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"Si la France s'aimait, tous ces problèmes d'intégration seraient résolus"


Jean-Pierre Chevènement était l'invité de "Entre les lignes" sur LCP samedi 30 novembre 2013. Il répondait aux questions de Frédéric Haziza et débattait avec Alain Finkielkraut.


Verbatim express :


  • La guerre de 1914 est une épreuve inouïe, comme notre peuple en a peu connue : 1,5 millions de Français sont morts durant cette guerre.
  • Il y a deux versions de cette guerre : la version pénitentielle, associée à l'idée de mort, d'absurdité, de fin de la France. Mais il y a une version différente, plus tonique d'une certaine manière : la guerre de 1914-1918 est ce qui a permis à la France de rester une grande nation, parce qu'elle a résisté, parce que Churchill s'est souvenu en 1945 du sacrifice des Poilus, et la France a été rétablie à son rang, non seulement par les immenses mérites du général de Gaulle, mais également par la projection de ce souvenir.
  • On oublie qu'en 1940, la France était seule. Les Britanniques n'avaient envoyé que 8 divisions et pas d'aviation, les Américains ne voulaient pas intervenir, ni vendre des avions à crédit, l'URSS était alors l'alliée de l'Allemagne nazie. On ne porte pas un regard juste, équitable, sur l'histoire de la France au XXe siècle, si on ne rassemble pas tout cela.
  • 1914-1918 a été une guerre de défense nationale, parce que la France a été agressée, parce que les dirigeants de l'Allemagne de Guillaume II ont mené une guerre préventive, comme l'Amérique de Bush fils en Irak, destinée à mettre la France hors-jeu en six semaines.
  • L'identité française est malheureuse, comme le dit à juste titre Alain Finkielkraut, pour cela mais aussi pour d'autres raisons. Elle est malheureuse depuis 1918-1919, parce qu'il y a eu trop de morts.
  • Le traité de Versailles a été déséquilibré d'emblée parce que le président américain Wilson a été battu aux élections américaines de 1920, que l'Amérique et l'Allemagne ont conclu une paix séparée, et l'absence de la garantie donnée par Wilson à Clemenceau a fragilisé l'édifice, qui ne reposait plus que sur la prééminence à perte de vue de l'armée française. Or ça, c'était un pari qui ne pouvait pas être tenu.

  • Je partage beaucoup des idées d' Alain Finkielkraut, notamment sur l'école, les valeurs de la transmission. Il y a néanmoins des choses que je voudrai nuancer.
  • Sur Vichy, l'Occupation, il faut toujours se rappeler qu'en 1940, la France était seule. Les grandes démocraties ne sont pas venues à son secours.
  • C'est une faute qu'a commise Jacques Chirac, en identifiant l'irréparable, qui a été effectivement commis par l’État français de Vichy, et la France.
  • Il y a des dizaines de milliers de résistants qui ont été fusillés, plus de 600 000 Français ont été tués dans les camps ou ailleurs, et par conséquent il ne faut quand même pas faire injure à ceux qui ont refusé l'équation « Pétain, c'est la France ».
  • Il faut éviter les excès de l'idéologie pénitentielle.
  • La guerre de 14 doit être commémorée autrement qu'on ne le fait : c'est quand même un acte de foi de la France en elle-même. C'est un immense sacrifice qui est fait pour que la France continue.
  • Il y a dès aujourd'hui plus de francophones en Afrique qu'il n'y en a en France. Cela rejaillit sur l'identité française, qui au fond est une identité d'adhésion. Être Français, c'est vouloir être français, comme le disait Renan, c'est avoir un legs de souvenirs communs et en même temps vouloir continuer à vivre ensemble.
  • La France a toujours accueilli des apports venus d'ailleurs, et nous pouvons toujours en accueillir, par exemple des peuples arabes. L'essentiel est que la personnalité de la France reste une personnalité structurée.
  • La France vit au long des siècles. Elle n'est pas née en 1789, même si la République est le nom moderne de la France. Mais pour que la Révolution française se produise, il a fallu toute une sédimentation. Emmanuel Todd explique cela très bien à travers les structures de la parenté.
  • Il faut défendre l'idée que la France nous appartient à tous.
  • Si on prend la Marseillaise en 1985 et aujourd'hui, on constate les fantastiques progrès qu'elle a fait.
  • Je suis un laïc, plutôt strict. Je pense que les étrangers accueillis sur notre sol doivent respecter nos lois. Pour autant, qu'on on regarde l'immigration, 46% des hommes nés de l'immigration maghrébine se marient en dehors de leur groupe ou de leur aire culturelle d'origine. Je reste confiant dans la capacité de la France à surmonter la crise, qui est une crise de longue durée, qui vient de très loin, pour faire France à nouveau.
  • Il faut distinguer l'islamisme radical, qu'il faut combattre, de l'islam qui est une religion comme les autres, dès lors qu'elle accepte les lois de la République.
  • Si la France avait confiance en elle-même, si elle croyait en son avenir, si elle était rayonnante du fond d'elle-même, elle n'aurait aucune peine à intégrer tous ces gens, qui ne la rejettent, pour certains seulement, que parce que la France se hait elle-même. Si la France s'aimait, tous ces problèmes seraient résolus.
  • La France est une identité d'adhésion, où chacun vient avec son cœur.
  • Vous savez, je suis président d'une association, France-Algérie, et je vois beaucoup de Franco-Algériens qui ont magnifiquement réussis. Il n'y a pas que les petits dealers, il y a aussi des gens qui ont travaillé, qui sortent de rien, qui sont des fonctionnaires, des ingénieurs, des techniciens, qui sont des gens qui veulent élever leurs enfants, au bon sens du terme, c'est à dire les hisser plus haut qu'eux-mêmes encore.
  • Je pense qu'on ne peut pas être systématiquement pessimiste. Gardons une idée de ce que la France peut être dans le siècle à venir.

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le Samedi 30 Novembre 2013 à 11:28 | Lu 3787 fois



1.Posté par Eric CAVALIER le 13/12/2013 00:03
Malheureusement l'idéologie pénitentielle imprègne tout le rapport sur l'intégration qui prône le renoncement à l'intégration, et même jusqu'à la suppression du mot (cf. Orwell 1984 et sa novlangue). Les destructeurs de la France (et au passage de la laïcité) sont plus que jamais à l'oeuvre.

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