laquelle l’Europe se substituait à la France. L'Europe devenait notre horizon et notre patrie. Mais il s'agit en l'occurrence d’une Europe supranationale, ou postnationale, plutôt qu'une Europe des nations pour laquelle j’exprime ma préférence parce que je crois qu’elle est plus réaliste et, qu'en outre, la nation reste le cadre de la démocratie et le lieu de la solidarité. On le voit du reste avec le problème de la sécurité sociale que vous soulevez. Bref, en ce moment, les Français aspirent surtout à ce qu’on leur redonne un projet national valorisant, républicain, parfaitement compatible avec la construction d’une Europe des peuples. Ce ne sera pas un projet de fermeture nationaliste, auquel cas je m’y opposerais. Ils ont besoin qu’on situe mieux la France dans le monde du début du XXIe siècle où l’on voit que l’Europe, et pas seulement la France, poursuit un déclin accéléré.
Les responsables politiques français ne semblent pas non plus manifester un grand intérêt pour le futur de la Belgique. Est-ce le cas ?
Ça l'est et je le regrette. Je crois que cela tient en partie au fait qu’aucun d'eux ne veut jeter de l’huile sur le feu en ce moment. Ceci étant, je pense qu’ils devraient malgré tout se montrer plus attentifs au respect de droits légitimes ainsi qu'à celui de principes démocratiques menacés à quelques kilomètres de Bruxelles.
En cas de scission du pays, quel pourrait être le statut de Bruxelles d'après vous ? Etes-vous partisan de l’idée de certains d’en faire un district fédéral européen sur le modèle de Washington ?
Il appartient aux habitants de la Région bruxelloise de se déterminer si la Flandre devait choisir la voie de l'indépendance. Je ne vais pas me substituer à eux. Ils auraient le choix entre la Flandre, la Wallonie et une entité autonome abritant les institutions européennes. Quant à l’idée de faire de Bruxelles un district fédéral européen, je rappelle que l’Europe n’est pas une fédération. C’est, selon la Cour constitutionnelle de Karlsruhe : une organisation internationale qui met certes en commun un certain nombre de compétences, mais ce n’est pas une fédération. Par conséquent, il faut éviter de faire un district fédéral sans fédération.
Quitte à faire de la politique fiction, imaginons que Bruxelles et la Wallonie rejoignent l'Hexagone. Ne craignez-vous pas que l’Allemagne et la Grande-Bretagne voient d'un mauvais œil le passage des institutions européennes et du siège de l'Otan dans le giron de la France ?
Nous ne sommes plus au lendemain de Waterloo où tous les Européens craignaient de voir l’impérialisme français se réveiller à nouveau. Tout cela est dépassé. Il faudrait trouver des arrangements, mais c’est du détail.
Waterloo, justement. Dans son livre « Mélancolie française », Eric Zemmour considère que la Belgique est la résultante de la défaite de Napoléon et, par conséquent, une création artificielle qui n'aurait jamais vu le jour autrement. Votre avis ?
La défaite de Napoléon a Waterloo a eu des conséquences immenses. Pour la France, c’est une page d'histoire qui se tourne. À partir de 1815, le conflit d’hégémonie entre la France et l’Angleterre est tranché au bénéfice de cette dernière qui va imposer une Belgique neutre en 1830. Grâce aux bons offices de Taleyrand, elle met sur le trône un Saxe-Cobourg marié à une fille de Louis-Philippe. C’est alors de la grande diplomatie !
Quelle image avez-vous des Belges et de la Belgique ?
J’ai beaucoup de sympathie pour la Belgique et les Belges en général. Je vais toujours très volontiers à Bruxelles. J’ai visité Bruges avec mon épouse il y a quelques années et nous avons beaucoup aimé. D’ailleurs la Gaule Belgique au temps de César allait jusqu’à Belfort et je suis très fier d’être belge de réputation, les Belges étant, selon l’auteur de « La guerre des Gaules », les plus braves des Gaulois.
Entretenez-vous des contacts avec des dirigeants belges ou d'autres personnalités ?
A une époque, j’ai bien connu Etienne Davignon. J’ai plus récemment rencontré Louis Michel, notamment lorsqu’il était ministre des affaires étrangères. Je connais Elio Di Rupo, de réputation, mais sans l’avoir rencontré.
Oui, j’y suis attentif parce que c’est un mouvement de fond qui remonte au début du siècle précédent. Je le vois se développer comme une revendication de type national qui met aujourd’hui en jeu l’existence de la Belgique telle qu’elle a été construite en 1830, même si elle a évolué par la suite, passant de l'État unitaire à l'État Fédéral. J’observe donc ce qui se passe chez vous de longue date et je suis notamment informé de la façon dont certains Flamands veulent remettre en cause les droits linguistiques des francophones de l’arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde. Or, je trouve qu’au cœur de l’Europe, il est souhaitable qu’une minorité – même si elle majoritaire dans certaines communes, - puisse s’exprimer dans sa langue. C’est un droit de l’homme après tout.
La Belgique expérimente sur son sol les poussées autonomistes, voire les tensions nationalistes, dont on observe de plus en plus de manifestations ailleurs en Europe. Trouvez-vous cela inquiétant ?
Je pense que ces tendances sont en effet préoccupantes dans la mesure où elles s’opposent à la conception républicaine de la nation à laquelle nous sommes traditionnellement attachés en France, à savoir qu’une nation se définit comme une communauté de citoyens. Mais dès qu’on propose une définition de la nation fondée sur l’ethnicité, cela nous ramène aux débats du XIXe siècle. On a par exemple vu s’affronter ces deux conceptions dans le cadre de la controverse historique au sujet de l’Alsace-Lorraine. Les Alsaciens-Lorrains souhaitaient demeurer Français, mais cette volonté fut remise en cause par le traité de Francfort, considérant qu’à partir du moment où l’ethnie dominante en Alsace-Moselle était alémanique ou francienne, il devenait parfaitement légitime de rattacher l’Alsace-Lorraine à l’Empire allemand. En 1882, à la Sorbonne, Ernest Renan donnait une conférence demeurée célèbre sur le thème « Qu’est-ce qu’une nation ? », dans laquelle il opposait les deux conceptions dont nous parlons. Près d’un siècle et demi plus tard, en Belgique comme ailleurs, la question est encore de savoir si l’on souhaite s’inscrire dans le cadre d’une nation citoyenne ou d’une nation ethnique.
Alors, comment appréhendez-vous les revendications nationalistes flamandes dans le cadre de l’Europe de Maastricht à laquelle on vous sait hostile, précisément parce qu’elle nierait les nations selon votre analyse ?
Par rapport à Maastricht, je dis qu’en méconnaissant la diversité des nations qui composent l’Europe, on a bâti quelque chose de très artificiel qui s’appelle la monnaie unique, en crise actuellement. Mais je parle là des nations telles qu’elles sont constituées au sein de la zone euro, ayant chacune des structures économiques, des politiques économiques, des repères culturels et des principes différents. En revanche, la volonté autonomiste flamande pose – et j’y reviens -, le problème de la conception ethnique ou citoyenne de la nation. Ça, c’est une affaire que les citoyens belges doivent débrouiller. En tant que Français, nous sommes au résultat comme on dit en langage footballistique. Maintenant, un peuple se définit par la volonté. Si les Flamands, qui ont incontestablement un sentiment d’identité propre, décidaient de devenir indépendants, je n’aurais rien à y objecter. Un peuple, ça se constitue et ça vit.
Mais au-delà de l’aspect ethnique, les revendications flamandes participent également d’une remise en cause fondamentale du principe de solidarité entre une région prospère et une autre qui l’est moins…
La même chose pourrait se faire à l’initiative des Catalans vis-à-vis des Espagnols, la Catalogne étant plus riche. Ou encore de la part des Lombards et des Piémontais à l’égard des Napolitains et des Siciliens. C’est d’ailleurs ce à quoi on a assisté en ex-Yougoslavie : les républiques qui ont voulu faire sécession, la Slovénie et la Croatie, étaient plus riches que la Serbie, le Monténégro et la Macédoine. Ceci étant, vous avez raison, c’est une atteinte au principe de la solidarité nationale. Mais dès le moment où vous niez la réalité de la nation, la solidarité nationale ne suit plus fatalement.
Revenons au scénario du rattachement à la France. En dépit des sondages, croyez-vous que les Français sont véritablement prêts à accueillir les francophones de Belgique au sein de la république ?
Je le répète, si les francophones le souhaitaient et le demandaient par référendum et si, en toute hypothèse, les flamands prenaient leur indépendance - conditions qui ne sont pas aujourd’hui réunies -, je trouverais juste de les accueillir dans la République française sous un statut à déterminer. Ça pourrait être le statut actuel avec un simple rattachement de la sécurité sociale wallonne à la sécurité sociale française. Mais ça mériterait naturellement que l’on regarde ça de plus près le cas échéant. Ceci étant, je vous accorde qu'à l’heure qu’il est, la question de l'éventuel éclatement de la Belgique n’étant pas posée, les Français ont d'autres préoccupations. D'autant qu'ils se trouvent actuellement confrontés à un affaiblissement de la conscience nationale. On a connu des époques comparables, notamment dans les années 30, quand la France ne savait plus vraiment où se situer, regardant vers Rome, Moscou ou encore Berlin. Avec l'adoption du traité de Maastricht, nos élites de droite et de gauche ont propagé l'idée selon laquelle l’Europe se substituait à la France. L'Europe devenait notre horizon et notre patrie. Mais il s'agit en l'occurrence d’une Europe supranationale, ou postnationale, plutôt qu'une Europe des nations pour laquelle j’exprime ma préférence parce que je crois qu’elle est plus réaliste et, qu'en outre, la nation reste le cadre de la démocratie et le lieu de la solidarité. On le voit du reste avec le problème de la sécurité sociale que vous soulevez. Bref, en ce moment, les Français aspirent surtout à ce qu’on leur redonne un projet national valorisant, républicain, parfaitement compatible avec la construction d’une Europe des peuples. Ce ne sera pas un projet de fermeture nationaliste, auquel cas je m’y opposerais. Ils ont besoin qu’on situe mieux la France dans le monde du début du XXIe siècle où l’on voit que l’Europe, et pas seulement la France, poursuit un déclin accéléré.
Les responsables politiques français ne semblent pas non plus manifester un grand intérêt pour le futur de la Belgique. Est-ce le cas ?
Ça l'est et je le regrette. Je crois que cela tient en partie au fait qu’aucun d'eux ne veut jeter de l’huile sur le feu en ce moment. Ceci étant, je pense qu’ils devraient malgré tout se montrer plus attentifs au respect de droits légitimes ainsi qu'à celui de principes démocratiques menacés à quelques kilomètres de Bruxelles.
En cas de scission du pays, quel pourrait être le statut de Bruxelles d'après vous ? Etes-vous partisan de l’idée de certains d’en faire un district fédéral européen sur le modèle de Washington ?
Il appartient aux habitants de la Région bruxelloise de se déterminer si la Flandre devait choisir la voie de l'indépendance. Je ne vais pas me substituer à eux. Ils auraient le choix entre la Flandre, la Wallonie et une entité autonome abritant les institutions européennes. Quant à l’idée de faire de Bruxelles un district fédéral européen, je rappelle que l’Europe n’est pas une fédération. C’est, selon la Cour constitutionnelle de Karlsruhe : une organisation internationale qui met certes en commun un certain nombre de compétences, mais ce n’est pas une fédération. Par conséquent, il faut éviter de faire un district fédéral sans fédération.
Quitte à faire de la politique fiction, imaginons que Bruxelles et la Wallonie rejoignent l'Hexagone. Ne craignez-vous pas que l’Allemagne et la Grande-Bretagne voient d'un mauvais œil le passage des institutions européennes et du siège de l'Otan dans le giron de la France ?
Nous ne sommes plus au lendemain de Waterloo où tous les Européens craignaient de voir l’impérialisme français se réveiller à nouveau. Tout cela est dépassé. Il faudrait trouver des arrangements, mais c’est du détail.
Waterloo, justement. Dans son livre « Mélancolie française », Eric Zemmour considère que la Belgique est la résultante de la défaite de Napoléon et, par conséquent, une création artificielle qui n'aurait jamais vu le jour autrement. Votre avis ?
La défaite de Napoléon a Waterloo a eu des conséquences immenses. Pour la France, c’est une page d'histoire qui se tourne. À partir de 1815, le conflit d’hégémonie entre la France et l’Angleterre est tranché au bénéfice de cette dernière qui va imposer une Belgique neutre en 1830. Grâce aux bons offices de Taleyrand, elle met sur le trône un Saxe-Cobourg marié à une fille de Louis-Philippe. C’est alors de la grande diplomatie !
Quelle image avez-vous des Belges et de la Belgique ?
J’ai beaucoup de sympathie pour la Belgique et les Belges en général. Je vais toujours très volontiers à Bruxelles. J’ai visité Bruges avec mon épouse il y a quelques années et nous avons beaucoup aimé. D’ailleurs la Gaule Belgique au temps de César allait jusqu’à Belfort et je suis très fier d’être belge de réputation, les Belges étant, selon l’auteur de « La guerre des Gaules », les plus braves des Gaulois.
Entretenez-vous des contacts avec des dirigeants belges ou d'autres personnalités ?
A une époque, j’ai bien connu Etienne Davignon. J’ai plus récemment rencontré Louis Michel, notamment lorsqu’il était ministre des affaires étrangères. Je connais Elio Di Rupo, de réputation, mais sans l’avoir rencontré.