Jean-Pierre Chevènement, ancien ministre de la Défense et président du Mouvement républicain et citoyen (MRC) se prononce en faveur d’un retrait progressif des troupes françaises en Afghanistan.
L'Alsace : Faut-il maintenir une présence française en Afghanistan ?
Jean-Pierre Chevènement : Le seul objectif qu’on puisse se donner, c’est d’aider l’Afghanistan à devenir un État digne de ce nom. À mes yeux, la tâche des soldats français devrait se borner à former les soldats afghans. Les Américains ont pollué le dossier afghan dès le départ. Doublement. D’abord en ne mettant pas les moyens — ils ont envoyé 8 000 hommes en Afghanistan contre 140 000 en Irak, pays qui n’avait rien à voir avec les attentats du 11 septembre. Ensuite, en déclenchant avec l’ensemble du monde musulman ce qui a été ressenti comme une guerre de civilisation. George Bush parle de guerre contre le terrorisme mais il faut distinguer, en Afghanistan, les tribus pachtounes qui forment la majorité de la population et Al-Qaïda et ses alliés qui ne représentent qu’une petite minorité.
Vous êtes donc favorable au retrait des troupes françaises ?
Je ne demande pas un retrait immédiat et total mais un retrait progressif. La nouvelle administration américaine, après les élections de novembre, va redéfinir les objectifs. Il est dommage que nous soyons totalement à la remorque de l’Amérique. On voit là tout le danger de la réintégration de la France dans l’organisation militaire intégrée de l’Otan. C’est le plus sûr moyen de se faire entraîner dans des guerres qui ne sont pas les nôtres. L’Afghanistan n’a jamais été dans la zone des intérêts prioritaires de la France. Cette guerre n’a rien à voir avec les intérêts de la France.
Faut-il, comme le dit ministre de la Défense, que le gouvernement afghan discute avec les talibans qui « ne sont pas dans le djihad » ?
Il n’y a pas de talibans modérés mais il faut engager la discussion avec la guérilla pachtoune pour la séparer d’Al-Qaïda et de Ben Laden. On ne peut pas faire passer un pays du Moyen âge au XXIe siècle à coup de bombes guidées par laser. On n’exporte jamais ses valeurs à la pointe des baïonnettes. On devrait le savoir depuis la Révolution française.
Pour Nicolas Sarkozy, si on laisse tomber l’Afghanistan on déstabilise le Pakistan…
Le Pakistan a aussi ses propres problèmes et la bombe nucléaire pakistanaise est avant tout dirigée contre l’Inde. En fait on peut toujours trouver de bonnes raisons pour justifier un engagement militaire. Avec cette déclaration de Nicolas Sarkozy, nous sommes dans le grand n’importe quoi.
Propos recueillis par Céline Mazeau
L'Alsace : Faut-il maintenir une présence française en Afghanistan ?
Jean-Pierre Chevènement : Le seul objectif qu’on puisse se donner, c’est d’aider l’Afghanistan à devenir un État digne de ce nom. À mes yeux, la tâche des soldats français devrait se borner à former les soldats afghans. Les Américains ont pollué le dossier afghan dès le départ. Doublement. D’abord en ne mettant pas les moyens — ils ont envoyé 8 000 hommes en Afghanistan contre 140 000 en Irak, pays qui n’avait rien à voir avec les attentats du 11 septembre. Ensuite, en déclenchant avec l’ensemble du monde musulman ce qui a été ressenti comme une guerre de civilisation. George Bush parle de guerre contre le terrorisme mais il faut distinguer, en Afghanistan, les tribus pachtounes qui forment la majorité de la population et Al-Qaïda et ses alliés qui ne représentent qu’une petite minorité.
Vous êtes donc favorable au retrait des troupes françaises ?
Je ne demande pas un retrait immédiat et total mais un retrait progressif. La nouvelle administration américaine, après les élections de novembre, va redéfinir les objectifs. Il est dommage que nous soyons totalement à la remorque de l’Amérique. On voit là tout le danger de la réintégration de la France dans l’organisation militaire intégrée de l’Otan. C’est le plus sûr moyen de se faire entraîner dans des guerres qui ne sont pas les nôtres. L’Afghanistan n’a jamais été dans la zone des intérêts prioritaires de la France. Cette guerre n’a rien à voir avec les intérêts de la France.
Faut-il, comme le dit ministre de la Défense, que le gouvernement afghan discute avec les talibans qui « ne sont pas dans le djihad » ?
Il n’y a pas de talibans modérés mais il faut engager la discussion avec la guérilla pachtoune pour la séparer d’Al-Qaïda et de Ben Laden. On ne peut pas faire passer un pays du Moyen âge au XXIe siècle à coup de bombes guidées par laser. On n’exporte jamais ses valeurs à la pointe des baïonnettes. On devrait le savoir depuis la Révolution française.
Pour Nicolas Sarkozy, si on laisse tomber l’Afghanistan on déstabilise le Pakistan…
Le Pakistan a aussi ses propres problèmes et la bombe nucléaire pakistanaise est avant tout dirigée contre l’Inde. En fait on peut toujours trouver de bonnes raisons pour justifier un engagement militaire. Avec cette déclaration de Nicolas Sarkozy, nous sommes dans le grand n’importe quoi.
Propos recueillis par Céline Mazeau