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Contre le traité de Lisbonne


Tribune de Jean-Pierre Chevènement parue dans Valeurs actuelles, vendredi 23 novembre 2007.
En reprenant la substance de la Constitution rejetée, ce traité nourit la désaffection populaire à l'égard de l'Europe.


Contre le traité de Lisbonne
M. Sarkozy prétend avoir couvert par son élection le rejet par 55 % des Français du « projet de Constitution européenne », le 29 mai 2005. Rien n’est moins vrai : M. Sarkozy, pendant sa campagne, avait évoqué un « mini traité », un « traité simplifié » qui pourrait être adopté par la voie parlementaire. Mais le traité de Lisbonne est tout le contraire : il reprend sur 256 pages la « substance » de la Constitution européenne. M. Giscard d’Estaing le reconnaît, même s’il déplore que son enfant ait été saucissonné en articles modificatifs, ce qui le rend le particulièrement illisible, même pour des parlementaires chevronnés. Le subterfuge est manifeste ! La tromperie est énorme ! M. Sarkozy s’asseoit sur la volonté populaire. Il pourra certes répondre que les socialistes – ou du moins leur direction – en font autant et même davantage, puisque c’est au mépris de leur propre engagement de procéder à un nouveau référendum qu’ils viennent de dire « oui » au traité de Lisbonne. C’est vraiment le seul succès dont M. Sarkozy puisse se targuer, car le nouveau traité ne respecte aucune des promesses qu’il avait multipliées pendant sa campagne de redresser la construction européenne, en instaurant un gouvernement économique de la zone euro, en luttant contre l’euro cher, en instaurant enfin une préférence communautaire aux frontières de l’Union européenne.

Rien de tout cela n’apparaît dans le nouveau traité : M. Sarkozy n’a obtenu aucune contrepartie à toutes les concessions qu’il a faites à Angela Merkel. Il y a un abîme entre les résultats que prétend avoir obtenus M. Sarkozy, dans son discours de Strasbourg du 2 juillet 2007, et la réalité des textes.

Le traité de Lisbonne mérite toutes les critiques faites à la « Constitution européenne ». Un champ immense de nouvelles compétences (art. 3 à 6) est transféré à l’Union européenne. Le vote à la majorité qualifiée s’appliquera à une quarantaine de nouveaux domaines. Ainsi deux instances européennes majeures, dépourvues de légitimité démocratique, la Commission, détentrice du monopole de l’initiative, et la Cour de Justice, chargée, quant à elle, d’interpréter la Charte des Droits fondamentaux, étendront leurs pouvoirs déjà colossaux, au détriment du Parlement français.

Ce nouveau démantèlement de la souveraineté nationale est d’autant plus grave que la parité des votes au Conseil européen entre la France et l’Allemagne, actée dès 1951 par Konrad Adenauer et Jean Monnet comme la base immuable de la construction européenne est rompue par la prise en compte de la démographie. Chacun sait qu’à cet égard la France ne pèse que les trois quarts de l’Allemagne. Bonjour les minorités de blocage !

La marginalisation de la France est également sensible en politique extérieure. Elle ne pourra plus prendre aucune initiative sans en référer au préalable au Conseil européen (article 17 bis). De même, notre statut de membre permanent du Conseil de Sécurité est fortement encadré par l’obligation qui nous est faite de demander l’audition par celui-ci du « Haut Représentant de l’Union pour la politique extérieure », chaque fois que le Conseil des ministres des affaires étrangères, qu’il préside par ailleurs, aura pris une position en matière internationale (art. 19).

Enfin, la défense européenne devra être « conforme avec les engagements souscrits dans le cadre de l’OTAN par les Etats qui en sont membres », c’est-à-dire la majorité et en tout cas ceux qui comptent (art. 27). Exit donc l’idée d’une défense indépendante ! La vassalisation de l’Europe est ainsi consommée par le traité de Lisbonne.

M. Sarkozy peut bien se targuer d’avoir fait disparaître le mot « Constitution ». Un traité qu’on ne peut modifier qu’à l’unanimité des vingt-sept Etats membres est au moins aussi contraignant.

Ce n’est pas s’avancer beaucoup que de prédire une nouvelle et profonde crise de la démocratie et une désaffection redoublée à l’égard d’une Europe que nos gouvernants avaient une occasion historique de redresser, en s’appuyant sur la volonté populaire.

Quand les inévitables difficultés économiques à venir et les conséquences de l’alignement de notre politique extérieure, en particulier sur l’affaire du Moyen-orient, apparaîtront, alors le peuple français se rendra compte qu’il a été doublement piégé, sans la forme et dans le fond. Le seul véritable coup de maître qu’aura réussi M. Sarkozy aura été d’entraîner le parti socialiste, derrière MM. Kouchner et Jouyet désormais consacrés comme ses « éclaireurs de pointe ». La décrédibilisation de l’opposition n’est pas une bonne chose pour la démocratie.

Pour éviter une colère populaire aveugle, rien n’est sans doute plus important que de songer dès maintenant à rebâtir un recours républicain.


Rédigé par Jean-Pierre Chevènement le Vendredi 23 Novembre 2007 à 10:10 | Lu 9285 fois



1.Posté par la fourmi rouge le 27/11/2007 23:07
Cher Jean-Pierre,


Moi ça me "gène" toutes ces passerelles.



Je préfère rester de gauche.

2.Posté par Claire Strime le 28/11/2007 16:37
Plutôt pasdegauche qu'atlantiste ou ouiouiste eurobéat... (j'ai gardé le système de réflexion binaire de la guerre froide).

3.Posté par la fourmi rouge le 28/11/2007 17:47
Pourquoi caricaturer Claire Strime ... "ouiouiste eurobéat" ...?

Gérard Slama, François D'Orcival du Figaro Magazine et Valeurs actuelles ....ainsi que des Nationalistes tels Philippe de Villiers, voire Action Française et FN...

Je regrette...ça ne me rend pas béate...

4.Posté par Claire Strime le 29/11/2007 09:40
Ah fourmi rouge vous retardez de vingt ans, je me souviens qu'à l'époque toute critique des gouvernements Mauroy et Fabius était accusée par les mitterandolâtres de "faire le jeu de la droite". Et il y avait un côté de condamnation morale de la droite (sincère chez certains).
Mais depuis...on peut faire le bilan, la libéralisation des capitaux, les privatisations ça aété au moins le fait de la "gauche" que de la "droite", et puis il y a eu les guerres du Golfe (dont la première en 1991), le TCE jusqu'à la sarkolatrie de certaines des figures de la "gauche morale".
Alors la droite comme épouvantail pour faire gober n'importe quoi c'est bien fini!

5.Posté par ARNARDI roger le 29/11/2007 14:23
Les moyens d'un coup d'Etat se mettent en place.
En annonçant qu'il n'a pas l'intention de soumettre son " Mini traité " à référendum , le Président Nicolas Sarkozi s'asseoit sur la volonté populaire. Et cela , en soi, c'est un coup d'Etat .
Mais pour faire un coup d'Etat, il faut en avoir les moyens matériels . Pour empêcher les coups d'Etat, la République avait mis en place des moyens qui ont fait leur preuve .
1/ Sur le plan militaire, il y avait 3 armées : Terre, Air, Mer avec des Etats Majors différents. En temps de guerre seulement, un généralissime était nommé pour coiffer les trois armées . Or, un état major des armées CEMA vient d'être créé avec le Général H. Bentégeat.
2/ Le Directeur de ia gendarmerie était un civil. Or, un général vient d'être nommé comme Directeur de la Gendarmerie.
3/ La gendarmerie et la police étaient placées sous deux autorités différentes. Or, la gendarmerie et la police viennent d'être placées sous l'autorité du même ministre de l'intérieur.
4/ La DST et les RG étaient placés sous des autorités différentes. Or ces deux polices viennent d'être fusionnées.
N.B. La police et la gendarmerie avaient été placées sous la même autorité de BOUSQUET, par le gouvernement de VICHY.
Sur le plan judiciaire le procureur aura encore le choix entre la police ou la gendarmerie mais jusqu'à quand ?
roger ARNARDI

6.Posté par Claire Strime le 30/11/2007 11:30
Sarkozy ne peut se targuer d'un chèque en blanc àlui donné par son élection en mai dernier: il n'y avait pas précision du contenu de ce que serait un "traité simplifié". Il s'était alors bien gardé de dire que ledit traité reprendrait l'essentiel du contenu du TCE.
Ce TCEbis/TFUE ne peut être mis sur le même plan que la réforme des régimes spéciaux ou la loi sur les universités (annoncées elles aussi pendant la campagne électorale et qui relèvent du pouvoir législatif du Parlement): seul le Peuple pourrait revenir sur son vote solennel du 29 mai 2005.

7.Posté par la fourmi rouge le 30/11/2007 12:18
Vous pouvez argumenter de façon tortueuse pour tenter de contourner l'obstacle en défendant l'indéfendable, voire utliser l'invective, rien n'y fera :

Je ne serai jamais dans le camp des Poujadistes rances de tous poils, ni des Maurassiens.

Excusez-moi, je n'ai pas votre intelligence...et ne comprends rien à rien !

8.Posté par Stéphane Couronne le 25/03/2008 15:16

Bonjour,

Dératifions le mini traité européen simplifié et dénonçons ce scandaleux coup d'Etat, approuvée par notre Assemblée Nationale au début du mois de février, sans le consentement du peuple; il y aura une manifestation non partisane organisée par le "Comité des citoyens européens contre le traité de Lisbonne" le samedi 29 mars de 11h à 13h place de la Sorbonne à Paris.

Bienvenu à vous

9.Posté par Jeune homme le 14/05/2008 11:46
Je trouve son attitude très imprudente car il remet tout les principes de base de la constitution européenne dans son "traité". Il a échoué lors du référendum et n'a apparemmment pas accepté cette défaite.Je suis jeune(17 ans) mais mon avis compte pour moi parce que je suis quand même futur citoyen de France. Merci Monsieur Sarkozy de votre geste sans égal...

10.Posté par Alan Dee O'Sullivan le 15/06/2008 09:16
Bonjour.

Je suis belge et très heureux de savoir que les Irlandais ont votés contre !

Je reste entièrement et résolument anti européen et euroseptique convancu dans tous les sens du terme !

La Belgique ne donne pas la parole au citoyens, tout comme l'union n'en n'a cure !

Le droit de parole appartiens à une caste de privilégiés, là où les choses semblent s'arrangés dans le cadre de leur petits privilèges peu enviables !

Pourtant, ce " traîté " que personne ne veux, ils vous le feront passé à n'importe quel prix, du moment que celà passe, les états ne feront pas de référendu de peur que le peuple se soulève et dise non à leur magouilles !

L'on peu dire, dans tout les cas que la démocratie n'est pas de mise, et l'on nous retire le droit de parler en forçant les gens a se taire !

La dictature démocratique...si c'est l'europe autant les foutres à la porte le plus vite possible...mais le tout est de savoir comment !


Ne vous étonnez point de voir des partis liberticides et nationalistes débarquer pour enrayer le système que vous encouragez a voter pour des partis qui sont occupé a nous muselé de force !

Une Irlandaise disait a juste titre et je la cite : depuis que nous sommes avec l'union européenne, nous voyons débarqués des gens du bloc de l'est nous envahir avec une main d'oeuvre a moins de 250 euros par mois, ce qui casse les mécanismes de protection du travail "

Elle a cent mille pour cent raison !

Finalement, cette europe induit de par l'abolition des frontières et la libre circulation des personnes, une nouvelle forme d'esclavagisme qui se mets au service des nantis !

J'ai toujours en mémoire de ce bolkenstein, ne trouvant pas un plombier pour la réparation de sa maison faire appel à un polonais, travaillant surement en noir, venir faire sa réparation de plomberie dans sa maison de campagne en france !

Voilà l'exemple type d'un fonctionnaire ayant un cerveau de lapin qui n'a pas pris le bottin téléphonique et de regarder la rubrique des plombiers.......les pauvres ont eus beau protestés, c'est un polonais à moindre frais qui c'est occupé du travail.....

Une europe sociale n'existera jamais car ceci arrange ceux qui se servent de la précarité humaine afin de ramener les salaires et les protections sociales au plus bas afin de les asservirs au mieux !

Non, je n'ai ni besoin de cette clique de fonctionnaires avec des salaires honteux, non je n'ai pas besoin de financer des projets qui ne me servent pas dans mon quotidien....

Oui, je voterai pour un partis qui nous sortira de cette europe " merdique " dont je n'en n'ai rien à faire !

Oui à une nation souveraine sur son territoire, non à l'europe incapable de décidé correctement à la proximité des gens, non a tout ce tas de fonctionnaires inutiles qui travaillent pour un dynosaure résolument englué dans ses contradictions !




11.Posté par Jean-Marc le 15/06/2008 11:30
La SEULE solution est transversale :

3 modérés d’envergure nationale : JLM + NDA + JPC
+ rajout du PC & certains Verts si possible
+ exclusion complète des ouistes du projet
+ exclusion de TOUS les extrêmes et TOUS les effrayeurs simplistes

Une ligne claire : République ET Démocratie.

Un objectif : Constituante.

Après, une fois les règles du jeu très profondément refondées, les oligarches corrompus et incompétents écartés, les différences s’exprimeront à nouveau entre gauche et droite, mais dans un système SAIN.

Nota:
Cette constituante pour prendre toute la qualité qu’elle mérite, et mériter le nom de Constituante portée par les citoyens et leurs représentants, devrait intégrer dans le processus même d’élaboration d’autres horizons que le monde politique : Ong, associations, groupes de citoyens sous la forme de conférences de consensus ou d’autres modalités participatives à définir.





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