Jean-Pierre Chevènement était l'invité politique de François-Xavier Ménage sur LCI, vendredi 28 octobre 2016.
le 28 Octobre 2016 à 11:30
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Entretien de Jean-Pierre Chevènement avec Valeurs Actuelles, propos recueillis par Anne-Laure Debaecker et André Bercoff, jeudi 27 octobre 2016.
Valeurs actuelles: Dans votre livre, Un défi de civilisation, vous soulignez la crise du modèle républicain. Quelle définition faites-vous de la République, en 2016 ?
Jean-Pierre Chevènement: C'est la souveraineté du peuple, entendu comme corps de citoyens formés par l'école et aptes à définir ensemble l'intérêt général du pays. On ne peut penser la République en dehors des concepts de souveraineté et d'État et sans une vision claire du rôle de l'école, qui est de former le citoyen. Ce n'est pas nouveau. Mais cela reste juste. L'école est devenue, selon vous, une « fabrique à cancres ». Comment expliquer son délitement ? Il est largement le résultat du développement, depuis 1968, de l'idéologie libérale-libertaire et, plus précisément, de son application à l'école à travers les pédagogies dites “constructivistes”. Celles-ci considèrent qu'il faut laisser à l'élève lui-même le soin de construire son savoir. Jean Piaget, principal théoricien de ce courant, opère un renversement copernicien : la transmission ne se fait plus à travers le maître, c'est à l'élève lui-même, en interaction avec ses condisciples, d'acquérir et d'ordonner ses connaissances. Le “pédagogisme” entend opérer ainsi une sorte de révolution culturelle. Or, tous les élèves n'acquièrent pas tous les éléments de savoir au même âge et il apparaît qu'avec ces méthodes, les inégalités de départ ne cessent de s'accroître. À la fin, on récolte l'échec scolaire et le sauvageon. On a pourtant laissé ces pédagogies se diffuser au fil de réformes mal conçues, dont la première fut, en 1975 la réforme Haby, qui a instauré sans préparation et sans adaptation le collège unique. La formalisation des thèses pédagogistes interviendra, en 1989, avec la loi d'orientation sur l'éducation, qui met l'élève au centre de l'école et créé les instituts universitaires de formation des maîtres. Nous en récoltons aujourd'hui les fruits amers. Mais il faut inscrire la déconstruction de l'école républicaine dans une déconstruction plus vaste : celle du modèle républicain lui-même. Nous avons jeté le manche après la cognée et choisi la globalisation à travers une Europe censée se substituer aux nations. Mais cette Europe n'est en aucune manière une entité stratégique. C'est pourquoi je propose de réorienter notre politique européenne à partir du concept d'“Europe européenne” que nous a légué le général de Gaulle. Agenda et médiasJean-Pierre Chevènement était l'invité de Thierry Ardisson dans Salut Les Terriens sur C8, samedi 22 octobre 2016.Jean-Pierre Chevènement était l'invité du Talk Le Figaro, vendredi 21 octobre 2016.Agenda et médiasJean-Pierre Chevènement était l'invité politique de RTL, lundi 17 octobre 2016. Il répondait aux questions d'Elisabeth Martichoux.Bonnes feuilles d'"Un défi de civilisation", le dernier livre de Jean-Pierre Chevènement, parues dans Marianne, 14 octobre 2016.
Comme l'éclair illumine un paysage nocturne, le Brexit, voté par les Britanniques le 23 juin 2016, n'a pas seulement révélé les fragilités de la construction européenne, il a sonné comme un retentissant et cuisant désaveu à l'égard des institutions de Bruxelles.
Le Royaume-Uni avait un statut à part, n'étant ni dans la zone euro ni dans l'espace Schengen. Pour le retenir au sein de l'Union européenne, ses partenaires lui avaient encore consenti une dérogation au principe de la libre circulation des travailleurs au sein de l'Union européenne et un statut de contributeur au budget de l'UE très avantageux. Ils lui avaient même accordé un droit de regard sur l'élaboration des réglementations financières qui auraient pu faire de l'ombre à la City, d'où le Royaume-Uni tire plus de 15 % de son produit intérieur brut, trois fois plus que la France ou l'Allemagne. Pourtant, il faut croire que l'intelligence collective de son peuple - si tant est qu'on croie à la démocratie - a préféré délaisser ce statut spécial apparemment avantageux pour reprendre en main et en toute transparence le contrôle entier de son destin. [...] L'opinion claironnée de la plupart des élites européennes, au lendemain du Brexit, est que le Royaume-Uni s'est tiré une balle dans le pied, que son économie va entrer en récession et que, peut-être, il va éclater. Et si c'était le contraire qui était vrai ? Si le Royaume-Uni avait quitté un édifice branlant où il n'avait d'ailleurs mis qu'un pied, avant qu'il ne s'effondrât sur sa tête ? [...] En maints domaines, le Parlement de Westminster n'avait plus le dernier mot. ActualitésLes actes du colloque du 4 juillet 2016 sont disponibles en ligne sur le site de la Fondation Res Publica.
Voici le texte validé de l'interview donnée par Jean-Pierre Chevènement à l'Hebdomadaire Le Point qui en reproduit une version contractée, jeudi 13 octobre 2016, propos recueillis par Laureline Dupont et Thomas Mahler.
Le Point: Votre livre est une défense de la realpolitik et d’une vision stratégique sur le long terme. Mais cela peut-être dur à entendre quand on assiste au quotidien à un martyre comme celui de la ville d’Alep…
Jean-Pierre Chevènement: Le plus grand risque pour un politique qui entend comprendre le monde c’est de se laisser happer par l’immédiateté, et c’est le plus sûr moyen de réduire la politique à la communication, c’est-à-dire à rien. La France aborde un temps d’épreuves qu’elle ne surmontera que si elle comprend la nature du défi qui lui est jeté, non seulement par le terrorisme mondialisé, mais par la « globalisation », dont celui-ci n’est qu’une facette. L’ambition de ce livre a été de déplacer l’axe de la caméra de la partie vers le tout, de l’Islam vers une « globalisation » devenue à elle-même sa propre fin, non pour nier la réalité et la gravité des périls qui nous menacent, mais pour les comprendre afin de les surmonter. La France est aujourd’hui en panne de projet. J’ai voulu montrer qu’il y avait pour elle un chemin, celui de « l’Europe européenne », de l’Atlantique à la Russie, que le général de Gaulle lui avait indiqué, il y a plus d’un demi-siècle. C’est le seul moyen de relever les défis venus du Sud par un projet de civilisation et de desserrer, au XXIe siècle, les mâchoires du G2 sino-américain qui sont déjà en train de se refermer sur l’Europe. Je propose donc une grille de lecture du monde, et particulièrement des relations entre le monde musulman et l’Occident, depuis au moins un demi-siècle. Il y a évidemment un rapport entre celles-ci et le terrorisme qui nous frappe. Pour comprendre la réaction du monde musulman à la « globalisation » et au tsunami de modernité et d’hyperindividualisme occidental, j’utilise les concepts forgés par Pierre Brochand que je crois éclairants : rebond (Malaisie-Indonésie) – rente (pays du Golfe) – renoncement (Somalie) – refus, à travers l’islamisme politique (Iran et pays sunnites gagnés à l’influence des « Frères musulmans »), rejet enfin, à travers le terrorisme djihadiste dont Gilles Kepel a décrit les étapes depuis 1979 : djihad afghan, djihad planétaire d’Al Quaïda, djihad territorialisé et réticulaire de Daech. |
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