L’ex-ministre de l’Intérieur ne voit pas l’utilité d’une modification du traité de Schengen. « On tend à faire, pour des raisons électorales, des immigrés le problème central de la société française », affirme le président d’honneur du MRC. Il estime « qu’il faudrait arrêter » la guerre en Libye. « On est en train de passer insensiblement de la responsabilité de protéger les populations civiles, à l’ingérence pure et simple » affirme le sénateur du Territoire de Belfort, qui voit sa candidature à la présidentielle comme « de plus en plus inéluctable ». Il ajoute : « Je sais que beaucoup de gens rêvent de la présidence de la République en se rasant le matin, ça n’a jamais été mon cas. Je considère que c’est d’abord un impérieux devoir à l’égard du pays ». Entretien.
Public Sénat: Faut-il revoir les accords de Schengen, comme le demandent Paris et Rome ?
Jean-Pierre Chevènement: Je pense qu’avec un peu de bonne volonté, les gouvernements européens auraient pu trouver une solution humaine et descente au problème qui se pose, s’agissant notamment des réfugiés libyens ou sahéliens (…) qu’on aurait pu se répartir facilement. S’agissant des tunisiens, ils n’ont pas de raisons politiques de venir en Europe, ce sont des raisons économiques qui les poussent. C’est donc un plan d’aide économique à la Tunisie et à tous les pays de la rive sud de la méditerranée qui est nécessaire.
Maintenant, faut-il revoir le dispositif de Schengen ? Il me semble qu’il y a dans l’article 5 des dispositions qui peuvent permettre d’introduire un minimum de viscosité aux frontières en cas d’afflux majeur. Est-ce aujourd’hui le cas ? Je pense qu’on exagère beaucoup. Et on tend à faire, pour des raisons électorales, des immigrés le problème central de la société française, alors qu’elle connait des difficultés sur le plan de la croissance, du chômage, des inégalités et naturellement il y a un malaise qui se cristallise sur l’immigration. Je ne dis pas qu’il n’y a pas de problèmes qui se posent. Mais il y a quelque chose de malsain, de morbide, dans cette focalisation absurde.
(…) Je pense qu’il y a quand même un arrangement à trouver entre les différents pays européens pour résoudre le problème de ceux qui sont particulièrement concernés. Je pense aux libyens – du fait de la guerre qui sévit en Libye, qu’il faudrait d’ailleurs arrêter – et du point de vue des sahéliens (…).
La répression continue en Syrie contre les manifestants au régime. Faut-il que la France s’engage en Syrie comme elle l’a fait en Libye ?
Il faudrait s’engager partout à ce moment-là. On peut condamner ce qui se passe en Syrie et apporter un traitement humain à ceux qui voudraient quitter ce pays, mais on ne peut pas intervenir partout, ça n’a pas de sens. En Libye on est en train de passer insensiblement de la responsabilité de protéger les populations civiles, à l’ingérence pure et simple. Quand on détruit les appartements ou les bureaux du conseil des ministres libyen à Tripoli, on n’est plus dans la protection des civils. Je pense qu’il faut maintenant revenir à un processus politique, on ne peut pas continuer comme ça. (…) Que l’affaire soit à nouveau soumise au conseil de sécurité de l’Onu. (…) Je pense que le moment est venu de reprendre ses esprits. M. Bernard-Henri Levy nous a engagés dans une opération dont il n’a peut-être pas mesuré toutes les conséquences.
Public Sénat: Faut-il revoir les accords de Schengen, comme le demandent Paris et Rome ?
Jean-Pierre Chevènement: Je pense qu’avec un peu de bonne volonté, les gouvernements européens auraient pu trouver une solution humaine et descente au problème qui se pose, s’agissant notamment des réfugiés libyens ou sahéliens (…) qu’on aurait pu se répartir facilement. S’agissant des tunisiens, ils n’ont pas de raisons politiques de venir en Europe, ce sont des raisons économiques qui les poussent. C’est donc un plan d’aide économique à la Tunisie et à tous les pays de la rive sud de la méditerranée qui est nécessaire.
Maintenant, faut-il revoir le dispositif de Schengen ? Il me semble qu’il y a dans l’article 5 des dispositions qui peuvent permettre d’introduire un minimum de viscosité aux frontières en cas d’afflux majeur. Est-ce aujourd’hui le cas ? Je pense qu’on exagère beaucoup. Et on tend à faire, pour des raisons électorales, des immigrés le problème central de la société française, alors qu’elle connait des difficultés sur le plan de la croissance, du chômage, des inégalités et naturellement il y a un malaise qui se cristallise sur l’immigration. Je ne dis pas qu’il n’y a pas de problèmes qui se posent. Mais il y a quelque chose de malsain, de morbide, dans cette focalisation absurde.
(…) Je pense qu’il y a quand même un arrangement à trouver entre les différents pays européens pour résoudre le problème de ceux qui sont particulièrement concernés. Je pense aux libyens – du fait de la guerre qui sévit en Libye, qu’il faudrait d’ailleurs arrêter – et du point de vue des sahéliens (…).
La répression continue en Syrie contre les manifestants au régime. Faut-il que la France s’engage en Syrie comme elle l’a fait en Libye ?
Il faudrait s’engager partout à ce moment-là. On peut condamner ce qui se passe en Syrie et apporter un traitement humain à ceux qui voudraient quitter ce pays, mais on ne peut pas intervenir partout, ça n’a pas de sens. En Libye on est en train de passer insensiblement de la responsabilité de protéger les populations civiles, à l’ingérence pure et simple. Quand on détruit les appartements ou les bureaux du conseil des ministres libyen à Tripoli, on n’est plus dans la protection des civils. Je pense qu’il faut maintenant revenir à un processus politique, on ne peut pas continuer comme ça. (…) Que l’affaire soit à nouveau soumise au conseil de sécurité de l’Onu. (…) Je pense que le moment est venu de reprendre ses esprits. M. Bernard-Henri Levy nous a engagés dans une opération dont il n’a peut-être pas mesuré toutes les conséquences.
Le PS commence ses discussions avec ses partenaires de gauche dans la perspective d’un contrat de mandature. Entre le MRC et le PS, il existe depuis longtemps des désaccords sur l’Europe. Pourrez-vous les surmonter ?
Ce désaccord est patent depuis fort longtemps, depuis 1992 et le Traité de Maastricht, qui a opposé le MDC (Mouvement des citoyens, ndlr) naissant et le PS. On voit à quoi nous a conduit la monnaie unique. C’est une énorme erreur qui a été faite, les conséquences en sont aujourd’hui visibles. Et il est clair que les moyens mis en œuvre ne permettront pas de résoudre cette question très difficile. Et nous demandons aux candidats du PS de dire comment ils envisagent l’avenir de l’Europe, fédérale ou confédérale, et comment ils envisagent l’avenir de la zone euro, avec quelles règles, notamment pour les pouvoirs et mission de la Banque central européenne (…). Si le PS ne bouge pas il sera même en deçà de ce qu’avait été la position de Ségolène Royal en 2006-2007.
Le projet du PS est-il à la hauteur ?
Il est méritoire à certains égards, par ailleurs il propose un montant de dépense qu’on peut estimer entre 25 milliards, c’est le chiffre du PS, et plus de 100 milliards, selon Les Echos. Ce n’est pas compatible avec le système de l’euro et le pacte de compétitivité Merkel-Sarkozy qui vise à comprimer les dépenses (…).
C’est Marine Le Pen qui séduit le plus les ouvriers selon un sondage. Un aveu d’échec pour gauche ?
C’est évident que ça devrait faire réfléchir le PS. Je ne dis pas la gauche, car je pense qu’elle n’est pas réductible au seul Parti socialiste.
Vous aviez évoqué la possibilité de votre candidature à la présidentielle en janvier. Où en êtes-vous de votre réflexion ?
J’y réfléchis de plus en plus. Je trouve qu’en l’absence d’offre alternative, la nécessité d’une candidature apparait de plus en plus comme une nécessité inéluctable. Mais ce n’est pas que je l’aurais souhaité. C’est que ça va se faire comme ça. Je sais que beaucoup de gens rêvent de la présidence de la République en se rasant le matin, ça n’a jamais été mon cas. Je considère que c’est d’abord un impérieux devoir à l’égard du pays. Et ça ne peut pas être autre chose. Ça ne peut pas être une satisfaction narcissique. (…) Si l’un des candidats socialistes bouge et fait entendre une différence – sur le problème de l’euro, sur la perspective de l’Europe – qui aille dans le sens que nous prônons, la porte sera ouverte pour une discussion. Il est évident que s’ils sont tous sur la même ligne, il n’y aura pas de discussion valable.
Quand est-il d’un risque d’un nouveau 21 avril ?
Je pense que les Français ont droit au débat. S’il y avait eu encore plus de candidats (en 2002, ndlr) ça aurait été mieux. Il y en avait 16, c’était beaucoup, mais s’il y en avait 40 ça aurait été encore mieux !
Votre parti, le MRC, a selon nos informations envoyé une lettre à 600 maires qui vous avaient donné leur parrainage en 2002. C’est pour préparer le terrain ?
Je vous suggère d’interviewer le président du Mouvement républicain et citoyen, M. Jean-Luc Laurent, qui autant que je le sache est l’auteur de cette lettre.
Pour le Sénat, les rumeurs qui vous disaient intéressé par la présidence étaient farfelues ?
(…) L’élection qui compte ce n’est pas l’élection du président du Sénat, qu’elle qu’importance qu’ait le Sénat dans l’agencement institutionnel. Je suis pour le bicaméralisme, je pense que c’est très utile. Mais ce n’est pas l’élection décisive dans la vie politique française. C’est l’élection présidentielle qui compte.
Propos recueillis par François Vignal
Source : Public Sénat
Ce désaccord est patent depuis fort longtemps, depuis 1992 et le Traité de Maastricht, qui a opposé le MDC (Mouvement des citoyens, ndlr) naissant et le PS. On voit à quoi nous a conduit la monnaie unique. C’est une énorme erreur qui a été faite, les conséquences en sont aujourd’hui visibles. Et il est clair que les moyens mis en œuvre ne permettront pas de résoudre cette question très difficile. Et nous demandons aux candidats du PS de dire comment ils envisagent l’avenir de l’Europe, fédérale ou confédérale, et comment ils envisagent l’avenir de la zone euro, avec quelles règles, notamment pour les pouvoirs et mission de la Banque central européenne (…). Si le PS ne bouge pas il sera même en deçà de ce qu’avait été la position de Ségolène Royal en 2006-2007.
Le projet du PS est-il à la hauteur ?
Il est méritoire à certains égards, par ailleurs il propose un montant de dépense qu’on peut estimer entre 25 milliards, c’est le chiffre du PS, et plus de 100 milliards, selon Les Echos. Ce n’est pas compatible avec le système de l’euro et le pacte de compétitivité Merkel-Sarkozy qui vise à comprimer les dépenses (…).
C’est Marine Le Pen qui séduit le plus les ouvriers selon un sondage. Un aveu d’échec pour gauche ?
C’est évident que ça devrait faire réfléchir le PS. Je ne dis pas la gauche, car je pense qu’elle n’est pas réductible au seul Parti socialiste.
Vous aviez évoqué la possibilité de votre candidature à la présidentielle en janvier. Où en êtes-vous de votre réflexion ?
J’y réfléchis de plus en plus. Je trouve qu’en l’absence d’offre alternative, la nécessité d’une candidature apparait de plus en plus comme une nécessité inéluctable. Mais ce n’est pas que je l’aurais souhaité. C’est que ça va se faire comme ça. Je sais que beaucoup de gens rêvent de la présidence de la République en se rasant le matin, ça n’a jamais été mon cas. Je considère que c’est d’abord un impérieux devoir à l’égard du pays. Et ça ne peut pas être autre chose. Ça ne peut pas être une satisfaction narcissique. (…) Si l’un des candidats socialistes bouge et fait entendre une différence – sur le problème de l’euro, sur la perspective de l’Europe – qui aille dans le sens que nous prônons, la porte sera ouverte pour une discussion. Il est évident que s’ils sont tous sur la même ligne, il n’y aura pas de discussion valable.
Quand est-il d’un risque d’un nouveau 21 avril ?
Je pense que les Français ont droit au débat. S’il y avait eu encore plus de candidats (en 2002, ndlr) ça aurait été mieux. Il y en avait 16, c’était beaucoup, mais s’il y en avait 40 ça aurait été encore mieux !
Votre parti, le MRC, a selon nos informations envoyé une lettre à 600 maires qui vous avaient donné leur parrainage en 2002. C’est pour préparer le terrain ?
Je vous suggère d’interviewer le président du Mouvement républicain et citoyen, M. Jean-Luc Laurent, qui autant que je le sache est l’auteur de cette lettre.
Pour le Sénat, les rumeurs qui vous disaient intéressé par la présidence étaient farfelues ?
(…) L’élection qui compte ce n’est pas l’élection du président du Sénat, qu’elle qu’importance qu’ait le Sénat dans l’agencement institutionnel. Je suis pour le bicaméralisme, je pense que c’est très utile. Mais ce n’est pas l’élection décisive dans la vie politique française. C’est l’élection présidentielle qui compte.
Propos recueillis par François Vignal
Source : Public Sénat