Verbatim :
[L’idée de faire émerge un islam républicain] devrait être rendue à Jacques Berque, très grand arabisant et immense écrivain, qui avait cette idée que les musulmans vivant en France, pour la plupart de nationalité française, devraient aider à faire évoluer l’islam et à renverser ce courant du fondamentalisme religieux qui existe dans le monde arabe musulman depuis à peu près quatre décennies (1979).
J’avais initié la consultation de 1999 avec toutes les sensibilités de l’Islam en France pour bâtir, pour faire émerger, cet Islam de France, c’est-à-dire autonome dans ses sources de financement et dans sa pensée.
Le dispositif retenu est simple. Bernard Cazeneuve, dont j’apprécie la maîtrise qu’il a de ses dossiers et de son langage, l’a rappelé. C’est un tripode, il y a trois pieds.
Premièrement, il y a la fondation dont l’objet est profane. La Fondation va aider des projets éducatifs, culturels, sociaux, elle va financer des recherches en islamologie, faire en sorte que le contact soit pris avec la jeunesse.
A côté d’elle, qui est une fondation reconnue d’utilité publique, il y aura une association cultuelle, de la loi de 1905, qui elle interviendra sur l’aspect religieux, autrement dit la construction de lieux de culte, ou la formation religieuse des imams. Cette association sera adossée à la fondation.
[L’idée de faire émerge un islam républicain] devrait être rendue à Jacques Berque, très grand arabisant et immense écrivain, qui avait cette idée que les musulmans vivant en France, pour la plupart de nationalité française, devraient aider à faire évoluer l’islam et à renverser ce courant du fondamentalisme religieux qui existe dans le monde arabe musulman depuis à peu près quatre décennies (1979).
J’avais initié la consultation de 1999 avec toutes les sensibilités de l’Islam en France pour bâtir, pour faire émerger, cet Islam de France, c’est-à-dire autonome dans ses sources de financement et dans sa pensée.
Le dispositif retenu est simple. Bernard Cazeneuve, dont j’apprécie la maîtrise qu’il a de ses dossiers et de son langage, l’a rappelé. C’est un tripode, il y a trois pieds.
Premièrement, il y a la fondation dont l’objet est profane. La Fondation va aider des projets éducatifs, culturels, sociaux, elle va financer des recherches en islamologie, faire en sorte que le contact soit pris avec la jeunesse.
A côté d’elle, qui est une fondation reconnue d’utilité publique, il y aura une association cultuelle, de la loi de 1905, qui elle interviendra sur l’aspect religieux, autrement dit la construction de lieux de culte, ou la formation religieuse des imams. Cette association sera adossée à la fondation.
Troisièmement, le ou les instituts d’islamologie que le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche sera chargé de faire émerger, je l’espère avec plus de succès qu’en 1999, de telle manière que nous ayons les lieux de compétence qui nous permettront de nouer avec des instituts de formation religieux qui resteront privés des conventions qui permettraient en quelque sorte de réaliser les évolutions nécessaires.
Il y a eu une déclaration de principes le 28 janvier 2000. Elle reste pleinement valable, où les sensibilités de l’islam en Franc reconnaissent la nécessité d’appliquer les principes républicains dans tous les domaines: séparation de l’Eglise et de l’Etat, laïcité, égalité homme-femme, etc.
D’autre part, il y a le CFCM, qui a été créé par Nicolas Sarkozy en 2003 mais sur la base de ce que j’avais initié.
C’est ce que Bernard Cazeneuve m’a demandé de reprendre puisque la Fondation qui avait été créée en 2005 pour donner des moyens de financement s’est enlisée très vite. C’était M. de Villepin qui a l’époque avait pris cette initiative. Donc je note que ce sont des initiatives venant de la gauche et venant de la droite, que c’est une oeuvre d’intérêt national.
Nous avons selon l’INED 4,1 millions de musulmans vivant en France, pour la plupart français. Il faut faire France à nouveau, il faut créer les conditions qui feront qu’ils se reconnaîtront pleinement dans la communauté nationale et que celle-ci aura sur l’Islam un regard plus profond, plus averti, en même temps qu’eux mêmes comprendront mieux ce qu’est la République française, et notamment la laïcité, si mal expliquée, utilisée n’importe comment.
Alors que la laïcité est un principe fondamental, elle n’est pas tournée contre la religion. Elle sépare l’espace de la spiritualité qui est libre de l’espace commun des citoyens qui est l’espace laïc où ils sont invités à s’exprimer avec des arguments raisonnés plutôt que par l’étalage de la révélation qui leur est propre.
J’ai cité Tareq Obrou, le recteur de la mosquée de Bordeaux qui donnait le conseil de discrétion, mais ce conseil dans mon esprit s’adresse à toutes les religions en vertu même du principe de laïcité.
Dans l’espace commun qui est l’espace laïc, chacun doit faire abstraction de ses dogmes et venir avec sa raison, et à la lumière de la raison naturelle, essayer de définir un intérêt général qui soit l’intérêt de la République.
Il y a une confusion. On parle d’un problème de laïcité là où il n’existe pas vraiment. La plage est un espace public, mais d’ébats plutôt que de débats. Je rappelle un principe républicain : tout ce que la loi n’interdit pas est permis, autrement dit les moeurs sont libres. Mais il y a un problème, c’est celui de l’intégration. C’est vrai que toutes les vagues successives d’immigration ont fait un effort pour coïncider plus ou moins avec les us et coutumes du pays d’accueil.
Je parle d’intégration, ce n’est pas forcément un très bon mot mais c’est le meilleur. Je ne suis pas pour le communautarisme, je suis pour le fait qu’il y ait des principes communs sous le toit desquels peuvent s’épanouir les différences. Je ne suis pas pour une réglementation tatillonne des moeurs, par contre, je suis pour le combat d’idées, l’islam des lumières, l’égalité hommes-femmes. Je suis bien obligé de considérer que le burkini pose ce problème. Il vise à définir une place de la femme dans la société, qui est nettement distincte et subordonnée à celle des hommes. Je pense qu’on peut le tolérer, il est licite, mais on peut ne pas l’approuver. C’est ce qu’a dit Manuel Valls à sa manière, en disant que ce n’est pas un problème anodin.
Je connais bien le monde musulman. Je suis allé au Caire, à Alger, il y a quarante ou cinquante ans. La plupart des femmes ne portaient pas le voile. Mais il y a une tendance de fond qu’il faut bien appeler la montée du fondamentalisme religieux qui fait qu’aujourd’hui l’immense majorité des femmes ne peuvent plus sortir dans la rue sans être voilées. Cela traduit quelque chose qui se répercute aussi dans nos cités. C’est une question qui relève du débat d’idées, est-ce que par rapport à la société d’accueil c’est une bonne chose ? J’ai été élu pendant 41 ans du territoire de Belfort, je sais comment c’est ressenti. Par conséquent, je crois que Bernard Cazeneuve a rappelé que le but doit être l’apaisement, la non stigmatisation, mais en même temps chacun doit faire un effort et il me semble qu’il est de mon devoir de rappeler qu’une certaine discrétion est souhaitable.
Jean-Pierre Chevènement répond aux questions des auditeurs :
Il y a eu une déclaration de principes le 28 janvier 2000. Elle reste pleinement valable, où les sensibilités de l’islam en Franc reconnaissent la nécessité d’appliquer les principes républicains dans tous les domaines: séparation de l’Eglise et de l’Etat, laïcité, égalité homme-femme, etc.
D’autre part, il y a le CFCM, qui a été créé par Nicolas Sarkozy en 2003 mais sur la base de ce que j’avais initié.
C’est ce que Bernard Cazeneuve m’a demandé de reprendre puisque la Fondation qui avait été créée en 2005 pour donner des moyens de financement s’est enlisée très vite. C’était M. de Villepin qui a l’époque avait pris cette initiative. Donc je note que ce sont des initiatives venant de la gauche et venant de la droite, que c’est une oeuvre d’intérêt national.
Nous avons selon l’INED 4,1 millions de musulmans vivant en France, pour la plupart français. Il faut faire France à nouveau, il faut créer les conditions qui feront qu’ils se reconnaîtront pleinement dans la communauté nationale et que celle-ci aura sur l’Islam un regard plus profond, plus averti, en même temps qu’eux mêmes comprendront mieux ce qu’est la République française, et notamment la laïcité, si mal expliquée, utilisée n’importe comment.
Alors que la laïcité est un principe fondamental, elle n’est pas tournée contre la religion. Elle sépare l’espace de la spiritualité qui est libre de l’espace commun des citoyens qui est l’espace laïc où ils sont invités à s’exprimer avec des arguments raisonnés plutôt que par l’étalage de la révélation qui leur est propre.
J’ai cité Tareq Obrou, le recteur de la mosquée de Bordeaux qui donnait le conseil de discrétion, mais ce conseil dans mon esprit s’adresse à toutes les religions en vertu même du principe de laïcité.
Dans l’espace commun qui est l’espace laïc, chacun doit faire abstraction de ses dogmes et venir avec sa raison, et à la lumière de la raison naturelle, essayer de définir un intérêt général qui soit l’intérêt de la République.
Il y a une confusion. On parle d’un problème de laïcité là où il n’existe pas vraiment. La plage est un espace public, mais d’ébats plutôt que de débats. Je rappelle un principe républicain : tout ce que la loi n’interdit pas est permis, autrement dit les moeurs sont libres. Mais il y a un problème, c’est celui de l’intégration. C’est vrai que toutes les vagues successives d’immigration ont fait un effort pour coïncider plus ou moins avec les us et coutumes du pays d’accueil.
Je parle d’intégration, ce n’est pas forcément un très bon mot mais c’est le meilleur. Je ne suis pas pour le communautarisme, je suis pour le fait qu’il y ait des principes communs sous le toit desquels peuvent s’épanouir les différences. Je ne suis pas pour une réglementation tatillonne des moeurs, par contre, je suis pour le combat d’idées, l’islam des lumières, l’égalité hommes-femmes. Je suis bien obligé de considérer que le burkini pose ce problème. Il vise à définir une place de la femme dans la société, qui est nettement distincte et subordonnée à celle des hommes. Je pense qu’on peut le tolérer, il est licite, mais on peut ne pas l’approuver. C’est ce qu’a dit Manuel Valls à sa manière, en disant que ce n’est pas un problème anodin.
Je connais bien le monde musulman. Je suis allé au Caire, à Alger, il y a quarante ou cinquante ans. La plupart des femmes ne portaient pas le voile. Mais il y a une tendance de fond qu’il faut bien appeler la montée du fondamentalisme religieux qui fait qu’aujourd’hui l’immense majorité des femmes ne peuvent plus sortir dans la rue sans être voilées. Cela traduit quelque chose qui se répercute aussi dans nos cités. C’est une question qui relève du débat d’idées, est-ce que par rapport à la société d’accueil c’est une bonne chose ? J’ai été élu pendant 41 ans du territoire de Belfort, je sais comment c’est ressenti. Par conséquent, je crois que Bernard Cazeneuve a rappelé que le but doit être l’apaisement, la non stigmatisation, mais en même temps chacun doit faire un effort et il me semble qu’il est de mon devoir de rappeler qu’une certaine discrétion est souhaitable.
Jean-Pierre Chevènement répond aux questions des auditeurs :
Extrait :
Prenez le métro pour aller par exemple à Saint-Denis ou à Sarcelles, regardez ce qui se passe, voyez comment cela se traduit au niveau de l’école. Naturellement, les populations anciennement installées, ouvrières en général, ont quitté la plupart de ces communes, ont déménagé dans des zones périphériques plus lointaines. Au niveau de l’école, cela se traduit par le fait que 80% des enfants à l’école primaire ne maîtrisent pas le français, donc les parents qui le peuvent mettent leurs enfants à Paris ou bien dans des écoles privées et il y a une espèce de ségrégation de fait qui s’installe. Le processus de l’intégration n’est plus possible, puisqu’il y a à Saint-Denis par exemple, 135 nationalités mais il y en a une qui a quasimment disparu. Donc je pense qu’il y a des problèmes d’équilibre de la société française auxquels il faut être attentif si nous voulons aller dans le sens d’un apaisement profond, dans le sens d’une tolérance mutuelle et si nous voulons continuer à vivre dans une République dont le principe est l’égalité de tous les citoyens devant la loi, et pas dans une société multi-communautariste ou communautariste.
Prenez le métro pour aller par exemple à Saint-Denis ou à Sarcelles, regardez ce qui se passe, voyez comment cela se traduit au niveau de l’école. Naturellement, les populations anciennement installées, ouvrières en général, ont quitté la plupart de ces communes, ont déménagé dans des zones périphériques plus lointaines. Au niveau de l’école, cela se traduit par le fait que 80% des enfants à l’école primaire ne maîtrisent pas le français, donc les parents qui le peuvent mettent leurs enfants à Paris ou bien dans des écoles privées et il y a une espèce de ségrégation de fait qui s’installe. Le processus de l’intégration n’est plus possible, puisqu’il y a à Saint-Denis par exemple, 135 nationalités mais il y en a une qui a quasimment disparu. Donc je pense qu’il y a des problèmes d’équilibre de la société française auxquels il faut être attentif si nous voulons aller dans le sens d’un apaisement profond, dans le sens d’une tolérance mutuelle et si nous voulons continuer à vivre dans une République dont le principe est l’égalité de tous les citoyens devant la loi, et pas dans une société multi-communautariste ou communautariste.